CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 Dans de nombreux pays, les recensements de population livrent une somme d’informations considérable sur les origines des habitants, leur langue maternelle, leur appartenance « ethnique » ou leur nationalité, parfois leur religion, et cela à un niveau géographique suffisamment désagrégé – parfois même au niveau de très petites unités administratives – pour permettre une cartographie fine de cette diversité. Pour les chercheurs habitués à cette forme d’ouverture, le caractère très agrégé des données sociodémographiques relatives à l’immigration en France – justifiée par divers arguments juridiques – constitue un sérieux obstacle. Celui-ci renvoie au débat toujours en cours sur la mise en place de « statistiques ethniques » qui, selon leurs partisans, permettraient de lutter contre les discriminations liées aux origines [Héran, 2010 ; Maulin, 2009].

2 L’analyse conduite ici tente de démêler le contexte et les conséquences de ce « flou statistique » qui, en Guyane, n’est pas sans conséquence sur la mise en œuvre de politiques publiques adaptées [1]. Les nombreux non-dits qui entourent la question migratoire dans ce département français d’Amérique du Sud s’inscrivent en effet dans la problématique plus large du développement de celui-ci comme dans les débats relatifs à la « guyanité » ; au point de se demander si ces ambiguïtés et silences ne sont pas mis au service d’un commode statu quo.

3 Comparée aux autres territoires de l’outremer français, la diversité culturelle de la population résidant en Guyane est une réalité sans équivalent. Géographiquement localisée [Piantoni, 2008], elle est d’autant plus importante à prendre en compte qu’elle structure très largement la vie économique, sociale et politique du département. Visible, assumée, parfois même revendiquée, elle tient autant à l’histoire du peuplement dans ses appartenances et ses origines multiples (Amérindiens, Noirs-marrons, Créoles, Chinois, Hmong, etc.) qu’à une très importante immigration d’origine étrangère (Suriname, Brésil, Haïti, etc.) qui, toutes nationalités confondues, pourrait à terme devenir majoritaire.

4 Pourtant, le statut de département français octroyé à la Guyane en 1946 ne permet guère de rendre compte de manière chiffrée de cette diversité car s’y applique, comme en métropole, la rigueur de l’article premier du préambule de la Constitution de 1958 : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. […]. » En Guyane comme en France métropolitaine, ce principe constitutionnel d’égalité a pour effet d’interdire toute mesure et tout dénombrement officiel quant aux origines et aux appartenances « ethniques » des individus [Veil, 2008]. L’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) satisfait bien entendu à la lettre ce principe et ce, aussi bien pour la population française qu’étrangère pour lesquelles s’appliquent également les contraintes associées au strict respect de l’anonymat, avec pour conséquence un accès très limité aux données de population à un niveau suffisamment désagrégé pour rendre compte de manière satisfaisante de la diversité des lieux et des populations.

5 À titre d’exemple, Marie-José Jolivet [1997, p. 815] observait à propos de la population guyanaise :

6

« Il y a vingt ans, en effet, le terme de “mosaïque” n’aurait pas semblé adéquat, pour des raisons d’ordre strictement démographique : si la multiplicité des groupes était déjà notable, c’était dans le cadre d’une évidente opposition entre une très forte majorité créole et une série de minorités. À l’époque, les Créoles constituaient en effet quelque 70 % de la population vivant en Guyane. Actuellement, ils en représentent à peine 30 %. Néanmoins entre-temps, la décentralisation leur a donné un pouvoir qui, précédemment, appartenait à la minorité métropolitaine. Pour être bref, on pourrait dire, à l’aide d’une terminologie un peu vieillie, que les Créoles sont passés de l’état de majorité dominée à celui de minorité dominante. »

7 Quinze ans plus tard, il n’est pas un article traitant des questions de population qui ne reprenne à son compte ce constat : la population créole conserve encore le pouvoir politique local mais a perdu la bataille démographique. Pourtant, même si cette évolution n’est pas contestable, aujourd’hui comme hier, pour les raisons évoquées plus haut, il faut bien souligner qu’aucun dénombrement statistique officiel ne permet d’étayer cette affirmation. Quant aux estimations officielles ou officieuses – il en existe malgré tout –, qu’il s’agisse des Créoles ou de toute autre « minorité », les divergences entre les différents chiffres avancés, généralement élaborés par recoupements divers mais rarement explicités, témoignent d’une fiabilité très discutable.

8 La population de la Guyane est en très rapide augmentation. En effet, bien que l’on puisse considérer que le département reste encore largement sous-peuplé au regard de l’étendue de son territoire, de la très faible densité de sa population (2,7 habitants/km2), des difficultés rencontrées par le passé pour y asseoir quelques foyers de peuplement pérennes et de l’étroitesse de son marché intérieur, la vigueur des indicateurs démographiques des trois dernières décennies pose de sérieux problèmes d’accès à l’emploi et au logement comme aux infrastructures de santé et d’éducation. À la différence de la métropole où le rôle de l’immigration dans le relatif dynamisme démographique reste minime [Héran, 2007], il n’est nul besoin de s’entourer de précautions oratoires pour constater qu’en Guyane, par la combinaison d’une immigration importante, d’une forte natalité qui lui est pour partie associée et d’une faible mortalité – elle-même liée à l’extrême jeunesse de sa population –, le taux d’accroissement de la population guyanaise atteint des sommets.

9 Pourtant, malgré cette vitalité démographique, les quelque 230 441 habitants recensés au 1er janvier 2010 ne constituent pas des effectifs de population suffisants pour que soit réellement crédible l’hypothèse d’un développement endogène moins dépendant de la métropole. Mais dans le même temps, au regard des pays ou des régions avec lesquels elle partage ses frontières (Suriname, Amazonie brésilienne), la Guyane fait figure de territoire privilégié par bien des aspects (niveau de salaire, santé, éducation, filets sociaux, etc.). Ainsi, alors même que son économie souffre de lourds handicaps, le département attire de nombreux migrants ; au point de menacer les fragiles équilibres internes de la société.

10 L’analyse des principales caractéristiques démographiques de la Guyane révèle à quel point l’évolution et la structure de la population sont liées à l’immigration. Pourtant, derrière leur apparente rigueur, certaines catégories statistiques, sans grand rapport avec le statut réel des immigrants, rendent plus que jamais insaisissable ce que pourrait être la « guyanité » revendiquée par certains.

La population en Guyane : le rôle majeur de l’immigration

11 En première analyse, les statistiques sociodémographiques agrégées au niveau du département de la Guyane sont abondantes et permettent de brosser une image précise de ce territoire sur des aspects aussi essentiels que la croissance démographique, la structure par âge, l’immigration, l’emploi, le chômage, l’habitat et d’autres variables du même ordre. Ces données sont d’ailleurs régulièrement exploitées, interprétées et rendues accessibles au public, soit à travers les diverses publications de l’Insee, soit par l’analyse qu’en font les chercheurs [Piantoni, 2009]. Du fait même de l’existence de ces travaux, on ne fera ici qu’en rappeler les principaux éléments à retenir afin surtout d’étayer et d’expliciter les nombreuses difficultés auxquelles on se heurte pour caractériser et qualifier de manière précise la réalité de l’immigration.

Évolution de la population [2]

12 La Guyane comptait seulement 27 900 habitants en 1954, et 33 505 en 1961. En 2010, la population recensée s’élevait à 230 441 personnes et, si les tendances actuelles se poursuivent, elle pourrait presque doubler d’ici 2030 avec 424 000 habitants [Insee, 2013]. En hypothèse moyenne, elle en comptera 574 000 en 2040 [Iedom, 2010].

13 La Guyane a connu un taux d’accroissement démographique de 3,95 % par an entre 1999 et 2006, du fait de deux facteurs. D’une part un accroissement naturel élevé dû à un nombre de naissances largement supérieur au nombre de décès ; de l’autre un solde migratoire également positif. L’accroissement naturel (2,62 % par an) a permis un gain net de 4 100 habitants supplémentaires en 1999 et de près de 5 200 en 2006. Parallèlement, la Guyane recevait 2 500 migrants supplémentaires en 1999 et 2 600 en 2006. En prolongeant ces chiffres, la Guyane gagnait en 2010 près de 10 000 habitants supplémentaires chaque année (6 300 par croît naturel et 3 200 par immigration).

14 Toujours par projection de ces données, il est très probable que la barre symbolique des 250 000 habitants a été franchie en 2013. La participation de l’immigration dans cette évolution reste importante à tel point que la perspective d’une population de la Guyane majoritairement d’origine étrangère devient envisageable au cours de la décennie 2020-2030. Face à cette éventualité, on pourrait imaginer que les autorités assouplissent les exigences relatives à l’acquisition de la nationalité française puisque cela aurait pour effet mécanique de diminuer la proportion de population étrangère. Or nous verrons ci-dessous qu’à l’évidence la distinction entre « Français » et « étrangers » ne recouvre pas la même réalité selon qu’il s’agit de papiers d’identité ou de statistiques démographiques.

Structure de la population guyanaise

15 Le sexe ratio comme la pyramide des âges d’une population à une date donnée représentent la résultante de comportements démographiques passés qui, parfois, annulent ou compensent tel ou tel phénomène. Le taux de croissance naturelle, en baisse ou en hausse, dans tel groupe particulier peut être compensé par un mouvement inverse dans tel autre et le départ d’une certaine catégorie de personnes peut être compensé par l’arrivée de telle autre. Ainsi apparaît la situation en Guyane où le portrait que l’on peut dresser de la démographie du territoire résulte d’héritages complexes et enchevêtrés.

16 Dans une étude récente, des démographes de l’Institut national d’études démographiques (Ined) notaient à propos de la population des quatre départements d’outre-mer (DOM) :

17

« le rétrécissement observé entre 20 et 34 ans s’explique par les jeunes natifs vivant à l’étranger pour une faible part, mais surtout par l’évolution démographique passée. En effet, dans les DOM, les naissances ont atteint des niveaux records entre les années 1950 et le début des années 1970. Les effectifs des générations nées au cours de cette période, aujourd’hui âgées d’environ 35 à 55 ans, ont été très importants et, en dépit d’un recul de la fécondité, leurs enfants sont également nombreux. Plus qu’un “creux”, il s’agit en réalité d’une “double bosse”. »
[Temporal, Marie, 2011]

18 Dans le cas particulier de la Guyane, cette analyse mérite d’être nuancée. En effet, si la pyramide des âges doit bien sûr être interprétée en fonction de la natalité passée, la diversité des flux migratoires en complexifie singulièrement la compréhension. On remarquera tout d’abord que le « creux » observé concerne les classes d’âge comprises entre 15 et 34 ans en 2010 (figure 1).

Figure 1

Distribution par classes d’âges de la population guyanaise en 2010 (en effectifs)

Figure 1

Distribution par classes d’âges de la population guyanaise en 2010 (en effectifs)

Sources : Insee, 2010.

19 De ce fait, si « double bosse » il y a, celle-ci doit être interprétée au regard d’un taux d’accroissement (3,5 % en 2010) qui, en Guyane, reste très élevé tant du fait de la forte natalité que du rôle joué par l’immigration. Les deux phénomènes sont d’ailleurs largement liés puisque plus d’une naissance sur deux est le fait d’une femme étrangère (tableau 1) [3].

Tableau 1

Nombre de naissances entre 2004 et 2009

Tableau 1
Nationalité de la mère 2004 2005 2006 2007 2008 2009 française 2 204 2 502 2 680 2 854 dm 2 927 étrangère 3 168 3 559 3 599 3 615 dm 3 368 Total 5 372 6 061 6 279 6 469 dm 6 295

Nombre de naissances entre 2004 et 2009

Dm : données manquantes.
Sources : statistiques d’état civil, Insee.

20 Mais la distribution selon les classes d’âges livre d’autres enseignements. En 2010, le nombre plus faible d’hommes que de femmes entre 20 et 39 ans laisse deviner le rôle majeur joué par les mouvements migratoires, lequel peut être interprété de plusieurs manières. Soit il existe un courant d’émigration spécifique au départ de la Guyane plus important pour les hommes que pour les femmes ; soit, à l’inverse, une immigration plus importante dans le département a lieu pour les femmes que pour les hommes ; soit enfin des mouvements d’immigration et d’émigration plus complexes se combinent entre eux.

Émigration et immigration en Guyane

21 L’immigration étrangère en Guyane est un phénomène si massif que les conséquences des deux mouvements opposés d’émigration des Guyanais en métropole et d’immigration des métropolitains en Guyane sont largement escamotées. On traitera brièvement ces deux aspects avant d’aborder l’immigration d’origine étrangère.

22 S’agissant de l’attraction exercée par la métropole sur les domiens, les enquêtes de Franck Temporal et Claude-Valentin Marie conduisent à estimer qu’entre 27 000 et 30 000 personnes nées en Guyane résident en métropole en 2007. Parmi la population en âge de travailler (15 à 64 ans), on compterait un quart des natifs de Guyane en métropole, soit environ 22 000 personnes. L’importance de cette population est particulièrement élevée pour les classes d’âges comprises entre 18 et 34 ans qui représentent approximativement le tiers des effectifs, soit entre 9 000 et 10 000 personnes [Temporal, Marie, 2011]. Ainsi l’explication du « creux » observé dans certaines classes d’âges pourrait s’expliquer par le départ d’une partie de ses effectifs, notamment dans les générations de 20 à 34 ans. Celle-ci concernerait-elle davantage les hommes que les femmes, et serait-elle un phénomène suffisamment circonscrit dans le temps pour devenir visible dans la pyramide des âges ? Seules des études plus approfondies permettraient de trancher.

23 La même observation vaut pour la présence des métropolitains, ou « métros », séjournant quelques années en Guyane. Selon les chiffres de l’Insee du recensement de 1999, ceux-ci représentaient environ 12 % de la population totale [Thurmes, 2006]. On notera que ce pourcentage est régulièrement repris dans les publications officielles comme dans les travaux académiques sans que l’on soit assuré qu’ils sont encore conformes à la réalité d’aujourd’hui.

Le rôle de l’immigration dans l’évolution de la population

24 En 2009, sur 224 468 habitants recensés, la Guyane comptait alors 142 539 Français et 81 929 étrangers. Par rapport aux recensements précédents, ces chiffres semblent témoigner d’une nette évolution puisque le taux d’étrangers passe de 29 % en 1980 à 36 %en 2009. À l’inverse, concernant la catégorie des « immigrés », si leur nombre ne cesse d’augmenter en valeur absolue, il décroît en revanche de manière sensible en pourcentage puisque ces derniers représentaient 44 % de la population en 1980 contre 26 % en 1999 et 29 % en 2009.

25 Comme on le voit (tableau 2), en fonction de la catégorie employée (étrangers ou immigrés) et des chiffres utilisés (valeurs absolues ou relatives), la problématique de l’immigration en Guyane peut être présentée sous un jour très différent. Dans ces conditions, on mesure l’importance d’une compréhension précise des définitions et des méthodes de dénombrement employées par l’Insee. Nous reviendrons plus loin sur cet aspect.

Tableau 2

Étrangers et immigrés

Tableau 2
1980 1999 2009 En nombre d’habitants Français 80 802 110 214 142 539 Étrangers 34 002 46 576 81 929 Total général 114 804 156 790 224 468 Immigrés 50 822 41 649 66 699 Non immigrés 63 982 115 141 157 770 Total général 114 804 156 790 224 468 En pourcentages Français 70,38 70,29 63,50 Étrangers 29,62 29,71 36,50 Total 100,00 100 100 Immigrés 44,27 26,56 29,71 Non immigrés 55,73 73,44 70,29 Total 100,00 100 100

Étrangers et immigrés

Sources : Insee, 2009-2012.

26 En termes de nationalités présentes sur le sol guyanais, les chiffres de 2007 s’inscrivent dans la continuité des recensements précédents (tableau 3). Les Surinamais, les Haïtiens et les Brésiliens constituent les trois principales nationalités – près de 90 % du total des étrangers. L’historique de ces mouvements migratoires, associés en particulier à la construction du centre spatial de Kourou à partir des années 1960 ou à la guerre civile au Suriname dans les années 1980, est bien documenté [Piantoni, 2009].

Tableau 3

Répartition de la population par nationalité et par sexe au 1er janvier 2007

Tableau 3
Hommes Femmes Total en % Français 65 533 65 972 131 505 61,7 Français de naissance 60 089 59 444 119 533 56,1 Français par acquisition 5 444 6 528 11 972 5,6 Étrangers 40 065 41 460 81 524 38,3 Surinamais 15 557 16 017 31 575 14,8 Haïtiens 9 462 11 486 20 948 9,8 Brésiliens 10 223 9 035 19 258 9,0 Guyaniens 1 952 1 955 3 907 1,8 Chinois 701 653 1 354 0,6 Dominiquais 211 567 778 0,4 Péruviens 315 267 582 0,3 Autres étrangers de l’Union européenne 513 334 847 0,4 Autres étrangers d’Amérique 480 636 1 115 0,5 Autres 651 510 1 160 0,5 Total 105 598 107 431 213 029 100,0

Répartition de la population par nationalité et par sexe au 1er janvier 2007

Sources : Insee, recensement 2007, exploitation principale.

27 Sur le plan de la répartition géographique, à l’exception notable des activités d’orpaillage, les étrangers se trouvent là où se localise la population guyanaise. Ainsi, les sept communes les plus peuplées de Guyane [4] regroupent près de 85 % de la population étrangère. On notera également que pour un certain nombre de communes de l’intérieur, la proportion d’étrangers dépasse les 50 %. Tel est le cas pour Saint-Georges, Grand-Santi, Saint-Elie, ou Papaïchton. Mais il s’agit souvent de petits effectifs ou de situations particulières (proximité de la frontière, exploitation aurifère).

28 Pour conclure sur la structure de la population résidant en Guyane, l’analyse des différents profils par classes d’âges relative aux trois premières nationalités étrangères présentes dans le département révèle des spécificités propres à chacune (figure 2). Pour la population originaire du Suriname, la distribution proche de la « normale » est significative d’un pays en voie de développement marqué par une forte natalité. Mais, dans la mesure où cette dernière est tout aussi importante pour les populations brésiliennes et haïtiennes, le « creux » observé chez les plus jeunes (0 et 24 ans) semble plutôt s’expliquer par des dynamiques migratoires spécifiques. Pour les Brésiliens en particulier, on sait en effet que la construction dans les années 1960 du centre spatial à Kourou a favorisé à cette époque une importante immigration. Quant à la distribution de la population haïtienne, le creux observé dans la génération des 20-29 ans pourrait être interprété comme une baisse du flux de migrants arrivant en Guyane. Pour autant, et toutes nationalités confondues, une autre explication n’est pas à négliger. Nous verrons plus loin qu’elle tient aussi à la manière dont l’Insee distingue dans ces populations les étrangers des « Français par acquisition ».

Figure 2

Distribution par classes d’âges des trois principales populations étrangères (2007)

Figure 2

Distribution par classes d’âges des trois principales populations étrangères (2007)

Sources : Insee, recensement 2007, exploitation principale.

La population « clandestine » : entre fantasme et estimations confidentielles, quelle réalité ?

29 Qu’elles soient détaillées ou non, les statistiques démographiques souffrent d’un réel déficit de crédibilité du fait de la présence importante de la population dite « clandestine ». Par définition, les chiffres précis concernant cette dernière sont mal connus et l’on ignore comment et dans quelle proportion elle est effectivement prise en compte dans les « redressements » opérés par l’Insee avant la publication officielle des recensements de population. D’un côté, des estimations larges circulent et sont reprises à l’envi sans que l’on en connaisse précisément la source et la date. De l’autre, on sait que la préfecture de Cayenne produit des estimations que l’on pourrait penser plus fiables dès lors que sont discrètement mis à contribution les nombreux services de l’État ayant pour mission de confronter leurs données (Insee, fichiers de permis de séjour, services sociaux, santé, éducation, poste, fisc, etc. [5]). Malgré tout, la réalité reste difficile à percevoir [Aubusson de Carvalay, 2008].

30 Selon un rapport du Sénat [2012], l’immigration clandestine

31

« est évaluée, selon les administrations centrales, à partir d’estimations statistiques relatives au nombre des interpellations des étrangers sur le territoire national, la scolarisation des enfants ou encore l’occupation des logements. Ainsi, on estime le nombre d’immigrés clandestins […] entre 30 000 et 60 000 en Guyane, voire 80 000, soit entre le quart et le tiers de la population, dont 3 500 à 5 000 travailleraient en forêt sur les sites d’orpaillage clandestins. »

32 On le voit, la marge d’incertitude reste large, mais on peut se demander s’il n’y a pas là une forme de surenchère relevant davantage du propos politique de circonstance. En effet, la comparaison entre le nombre d’étrangers recensés et les titres de séjour délivrés par la préfecture invite à la prudence. Ainsi, d’après le ministère de l’Intérieur cité par le Groupe d’information et de soutien des immigrés [Gisti, 2006], 42 584 étrangers titulaires d’un titre de séjour résidaient en Guyane début 2006 – dont 21 771 mineurs. Comparés aux 77 704 étrangers recensés à la même date [6], il y aurait donc eu à l’époque 35 120 personnes en situation irrégulière ; un chiffre situé dans la fourchette (très) basse des estimations avancées par le rapport du Sénat cité plus haut. Pour les 20 813 personnes majeures en situation régulière, nous disposons de la répartition selon le titre de séjour et la nationalité (tableau 4).

Tableau 4

Ensemble des étrangers majeurs non ressortissants de l’Union européenne autorisés au séjour

Tableau 4
Carte de séjour temporaire ou carte de résident (1 ou 10 ans) au 1er janvier 2006 18 380 dont Haïtiens 5 910 dont Surinamiens 4 030 dont Brésiliens 4 328 dont Guyaniens 1 422 dont Chinois 767 autres nationalités 1 923 Autorisation provisoire de séjour ou récépissé 2 433 dont Haïtiens 597 dont Surinamiens 876 dont Brésiliens 475 dont Guyaniens 181 dont Chinois 62 autres nationalités 242 Total général 20 813

Ensemble des étrangers majeurs non ressortissants de l’Union européenne autorisés au séjour

Sources : Gisti [2006] d’après le ministère de l’Intérieur.

33 Ces données permettent-elles de savoir si certaines populations sont davantage concernées par la difficulté d’accès à un titre de séjour et/ou par une plus ou moins grande pratique du séjour en situation irrégulière ? Une réponse précise est difficile à apporter puisqu’il faut ajouter les enfants mineurs dépendants de personnes pourvues d’un titre de séjour tandis que la structure par âge varie selon les nationalités considérées. Néanmoins, en rapportant les titres de séjour aux données censitaires, toutes nationalités et toutes classes d’âge confondues, un étranger sur deux résidant en Guyane serait en situation légale. Mais, rapporté aux trois principales origines des immigrants, ce rapport serait de 1 sur 3, pour les Surinamais, de 1 sur 2 pour les Brésiliens et de 2 sur 3 pour les Haïtiens.

34 Ajoutons pour conclure sur ce sujet que la police de l’air et des frontières (PAF) procède à des expulsions massives du territoire. Coûteuses, juridiquement complexes et parfois conduites de manière expéditive, celles-ci visent en priorité les Brésiliens et les Surinamais. Selon le rapport du Sénat de 2012 :

35

« le taux d’exécution des arrêtés de reconduite à la frontière est élevé et supérieur à 97 % pour les nationalités brésilienne et surinamaise. En 2010, l’État avait fixé un objectif de 8 000 reconduites à la frontière, niveau qui a été dépassé avec 9 458 reconduites, représentant 11,27 % de plus [7]. »

36 Mais, aussi élevé soit-il, le nombre des expulsions ne peut avoir d’effet significatif sur les estimations chiffrées de la population en situation irrégulière. En effet, d’une part ces expulsions sont quotidiennes, d’autre part elles sont largement compensées par le retour quasi immédiat des personnes expulsées. Dès lors, on peut s’interroger sur le sens de cette politique. Deux hypothèses semblent pouvoir être avancées. La première est évidemment politique : il s’agit de montrer à la population guyanaise et à ses élus que l’État est actif et prend à bras-le-corps la question du contrôle des flux migratoires. La seconde hypothèse est que cette politique a pour effet de maintenir une grande partie de la population immigrée dans une situation d’insécurité, ce qui ne peut que retarder voire empêcher les demandes de permis de séjour, de travail ou de naturalisation.

Étranger, immigré, français… des catégories précises, une réalité floue

37 En Guyane comme ailleurs, la réalité des mouvements migratoires se laisse difficilement appréhender par les seules statistiques construites sur des catégories fondées sur la nationalité ou le lieu de naissance. En effet, celles-ci rendent peu compte de la volatilité des flux de population et, par conséquent, de la distinction entre immigration et migrations de transit vers d’autres destinations ; ou, comme c’est le cas pour une bonne partie de la population brésilienne, d’une pratique de double résidence justifiant de nombreux allers-retours entre la Guyane et le Brésil. Mais ce n’est pas le seul motif expliquant le caractère insaisissable de la réalité.

38 Selon la définition de l’Insee, est comptabilisée comme étrangère toute personne résidant en France mais n’ayant pas la nationalité française. Cette définition ne prend aucunement en considération le caractère légal ou non de la résidence sur le territoire français. Dans le cadre des recensements de population, il n’est en effet nullement demandé aux habitants leurs titres de séjour – si tel était le cas, les soupçons qui pèsent sur la fiabilité des chiffres et le sous-enregistrement d’une partie de la population s’en trouveraient évidemment accrus.

39 Si la population totale résulte de la somme des « Français » et des « étrangers », les enfants nés en France de parents étrangers posent une difficulté particulière. Ils ont certes la perspective de pouvoir obtenir la nationalité française mais ne sont comptabilisés comme français que sous certaines conditions d’âge et de durée du séjour sur le territoire national. Or, selon l’Insee, les mineurs nés en France de parents étrangers se déclaraient ou étaient déclarés par leurs parents comme « français de naissance » avant même que la procédure de naturalisation ait été conduite à son terme. Cela a conduit l’Insee à revoir les catégories permettant de comptabiliser les étrangers. Depuis 2004, dans le cadre du nouveau recensement de population, ces « déclarations erronées » font l’objet du « redressement statistique » suivant :

  • les jeunes de moins de 13 ans nés en France sont reclassés en « étranger » puisqu’ils n’ont pas encore accès à la nationalité française ;
  • les jeunes de 13 à 17 ans sont reclassés en « français par acquisition ».

40 Dans ses notes techniques, l’Insee précise que cette correction a pour effet au niveau national d’augmenter le nombre total d’étrangers et que ceci doit évidemment être pris en compte dans le cadre de comparaisons avec le recensement de 1999 et ceux antérieurs. L’institut de la statistique omet cependant de préciser que ces comparaisons sont d’autant plus difficiles à effectuer que les données accessibles sont agrégées par classes d’âge quinquennales ce qui rend quelque peu problématique l’estimation chiffrée des deux groupes de moins de 13 ans et de 13 à 17 ans. Enfin on notera que cette correction a pour effet d’introduire au sein d’une même famille une distinction entre Français et étrangers qui – aussi justifiée qu’elle puisse être sur le plan statistique – ne correspond pas nécessairement à la réalité des procédures d’acquisition de la nationalité française. En Guyane, en termes d’effectifs ainsi recensés, le nombre d’étrangers est passé de 46 576 en 1999 (29,7 % de la population) à 81 929 personnes en 2009 (36,5 % de la population). Mais ce dernier chiffre inclut désormais les enfants de moins de 13 ans, que ceux-ci soient nés à l’étranger ou en Guyane.

Les immigrés

41 Selon la définition adoptée par le Haut Conseil à l’intégration :

« un immigré est une personne née étrangère à l’étranger et résidant en France, et ce quelle que soit sa nationalité (étranger ou français par acquisition). Les populations étrangère et immigrée ne se confondent donc pas. Tous les immigrés ne sont pas des étrangers et ces derniers ne sont comptabilisés comme immigrés que s’ils sont nés étrangers à l’étranger. Les étrangers nés en France et recensés comme tels ne sont donc pas des immigrés [alors que] la qualité d’immigré est permanente : un individu continue à appartenir à la population immigrée même s’il devient français par acquisition. C’est le pays de naissance, et non la nationalité à la naissance, qui définit l’origine géographique d’un immigré. »
Dans le département de Guyane et jusqu’en 1980, le nombre d’immigrés était supérieur au nombre d’étrangers ; ce qui n’est plus le cas par la suite (tableau 5). En 2009, 66 699 immigrés étaient recensés, soit 29,7 % de la population totale. Parmi eux, 8 994 personnes seraient nées à l’étranger puis devenus français par acquisition. Rappelons que cette catégorie regroupe les mineurs de 13 à 17 ans ainsi que les adultes ayant acquis la nationalité par mariage ou à leur majorité. Mais comme on l’a vu, c’est désormais le nombre d’étrangers nés en France qui constitue le phénomène le plus significatif de la problématique migratoire en Guyane. Pour tenter de préciser davantage cet aspect, deux variables doivent être prises en compte : l’évolution du nombre de naturalisations et la part des enfants de moins de 13 ans nés en Guyane de parents étrangers.

Tableau 5

Français, étrangers et immigrés : évolution entre 1999 et 2009*

Tableau 5
1999 2009 Français nés en France 100 653 126 506 nés à l’étranger 3 217 2 988 Français par acquisition nés en France 1 239 4 051 nés à l’étranger* 5 105 8 994 Total Français 110 214 142 539 Étrangers nés à l’étranger* 36 544 57 705 nés en France 10 032 24 224 Total étrangers 46 576 81 929 Total général 156 790 224 468

Français, étrangers et immigrés : évolution entre 1999 et 2009*

* : population immigrée.
Sources : pour 1999, Insee [2006] ; pour 2009, Insee [2012].

Les étrangers de moins de 13 ans

42 Parmi les 81 929 étrangers recensés en Guyane en 2009, 24 224 d’entre eux – quel que soit leur âge à cette date – seraient nés en France et donc, a priori, en Guyane (tableau 5). Ce chiffre pose pourtant problème si on le rapporte à la structure par âge.

43 En effet, la population totale des 0-14 ans s’élevant à 81 015 enfants en 2010, le groupe des enfants de moins de 13 ans peut de ce fait être estimé à 75 000 enfants. Or, sachant que plus d’une naissance sur deux est le fait d’une femme étrangère et ce, depuis au moins une dizaine d’années (voir supra), on peut estimer qu’environ 35 000 enfants de moins de 13 ans nés en Guyane de parents étrangers seraient en mesure d’acquérir la nationalité française d’ici 2023.

44 À quelle(s) cause(s) attribuer cette différence d’au moins 10 000 ou 15 000 individus pour le seul groupe des moins de 13 ans ? À leur retour dans leur pays d’origine après leur naissance ? Au sous-recensement de la population en situation irrégulière ? À la plus forte mortalité infantile effectivement constatée chez les immigrés ? À tous ces motifs à la fois ?

Les « Français par acquisition » en Guyane, une fiction statistique ?

45 Le nombre de personnes recensées comme étant « françaises par acquisition » était de 6 344 personnes en 1999 contre 11 972 en 2007 et 13 045 en 2009. Cet accroissement du nombre de Français par acquisition, qui a pour effet mécanique de diminuer d’autant la proportion d’étrangers présents sur le territoire, correspond pour une bonne part aux enfants de 14 à 17 ans « reclassés » par l’Insee [8]. On peut par ailleurs émettre l’hypothèse que le nombre plus élevé de femmes que d’hommes accédant au statut de Français par acquisition (6 528 femmes contre 5 444 hommes en 2007) est pour partie à attribuer aux mariages de femmes étrangères avec des Français.

46 Sur un total de 126 506 Français, 13 045 personnes présentes en Guyane et nées de parents étrangers seraient devenues « françaises par acquisition ». Parmi ces dernières, seulement 4 051 sont nées en Guyane, les autres étant nées à l’étranger. Eu égard à la vigueur de la natalité chez les migrants et compte tenu d’une immigration continue depuis au moins 40 ans, le nombre d’acquisitions de la nationalité du fait d’une naissance en France est très inférieur à ce que l’on pourrait attendre. Mais il faut se demander également si cette nouvelle ventilation de la population entre « Français » et « étrangers » ne relève pas de l’action purement comptable masquant une autre réalité. L’analyse des données disponibles sur l’acquisition avérée de la nationalité française ne laisse guère de place au doute.

Des naturalisations au compte-gouttes

47 L’acquisition de la nationalité française s’opère dans des conditions fixées par la loi. En d’autres termes, il n’appartient pas à l’Insee d’accorder la nationalité française et la distinction longuement exposée ci-dessus entre étrangers et Français par acquisition ne traduit pas nécessairement la réalité.

48 On distingue deux modes d’acquisition de la nationalité française. La première résulte d’une décision de l’autorité publique. Cette naturalisation n’est pas un droit, contrairement à la déclaration (voir infra). Elle est soumise à la décision discrétionnaire de l’administration qui peut la refuser même si les conditions sont réunies. Le second mode est la déclaration, soit à la suite d’événements personnels – essentiellement en raison du mariage avec un(e) ressortissant(e) français(e) –, soit par acquisition anticipée pour les jeunes étrangers nés et résidant en France.

49 Dans le cas de la Guyane, les conditions requises relèvent du parcours impossible. C’est ce qu’observe une étude du Gisti [2006] et que confirme le rapport présenté par Patrick Mennucci [2012] à l’Assemblée nationale, lequel intitule d’ailleurs l’un de ses chapitres : « un durcissement de l’accès à la nationalité française opéré dans l’opacité la plus complète ». Au niveau national, avec quelque 80 000 à 90 000 décisions rendues chaque année, l’analyse du taux d’accès à la nationalité française montre clairement un durcissement drastique de la politique française au cours de ces dernières années. Entre 2005 et 2012, le taux d’évolution des décisions défavorables est ainsi passé de 20,9 % à 55,3 % [Menucci, 2012]. Pour ce qui concerne la Guyane, si le nombre de décisions rendues n’est pas précisé dans ce rapport, l’évolution est encore plus marquée puisqu’entre 2007 et 2012, le taux de décisions défavorables passe de 33 % en 2007 à 67 % en 2012 [ibid.].

50 Dans ce même rapport sont évoqués les différents obstacles à l’obtention de la nationalité. Parmi ceux-ci, la décentralisation des décisions au niveau des préfectures associée à « l’obligation de résultats » à laquelle ont été soumises les diverses administrations concernées a eu pour effet de multiplier les motifs de refus, légaux ou non. L’impossibilité d’apporter la preuve d’un séjour régulier d’au moins cinq ans, la démonstration d’une scolarisation effective, les factures d’eau ou d’électricité, les attestations de non-imposition impossibles à obtenir et jusqu’à la crainte d’une arrestation par la PAF dans les services préfectoraux, sont quelques-uns des motifs qui, en Guyane plus encore qu’en métropole, découragent efficacement les candidats à l’obtention de la nationalité. « Outre-mer, autre droit » ? Le constat dressé par le Gisti [1999] il y a plus de quinze ans reste plus que jamais d’actualité et en définitive, si l’on s’interroge encore sur le sens des expulsions à répétition, on peut raisonnablement penser que ces dernières constituent un moyen efficace d’interdire ou de freiner l’accès légal à la nationalité française.

51 La préfecture de Guyane se refusant à communiquer sur le sujet, seules quelques statistiques agrégées au niveau national du ministère de l’Intérieur sont accessibles (tableau 6). Entre 1998 et 2012, la moyenne annuelle s’établit à 550 Brésiliens et 2 250 Haïtiens qui ont acquis la nationalité française dans une quelconque partie du territoire. Eu égard au taux de décisions défavorables mentionné plus haut, on devine que bien peu de demandes effectuées en Guyane ont abouti. Et la faiblesse des acquisitions par déclaration anticipée – en 2012, 299 Haïtiens et 19 Brésiliens au niveau national ! – montre sans ambiguïté l’ampleur du hiatus par rapport aux chiffres avancés par l’Insee. Rappelons à cet effet qu’en 2009 l’Institut de la statistique recensait dans le département guyanais 13 045 Français par acquisition – dont 4 051 nés en France – et 24 224 étrangers nés en France. Enfin, notons au passage que les chiffres de naturalisation pour les deux nationalités révèlent des profils sensiblement différents pour l’acquisition de la nationalité par mariage : celle-ci représente entre 40 et 70 % des décisions pour les Brésiliens contre moins de 10 % pour les Haïtiens. À l’inverse, l’acquisition par déclaration anticipée est sensiblement supérieure pour les Haïtiens (de 20 à 30 %) que pour les Brésiliens (le plus souvent, moins de 10 %).

Tableau 6

Évolution de l’acquisition de la nationalité française pour les Brésiliens et Haïtiens entre 1998 et 2012

Tableau 6
Brésiliens 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 par décret 80 89 163 101 109 184 193 179 135 148 243 266 246 318 287 par mariage 269 291 359 306 347 420 449 263 318 348 225 232 284 310 371 Déclaration anticipée (13-17 ans) 0 11 3 40 68 54 0 55 0 0 132 84 47 11 19 Autres motifs 56 12 15 10 9 7 4 6 3 0 5 3 3 1 3 Total 405 403 540 457 533 666 646 503 456 496 605 585 580 640 680 Haïtiens 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 par décret 1 012 1 128 1 338 1 106 1 342 1 920 2 152 1 909 1 847 1 504 1 975 2 079 2 196 1 179 749 par mariage 133 146 132 128 151 179 178 119 188 154 90 98 131 135 120 Déclaration anticipée (13-17 ans) 0 400 417 308 556 614 824 685 1105 0 841 792 432 272 299 Autres motifs 227 37 33 29 33 21 37 22 14 0 16 12 12 41 133 Total 1 372 1 711 1 920 1 571 2 082 2 734 3 191 2 735 3 154 1 658 2 922 2 981 2 771 1 627 1 301

Évolution de l’acquisition de la nationalité française pour les Brésiliens et Haïtiens entre 1998 et 2012

Sources : Menucci [2012].

52 Au terme de cette analyse, on comprend combien la réalité de l’immigration se laisse difficilement appréhender par l’analyse des seules données censitaires. On observe aussi combien de contournements il faut employer (permis de séjour, naturalisations) pour lever une partie du voile d’opacité qui entoure ces données dites « sensibles ». De ce point de vue, en s’accrochant aux chiffres, aussi fastidieux soient-ils, et à ce qu’ils disent ou peuvent dire, on ne pourrait que se féliciter de voir les débats et controverses sur les statistiques ethniques davantage argumentés à partir de situations concrètes comme celle présentée ici. Car dans le cas de la Guyane, cette question se pose d’autant plus que la question des origines et de la « guyanité » fait l’objet de débats qui renvoient au moins autant à une altérité guyanaise (mal) partagée qu’à l’immigration étrangère.

Les minorités en Guyane : de l’assimilation à l’affirmation identitaire

53 L’incertitude statistique n’est pas une spécificité propre aux populations d’origine étrangère. Elle constitue également la toile de fond de la société guyanaise – alors même que l’on en connaît l’étonnante diversité. De fait, comme le soulignent Isabelle Léglise et Bettina Migge [2007, p. 29] :

54

« La Guyane semble en effet imposer au chercheur comme aux différents acteurs engagés sur le terrain, une approche au mieux anthropologique, au pire ethniciste, des relations sociales. Le discours commun guyanais découpe de fait la population présente sur le département en différents groupes aux définitions et frontières éminemment complexes – et mouvantes – mais qui s’imposent à tous comme une évidence. Amérindiens, Créoles, métropolitains, Bushinengés [9], […] constituent dans l’imaginaire collectif autant de “communautés” ou de “groupes ethniques” distincts. »

55 Le recensement des populations selon des critères d’origine étant prohibé, c’est du côté des chercheurs, des institutions locales et/ou des organisations militantes que des estimations chiffrées sont avancées ; avec pour corollaire une bonne part d’incertitude quant à leur fiabilité car elles sont souvent reprises sans précaution faute d’avoir été réactualisées ou sans tenir compte des dynamiques démographiques propres à telle ou telle communauté [Grenand, Grenand, 1979 ; Leclerc, 2012].

56 Faute de pouvoir développer davantage cet aspect, retenons-en l’essentiel. Les différentes communautés guyanaises sont devenues soucieuses de se compter et cette évolution vers une forme d’ethnicisation des rapports sociaux constitue un changement radical observé par plusieurs chercheurs au tournant des années 1990 :

57

« […] avant 1955, les habitants de la Guyane n’avaient pas de problème d’identité. La question ne se posait pas. Les Guyanais se considéraient comme des citoyens français et appartenaient à ce titre à la culture française […]. Cette attitude culturelle remonte à l’origine même de la colonie. Les êtres déracinés qu’étaient les esclaves eurent, pour référence dominante, la civilisation française. Au sortir de l’esclavage, les Créoles imbus de culture française ne concevaient pas qu’ils puissent être d’abord Créoles ou Guyanais. Quant aux Amérindiens et aux Boni [10], les métropolitains, comme les Créoles, leur déniaient tout droit à une quelconque identité : ils étaient alors considérés comme des “sauvages”. »
[Mam-Lam-Fouck, 1992, p. 370]

58 Ainsi, dans le contexte d’une société aussi fortement segmentée, la question posée aujourd’hui est celle de la « guyanité » ou, pour le dire autrement, celle de ce que signifie « être guyanais ». Or cette revendication identitaire constitue une autre ligne de clivage. Pour « les Créoles qui se revendiquent aujourd’hui comme ethnie » [Jolivet, 1997, p. 817], et qui se définissent eux-mêmes comme « les Guyanais » [Jolivet, 1990], la réponse est claire. Mais « la fin de l’idéologie de l’assimilation et la modification du rapport aux autres groupes, Amérindiens et Noirs-marrons en particulier » [ibid.] n’est pas sans risques pour le « vivre ensemble » puisque ce positionnement revient à revendiquer une appartenance exclusive à un territoire pourtant partagé avec d’autres groupes culturels. Ainsi, comme le note Gérard Colomb [1999, p. 2] :

59

« la nouvelle structure démographique de la société guyanaise pose désormais plus que par le passé même récent, la question de la place des peuples qui revendiquent une identité non créole dans la définition d’une nouvelle “guyanité”, définie comme l’expression d’une idée nationale. […] le débat politique régional s’est dès lors, pour une part, déplacé d’une interrogation sur la nature du lien qui rattache la Guyane à la France vers l’examen des rapports que les différentes composantes de la Guyane contemporaine doivent entretenir entre elles. »

Conclusion

60 Quelles que soient les variables analysées (recensements, permis de séjour, naturalisations, etc.), les nombreux obstacles auxquels on se heurte pour caractériser de manière précise la population guyanaise et la part qui revient à l’immigration dans sa composition ne laissent pas d’étonner. Certes, un certain nombre de faits objectifs y contribuent ; la présence massive d’habitants en situation irrégulière en est un premier élément. Les contraintes de confidentialité auxquelles l’Insee est tenu en est un autre. Et le fait de distinguer au sein d’une même famille des personnes étrangères et d’autres qui ne le sont pas par le seul fait de leur âge ne peut que rendre la réalité encore plus insaisissable. Une réalité à laquelle on pourrait ajouter la diversité des histoires migratoires et des structures démographiques (âge, sexe ratio, etc.) selon les nationalités et les origines.

61 Dès lors, se pose la question des raisons et des effets de cette incertitude statistique. D’un côté, la complexité constatée – même à considérer qu’elle soit justifiée par des considérations légales – va de pair avec une présentation quelque peu édulcorée et prudente de la réalité de l’immigration. Certes, celle-ci est un sujet politiquement sensible – notamment en métropole –, mais elle semble pourtant perçue en Guyane comme restant dans des limites globalement acceptables si l’on en juge par le résultat des dernières élections présidentielles [11]. Dans cette perspective, la difficulté de caractériser de manière plus précise la nature de l’immigration en Guyane ne serait jamais que la conséquence locale d’une approche très jacobine de la statistique nationale.

62 Mais d’un autre côté, force est de constater que ce flou statistique est au fond à l’image de la population guyanaise à l’identité composite et aux caractères et origines multiples. Vu sous cet angle, et notamment au niveau des ménages, il n’y aurait alors pas de frontières précises entre étrangers et immigrés pas plus qu’entre immigrés et « Guyanais ». Ici plus qu’ailleurs, les divisions binaires s’estompent ou n’ont guère de sens à mesure que se créent de nouveaux brassages de populations au gré des unions. En témoigne d’ailleurs la forte proportion de couples mixtes, que ceux-ci soient officialisés par des mariages ou non. Au-delà, face à un critère d’autochtonie, discutable dans son principe, c’est évidemment la notion même de « guyanité » que questionne l’immigration.

63 Il n’en reste pas moins que la manière dont est appréhendée la question de l’immigration révèle une ambiguïté fondamentale qui semble être au cœur même du fonctionnement de la société guyanaise. En effet, tout en dénonçant les nombreuses charges que fait peser cette immigration sur les collectivités locales, les « Guyanais » semblent d’autant plus s’accommoder de celle-ci qu’elle est largement employée et rémunérée de manière informelle, échappant ainsi à toute forme de fiscalité [12]. Il en irait sans doute autrement si la régularisation des migrants ouvrait à ces derniers des droits plus étendus. Mais dans l’immédiat, tout semble se passer comme si un « système » s’était installé et que ce dernier convenait autant aux migrants qu’à ceux qui les emploient. On connaît l’importance du secteur informel dans bon nombre de pays dont sont originaires les migrants, au Brésil notamment. Il n’est donc pas surprenant que ce phénomène se soit exporté et diffusé en Guyane. Et ceci expliquant peut-être cela, la faiblesse des mobilisations en faveur des migrants sans papiers, alors que ces dernières sont si fréquentes en métropole, est peut-être le signe supplémentaire d’une situation dont la majorité de la population semble se satisfaire. Faudrait-il en conclure que la relative paix sociale qui prévaut en Guyane en est la contrepartie ?

64 On peut le penser, mais la modestie des effectifs de population concernés, la faiblesse structurelle de l’économie locale et l’étroitesse de son marché, qui ont pour corollaire une capacité d’emploi formel ou informel au bout du compte très limitée, rendent peu crédible la thèse d’une immigration qui deviendrait pour autant incontrôlable. Les étrangers connaissent d’autant mieux le contexte particulier de la Guyane que cette immigration fonctionne très largement par réseaux de connaissances. Les scénarios d’un « envahissement » restent en définitive assez peu probables. Ajoutons à cela la très forte dynamique de développement à l’œuvre au Brésil et notamment dans les États d’Amazonie (Para, Macapa) qui pourrait à court terme modifier le sens des flux migratoires. En Europe, l’inversion brutale des dynamiques migratoires dans des pays comme le Portugal ou l’Espagne depuis la crise de 2008 montre l’étonnante réactivité des migrants face à l’évolution de la conjoncture économique ; rien n’est donc écrit. C’est pourquoi le point de passage obligé de toute politique publique cohérente de développement est de se donner les moyens de comprendre la réalité du contexte. Dans toute sa complexité.

Notes

  • [*]
    Géographe, directeur de recherche, Laboratoire population environnement développement (LPED, UMR 151), université d’Aix-Marseille, Institut de recherche pour le développement (IRD).
  • [1]
    Ce travail s’est inscrit dans le cadre des recherches conduites au sein du programme Les Suds aujourd’hui : dynamiques des circulations migratoires et mobilités transfrontalières entre Guyane, Brésil, Suriname et Haïti (2008-2011) de l’Agence nationale de la recherche (ANR).
  • [2]
    Le site de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) donne accès à de nombreuses données (recensements de population, données d’état civil, rapports divers, etc.). Pour la période la plus récente et selon les variables étudiées (accroissement naturel, population étrangère, nationalités, etc.), il est cependant très rare de pouvoir croiser et confronter l’ensemble de cette information accessible pour une seule et même année (2010, par exemple).
  • [3]
    « Plus d’une naissance sur deux est issue d’une mère de nationalité étrangère (contre 13 % seulement en métropole) ; mais pour la première fois en 2009, le nombre total de naissances issues de mères étrangères est en diminution par rapport aux années antérieures. Les trois principales nationalités, qui représentent plus 90 % des naissances “étrangères” sont le Suriname, Haïti et le Brésil. » [Insee, 2013]
  • [4]
    L’île de Cayenne (regroupant Cayenne, Remire-Montjoly, Matoury), Macouria, Kourou, Saint-Laurent du Maroni et Mana.
  • [5]
    Information délivrée par l’Insee à Cayenne. L’institution soutient par ailleurs que les recensements sont censés dénombrer la totalité de la population, que celle-ci soit en situation régulière ou non.
  • [6]
    On reprend ici le nombre d’étrangers en 2006 – et non pas celui cité dans le tableau 3 – car c’est la seule source identifiée permettant d’appréhender de manière chiffrée – à partir des titres de séjour – la question de l’immigration clandestine (voire aussi note 2).
  • [7]
    En 2008, selon une déclaration du ministère des Affaires étrangères auprès du consulat du Brésil, 674 Brésiliens ont été expulsés de métropole et 4 329 de Guyane. Source : http://brasilidade.canalblog.com/archives/2009/11/01/15642194.html
  • [8]
    L’acquisition de la nationalité française est exigeante en termes de conditions à remplir. Pour l’acquisition par déclaration : délai de quatre ou cinq ans après la date du mariage, preuve d’une « communauté de vie affective et matérielle » ininterrompue, séjour régulier en France et maîtrise suffisante de la langue française. Pour l’obtention de la nationalité par décret à la majorité : cinq ans de résidence en situation régulière en France avant le dépôt de la demande ; connaissance de la langue française ; des ressources propres ; ne pas avoir fait l’objet d’un « arrêté d’expulsion ou d’interdiction du territoire non entièrement exécuté ». Source : préfecture de Guyane.
  • [9]
    Les Bushinengués, sont des Noirs-marrons, descendants d’esclaves africains évadés.
  • [10]
    Les Bonis sont également des Noirs-marrons, descendants d’esclaves africains évadés.
  • [11]
    Aux élections présidentielles de 2012, avec un taux de participation de 51 % au premier tour, François Hollande est arrivé en tête avec 42,6 %. Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen ont respectivement recueilli 27,1 % et 10,4 % des suffrages. Au second tour, François Hollande l’a emporté avec 62 % des voix et un taux de participation de 57,2 %. En 2007, Nicolas Sarkozy l’avait emporté au second tour face à Ségolène Royal avec un score de 53,08 % des voix. Au premier tour, Jean-Marie Le Pen avait recueilli 5,5 % des suffrages. Contrairement à la métropole, les dernières élections municipales de 2014 n’ont pas provoqué de vote massif en faveur du Front national.
  • [12]
    Les statistiques et les enquêtes de l’Insee font de la population étrangère ou immigrée une catégorie particulièrement touchée par le chômage. Mais au-delà de l’aspect déclaratif, les migrants travaillent en Guyane dans divers secteurs où ils sont majoritaires tels que les services (domestiques, jardiniers, etc.), la construction ou dans diverses et nombreuses autres activités informelles (habillement, commerces de bouche, etc.).
Français

Le département français de la Guyane se caractérise par une forte immigration dont le poids joue un rôle considérable dans l’évolution et la structure de la population. Mais les statistiques accessibles sur le sujet sont peu nombreuses, très formatées, et se révèlent à l’analyse difficiles à croiser et à interpréter. Plus grave, elles sont souvent peu fiables du fait de l’importance de la population « clandestine » mais aussi de la manière dont l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) opère une distinction entre populations française et étrangère. Comme en écho à la perception floue sinon tronquée de la question migratoire, la population guyanaise est elle-même fortement segmentée par l’importante diversité ethnique et culturelle (Amérindiens, Noirs-marrons, Créoles, etc.). Ce « flou démographique » est au fond à l’image du caractère composite de la société guyanaise. Mais il en traduit aussi les ambiguïtés dans un contexte où l’immigration constitue la toile de fond des diverses revendications d’autochtonie qui s’expriment et qui interrogent sur l’identité guyanaise, ou ce que d’aucuns nomment encore la « guyanité ». Comprendre comment la mesure des phénomènes migratoires s’en trouve affectée permet de mieux appréhender cette réalité complexe.

Mots-clés

  • minorités
  • étrangers
  • immigrés
  • naturalisation
  • identités
  • statistiques ethniques
  • Guyane

Bibliographie

  • En ligne Aubusson de Carvalay B. [2008], « Les chiffres choisis de l’immigration : les démographes doutent mais les politiques savent », Plein droit, no 77 : www.gisti.org/spip.php?article1252
  • Collomb G. [1999], « Entre ethnicité et national : À propos de la Guyane », Socio-anthropologie, no 6 : http://socio-anthropologie.revues.org/index113.html
  • En ligne Grenand P., Grenand F. [1979], « Les amérindiens de Guyane française aujourd’hui : éléments de compréhension », Journal de la société des américanistes, no 66, p. 361-382.
  • Gisti [1999], « Outre-mer, autre droit », dossier, Plein droit, no 43, 48 p.
  • Gisti [2006], Étrangers en Guyane. Guyane étrangère à son entourage, rapport, Paris, Groupe d’information et de soutien des immigrés, 20 p. : www.gisti.org/IMG/pdf/hc_rapport-etrangers-en-guyane.pdf
  • Héran F. [2007], Le Temps des immigrés. Essai sur le destin de la population française, Paris, La République des idées/Seuil, 112 p.
  • Héran F. [2010], Inégalités et discriminations. Pour un usage critique et responsable de l’outil statistique, rapport, Paris, Comité pour la mesure de la diversité et l’évaluation des discriminations (Comedd), 268 p.
  • Hurpeau B. [2012], Panorama de la population immigrée en Guyane, Pointe-à-Pitre, Insee Antilles-Guyane, 21 p.
  • Iedom [2010], Guyane, rapport annuel 2010, Paris, Institut d’émission des départements d’outermer : www.iedom.fr/IMG/pdf/ra2010_guyane_mod.pdf
  • Insee [2006], Atlas des populations immigrées en Guyane (1999), Paris, Institut national de la statistique et des études économiques, 32 p.
  • Insee [2012], Panorama de la population immigrée en Guyane (2009), Paris, Institut national de la statistique et des études économiques, 21 p.
  • Insee [2013], « La fécondité est le premier moteur de la croissance démographique en Guyane », AntianÉchos, no 27, janvier.
  • Jolivet M.-J. [1990], « Entre autochtones et immigrants : diversité et logique de positions créoles guyanaises », Études créoles, vol. 13, no 2, p. 11-32.
  • En ligne Jolivet M.-J. [1997], « La créolisation en Guyane. Un paradigme pour une anthropologie de la modernité créole », Cahiers d’études africaines, vol. 37, no 148, p. 813-837.
  • Leclerc J. [2012], « Guyane française », L’aménagement linguistique dans le monde, Québec, université de Laval, Chaire pour le développement de la recherche sur la culture d’expression française en Amérique du Nord : http://www.axl.cefan.ulaval.ca/amsudant/guyanefr.htm
  • Léglise I. [2008], « Plurilinguisme et migrations en Guyane française », Cahiers de l’Observatoire des pratiques linguistiques, vol. 2, « Plurilinguisme et migrations ».
  • Léglise I., Migge B. [2007], Pratiques et représentations linguistiques en Guyane, Paris, IRD Éditions, 488 p.
  • Mam-Lam-Fouck S. [1992], Histoire de la Guyane contemporaine 1940-1982. Les mutations économiques, sociales et politiques, Paris, Éditions caribéennes.
  • Maulin É. [2009], « Les statistiques ethniques et le mythe de la conception républicaine de l’égalité ». Bulletin de l’Observatoire des politiques économiques en Europe, no 20, p. 3-15 : http://opee.u-strasbg.fr/?Les-statistiques-ethniques-et-le
  • Mennucci P. [2012], Immigration, asile et intégration. Immigration, intégration et accès à la nationalité française, rapport législatif, Paris, Assemblée nationale : http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2013/a0258-tiv.asp
  • Piantoni F. [2008], « Marquages territoriaux et catégories sociales dans l’espace ultramarin français », L’espace politique, no 6 : http://espacepolitique.revues.org/index1090.html
  • Piantoni F. [2009], L’Enjeu migratoire en Guyane. Une géographie politique, Matoury, Ibis rouge éditions, coll. « Espace outre-mer », 440 p.
  • Senat [2012], La Lutte contre l’immigration clandestine et l’émélioration de la justice : une volonté affichée mais des moyens limités, rapport législatif, Paris, Sénat : www.senat.fr/rap/a11-112-7/a11-112-727.html
  • En ligne Temporal F., Marie C.-V. [2011], « Insertion professionnelle des jeunes ultramarins : Dom ou métropole ? », Population-F, vol. 66, no 3-4, p. 555-600 : www.ined.fr/fichier/s_rubrique/21727/popf1134_temporal_marie_bernard.fr.pdf
  • Thurmes M. [2006], Les Métropolitains en Guyane : Une intégration entre individu et groupe culturel, thèse, Montpellier, université de Montpellier, 600 p.
  • Veil S. [2008], Redécouvrir le préambule de la Constitution, Paris, La Documentation française, 208 p.
Luc Cambrézy [*]
  • [*]
    Géographe, directeur de recherche, Laboratoire population environnement développement (LPED, UMR 151), université d’Aix-Marseille, Institut de recherche pour le développement (IRD).
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/12/2016
https://doi.org/10.3917/autr.074.0193
Pour citer cet article
Distribution électronique Cairn.info pour Presses de Sciences Po © Presses de Sciences Po. Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent article, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.
keyboard_arrow_up
Chargement
Chargement en cours.
Veuillez patienter...