CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 Maximón est une divinité aujourd’hui devenue emblématique du Guatemala et de ses racines indiennes mayas. Après avoir inspiré nombre d’auteurs guatémaltèques tels le prix Nobel de littérature Miguel Angel Asturias, qui lui consacra un court texte intitulé Maximón, divinidad de agua dulcedans les années quarante ou le poète Hugo Carrillo, dont la pièce de théâtreLas orgias sagradas de Maximón fut jouée dans divers pays d’Amérique latine, il est aujourd’hui exhibé dans les musées – comme le musée d’anthropologie de la capitale –, affiché sur les murs de l’office du tourisme guatémaltèque, représenté sur des dépliants touristiques, des cartes postales ou des timbres postes. Son culte, né aux limites du catholicisme populaire guatémaltèque dans le système des confréries indigènes, a pris une ampleur considérable au cours des dernières décennies dans le pays.

2 Maximón est une divinité extrêmement complexe dont la figure résulte de la rencontre entre culture maya et catholicisme. Dans l’esprit des Indiens, il fait partie de la religion catholique qu’ils apprirent des Espagnols. Dans le même temps, il apparaît comme un élément central de leur religiosité ancestrale, et beaucoup d’entre eux insistent sur l’héritage maya inscrit dans ce culte. En réalité, il semble que pour mieux le comprendre, il faille l’envisager comme une divinité qui possède cette extraordinaire faculté qu’avaient les dieux méso-américains de se transfigurer, de changer de personnalité. Il endosse ainsi de multiples personnalités : des saints catholiques comme Saint Pierre, Saint André ou Saint Michel, mais également la figure plus controversée de Judas Iscariote, celui qui vendit le Christ contre trente deniers. Mais le culte qui lui est rendu fait également référence à une autre facette du personnage, celle de Mam. Ce dieu est celui auquel les anciens Mayas rendaient un culte au cours des cinq derniers jours du calendrier précolombien, le Uayeb [1]. La complexité du personnage ne se limite d’ailleurs pas à évoluer entre catholicisme et religion maya. Il fait aussi le lien avec d’autresfigures et des événements historiques précis. Et c’est ainsi qu’il peut se convertir en un certain nombre de personnages historiques comme Pedro de Alvarado – leconquistador des Indiens de la région – ou le Président ladino Estrada Cabrera qui a gouverné le pays de 1898 à 1920 et permis l’implantation de grandes compagnies étrangères comme la United Fruit Company.

3 Maximón est finalement totalement ancré dans l’histoire du Guatemala puisqu’il fait référence aux événements majeurs que ses populations – notamment indiennes – ont vécues, que ce soit la conquête espagnole, la domination économique ou les violences politiques des dernières décennies. Prenant la figure du conquérant, de l’oppresseur, du général de l’armée guatémaltèque, du patron, duladino [2], du policier, du juge, du Président même – autant de noms qui lui sont attribués –, il incarne la puissance et l’autorité. Résultat d’une relation dynamique avec l’altérité, Maximón est celui qui permet de réaliser une synthèse, d’intégrer dans un même personnage la diversité des êtres et des choses qui peuplent son monde. Ce qui ressort de l’analyse des multiples visages de Maximón, c’est sa dualité à plusieurs niveaux. Son identité fluctuante, intégrant à la fois des figures de saints miraculeux et de traîtres ou d’ennemis, préfigure un personnage ambigu, capable du meilleur comme du pire. Vers lui se tournent les malades, ceux qui veulent améliorer leur situation économique, obtenir la réussite d’un commerce ou une bonne récolte, entreprendre un voyage sans encombre, trouver un conjoint ou faire revenir l’être aimé, mais aussi obtenir réparation face à une injustice et provoquer le malheur de leurs ennemis.

4 Le culte, auparavant circonscrit à quelques villages des hauts plateaux guatémaltèques, s’est aujourd’hui répandu dans de très nombreuses localités, quittant le monde rural indigène pour s’insérer dans l’univers métis et urbain. Le visage de la divinité change ; les rituels et les populations qui le fréquentent aussi. Et même son nom se transforme pour devenir le plus souvent San Simón.

5 Le culte prolifère donc sous diverses formes : dans des confréries, des temples publics indépendants d’envergure nationale, régionale ou locale, des autels particuliers appartenant à un prêtre maya et ouverts au public ou bien encore des autels particuliers destinés à un usage domestique. L’anthropologue Pilar Sanchiz Ochoa explique l’ampleur considérable qu’a pris ce culte comme une réponse despopulations indiennes et ladines pauvres aux terribles événements qui ont affecté le Guatemala depuis les années 1970. Un terrible tremblement de terre en 1976, une répression militaire sans merci contre la guérilla  [3] qui a entraîné la disparition de centaines de villages et une augmentation générale de la pauvreté, une crise économique depuis le début des années 1980... La désillusion envers la religion catholique qui n’offre aucune explication ou remède à cette situation et la méfiance envers des autorités souvent considérées comme la cause des nombreux maux ont favorisé l’éclosion selon elle à la fois des Églises pentecôtistes  [4] et la renaissance des activités rituelles et religieuses mayas mêlées d’apports catholiques tel ce culte dédié à San Simón [Sanchiz Ochoa, 1993].

6 Mais la dynamique du culte de Maximón/San Simón ne se cantonne pas à une dimension nationale. Car les Guatémaltèques se sont tournés vers la migration pour faire face à ces situations économiques et politiques difficiles à l’intérieur de leur pays. Ils sont nombreux à avoir rejoint le Mexique, notamment dans les années quatre-vingt, au moment de la guerre civile et des massacres de populations mayas  [5]. Les migrations vers les États-Unis ou le Canada obéissent quant à elles plutôt à des motifs économiques, même si le phénomène a également augmenté pendant la guerre civile. Accentué encore durant les années 1990, c’est aujourd’hui un phénomène quotidien et croissant [Ruz, 2009].

7 Maximón ou San Simón s’est associé à ces migrations. Des lieux de culte ont ainsi ouvert leurs portes dans un certain nombre de pays tels le Mexique ou les États-Unis. Cela semble normal pour le « saint des voyageurs » qui est réputé aider tant de Guatémaltèques à quitter leur terre natale et émigrer vers des ailleurs plus prometteurs. Les Guatémaltèques qui sont allés en nombre se réfugier au Mexique au cours des dernières décennies ont également emporté avec eux leur idole. On trouve aussi un temple ouvert au public à New York, dans le quartier de Harlem, mais aussi dans plusieurs villes de Californie ou de Floride. Le culte a ainsi dépassé les frontières du pays qui l’a vu naître.

8 Afin de saisir la diffusion transnationale du culte, j’ai entrepris un travail empirique dans la ville de Los Angeles, où la population guatémaltèque est nombreuse  [6]. Même si l’on manque de données chiffrées fiables compte tenu du caractère illégal d’une partie de cette migration, on peut aujourd’hui affirmer que les Guatémaltèques représentent le troisième groupe de Latino-Américains à Los Angeles, après les Mexicains et les Salvadoriens. Il s’agit pour moi de comprendre les modalités d’implantation du culte dans cette ville, de voir dans quels réseaux il a trouvé sa place, d’étudier les transformations et re-significations liées à cette re-localisation et les revendications identitaires sous-jacentes. Mais pour mieux cerner comment cette divinité plastique qu’est Maximón/San Simón entre dans des réseaux globalisés et se relocalise dans des contextes différents de celui qui l’a vu naître, il me semble essentiel d’analyser conjointement les deux dynamiques – nationale et internationale – du culte. C’est la raison pour laquelle cet article propose une analyse en trois temps : dans le village indien où se développe le culte de Maximon, puis dans l’ensemble du Guatemala – ce qui nous permettra notamment de souligner le rôle du tourisme et de l’influence des mouvements migratoires dans l’évolution du culte –, et enfin en Californie du sud.

Maximón à Santiago Atitlán : un culte indien local dans un village aux prises avec la globalisation

9 La localité dont Maximon est originaire – Santiago Atitlán – est située dans la région de l’Altiplano – la plus peuplée et la plus indienne du pays –, sur les rives du lac Atitlán. Les habitants y sont pour une très large majorité des Indiens Mayas Tzutuhils. Ils vivent essentiellement de la culture du maïs, des tomates, des haricots et d’autres légumes – réalisée grâce à l’irrigation des eaux du lac et aux riches sols volcaniques –, de la fabrication de nattes en jonc, de la pêche – bien que cette activité soit en déclin constant –, et de l’artisanat. On trouve également aux alentours du village de nombreuses plantations de café dans lesquelles beaucoup d’Atitèques  [7] travaillent entre septembre et décembre. À cela s’ajoute le tourisme, aujourd’hui en pleine expansion.

10 Sur le plan religieux, trois groupes dominent la vie du village : les catholiques regroupés dans l’Action Catholique ou la Rénovation Charismatique ; les évangéliques convertis à la religion protestante nord-américaine essentiellement sous sa forme pentecôtiste ; et les traditionalistes, pratiquant la costumbre, mélange de croyances et de pratiques catholiques et mayas, essentiellement née au sein des confréries locales. Maximón est un élément clé de ce dernier ensemble. Son culte est intégralement pris en charge par une confrérie – la confrérie de la SainteCroix – et même si ses fidèles se disent tous catholiques, les tensions entre le clergé et les confrères sont palpables depuis de nombreuses années  [8].

11 Physiquement, Maximón y est représenté sous la forme d’une statue qui ne doit pas dépasser un mètre vingt de haut, formée d’un corps de bois enveloppé de feuilles de maïs puis de plusieurs chemises superposées, d’une veste, de plusieurs foulards multicolores et d’un pantalon brodé généralement porté par les Indiens du village. Sa tête se compose d’une calebasse et d’un masque en bois assez simple et sans aucune trace de peinture, présentant un visage assez peu expressif, surmonté de deux chapeaux de type stetson, utilisés dans les rituels de guérison. Pour certains, au centre de ce personnage, se trouverait une idole ancienne de pierre, de jade, d’argent ou même d’or cachée là par des Mayas soucieux d’échapper au contrôle des prêtres catholiques. La plupart des fidèles affirment qu’il est né il y a une éternité, du temps de leurs ancêtres mayas. Et diverses légendes – mettant en scène la création d’une divinité protectrice par les anciens de la communauté – circulent pour raconter les débuts mythiques de la divinité.

12 Le village de Santiago Atitlán est un exemple intéressant des changements intervenus au cours des dernières décennies au Guatemala. Avant l’arrivée des Églises évangéliques – notamment pentecôtistes – et la guerre civile [9], la vie y tournait autour de l’Église catholique et des confréries religieuses, dont celle de la Sainte Croix qui veille sur Maximón. Ce dernier était le principal agent de cohésion, de légitimation et d’identité des Atitèques (Morales, 1998). Or aujourd’hui, ce sont les Églises évangéliques qui semblent imposer leur rythme au village. Elles y foisonnent. D’ailleurs, l’occupation spatiale de Santiago par les pentecôtistes ne peut passer inaperçue. Elim, Église du Verbe, Assemblée de Dieu, Bethel, Église du Bon Pasteur... la liste serait longue puisqu’on en dénombre près d’une trentaine. Sans oublier les Témoins de Jéhovah et les Adventistes du Septième Jour. Lorsqu’on arrive par bateau – principale voie d’accès au village –, on ne peut que constater le développement impressionnant de la construction de temples évangéliques. Et le soir venu, la vie s’organise autour des temples qui apparaissent alors comme les seuls réels lieux de réunion. Les rues se remplissent progressivement de chants de louanges au Seigneur et d’« Alléluia Jésus ». Compte tenu des interdits posés par tous les pasteurs évangéliques et de leur discours stigmatisant à propos des anciennes pratiques religieuses autochtones, les convertis ont progressivement délaissé les charges religieuses traditionnelles et le culte de celui qui est désormais à leurs yeux un instrument du diable.

13 Maximón s’est donc vu reléguer au second plan. Cette perte d’emprise ne signifie pourtant pas le remplacement pur et simple de Maximón par le Dieu des pentecôtistes et la disparition inéluctable de la costumbre. Face à la désaffection d’une large partie de la population villageoise et aux difficultés financières – refus des charges religieuses – que cela a pu occasionner, la confrérie a dû trouver de nouveaux alliés pour continuer à fonctionner. Et c’est l’arrivée du tourisme de masse dans la région qui lui en a fourni l’occasion. En effet, depuis une quinzaine d’années, le tourisme est devenu une source de revenu importante, apportant avec lui une différenciation économique et sociale sans précédent. Les hôtels, restaurants, ateliers de peinture et boutiques d’artisanat se sont multipliés à grande vitesse. La physionomie même du village en a été considérablement modifiée. La confrérie a elle aussi profité de ce contexte pour proposer un produit d’« exotisme religieux » à des touristes friands de « traditions mayas ». Et les touristes sont venus grossir les processions de la Semaine Sainte. Sur le plan financier, ils ont pris le relais en drainant vers la confrérie l’argent autrefois apporté par les fidèles. Japonais, Américains, Allemands... Ils sont nombreux, en quête d’exotisme culturel, à venir voir celui que les guides touristiques mettent en avant comme un élément fondamental de la culture religieuse indienne. Les antennes locales de l’INGUAT – Institut National Guatémaltèque du Tourisme – les y encouragent. D’ailleurs, les guides locaux de Santiago ont pris pour nom « groupe de guides Rilaj Mam », ce qui signifie en Tzutuhil « l’ancien », « le vieux », nom souvent donné par les Indiens de Santiago à la divinité. Les Confrères ont quant à eux mis en place un système pour récolter des fonds. À peine franchi le seuil de la confrérie, ils annoncent la couleur : c’est 2 quetzals pour voir Maximón, 10 pour le photographier et 50 pour le filmer. Les journalistes qui débarquent de plus en plus nombreux pour les festivités de la Semaine Sainte représentent aussi une possibilité d’apport financier non négligeable. Car on vient filmer ces rituels étranges qui feront quelques minutes dans un journal TV ou un documentaire sur « les Mayas ». Les tarifs sont alors négociés avec les Confrères qui ont appris à monnayer leurs « secrets ».

14 Maximón n’en est pas devenu pour autant un simple objet de curiosité touristique. Une réelle dévotion est toujours présente à Santiago. Et sa présence imprègne la culture atitèque. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de montrer le rôle capital qu’il joue dans les cérémonies de la Semaine Sainte  [10] [Pédron Colombani, 2006]. Il s’agit plutôt d’une simple adaptation d’un groupe de fidèles devenus minoritairesau sein de leur communauté, groupe de fidèles appartenant qui plus est au secteur le plus pauvre. Le culte a intégré une dimension de « spectacle touristique » et une logique mercantile afin de s’attirer de nouvelles ressources financières mais aussi et surtout pour obtenir un nouveau type de légitimité. Le Saint représente la « tradition » face aux groupes religieux venus de l’extérieur. C’est ainsi qu’il est devenu le symbole des traditions indiennes d’origine maya exhibées aux visiteurs, qu’ils soient étrangers ou métis venus de la capitale. La revalorisation de la culture maya passe par l’intérêt de tous ces étrangers pour la « spiritualité indienne » – phénomène déjà mis en évidence par Antoinette Molinié et Jacques Galinier [2006] en Amérique latine.

Dynamique nationale : de plus en plus de prêtres guérisseurs « mayas » au service de San Simón

15 Le village de Santiago Atitlán occupe – depuis des temps antérieurs à l’arrivée des Espagnols – une position clé dans les réseaux d’échanges du pays. Bénéficiant d’un potentiel écologique considérable – les meilleures terres agricoles de la région du lac – et d’une situation particulière – à la frontière géographique entre les hautes terres dites froides et les basses terres chaudes de la côte pacifique –, Santiago est en effet depuis les temps préhispaniques un point de passage central pour les échanges au sein de l’altiplano. Le long des principales voies commerciales passant par Santiago, nous pouvons repérer de nombreuses répliques de Maximón. Il semble bien que les commerçants atitèques aient exporté leur culte au gré de leurs déplacements.

16 En s’exportant ainsi, le culte a subi un certain nombre de modifications – à tel point qu’il est parfois difficile d’établir le lien entre le Maximón de Santiago et les figures que l’on rencontre en d’autres lieux. Si ce n’est que les fidèles affirment eux-mêmes qu’il s’agit bien du même personnage. On retrouve aussi plusieurs figures de San Simón dans les grandes plantations des basses terres de la côte pacifique où les Indiens des hautes terres viennent travailler – temporairement ou définitivement – pour pallier le manque de ressources dans leurs communautés d’origine  [11].

17 La figure la plus emblématique de toutes ces transformations est certainement celle du San Simón de San Andrés Itzapa, une petite ville située à une soixantaine de kilomètres de la capitale. Ici, rien ne rappelle Santiago et Maximón, où se développe une religiosité indigène et locale. L’effigie qui trône au fond du temple est un mannequin à la peau blanche, vêtu d’un costume occidental, d’une chemise blanche et d’une cravate lui conférant un air très solennel. Elle n’a plus grand-chose à voir avec le petit mannequin au masque de bois aux traits grossiers et au pantalon traditionnel indien. Le culte, qui a pris une ampleur considérable au point de faire de San Andrés Itzapa un centre cultuel dont la renommée dépasse lesfrontières nationales, attire une foule bigarrée essentiellement métisse et urbaine – la plupart des Ladinos de la capitale –. Pourtant, c’est la tradition maya que les spécialistes locaux du culte invoquent et mettent constamment en avant pour légitimer leurs pratiques et expliquer l’efficacité de leurs gestes. Même si San André Itzapa est aujourd’hui sans aucun doute le lieu de culte le plus grand et le plus fréquenté, il illustre parfaitement le processus en cours depuis le début des années 1990, période au cours de laquelle de nombreux temples de plus petite envergure ont ouvert leurs portes à travers les hauts plateaux guatémaltèques.

18 Pilar Sanchiz Ochoa, dans un article de 1993, soulignait déjà l’augmentation constante du nombre des chamanes, sorciers ou zahorines pratiquant la costumbredevant les effigies de Maximón ou San Simón. J’ai eu l’occasion de m’entretenir avec nombre d’entre eux. Comme à Patzún, ville intermédiaire entre la capitale et le lac Atitlán. La bourgade est un lieu de passage clé dans le réseau d’échanges commerciaux des hauts plateaux. On y trouve tout naturellement des répliques de la divinité. L’une d’elles fait partie de l’autel particulier d’un jeune prêtre maya au discours très engagé sur la tradition de ses ancêtres. Sans être l’élément central de cet autel, San Simón figure au milieu de représentations d’anciennes divinités précolombiennes, d’un calendrier maya, d’une représentation du soleil et n’est consulté qu’occasionnellement. Il ne manque cependant de rien, comme en témoignent les tortillas, les bougies, les fruits, l’alcool et les petits pains – offrandes traditionnellement offertes aux dieux par les Mayas – en permanence disposés à ses pieds. Quant aux signes d’appartenance catholique, ils sont certes présents mais en nombre beaucoup plus réduit qu’à Santiago. L’homme affiche en revanche un diplôme délivré par le Conseil des Prêtres Mayas Kackchikels auquel il a participé en décembre 1991. D’ailleurs, le discours est ici clairement pro-maya. L’histoire de San Simón devient celle d’un Indien ayant vécu dans le pays avant l’arrivée des Espagnols et tué par ces derniers au moment de la conquête. L’accent est mis ici sur les ravages de la conquête et les interdictions de culte imposées aux Indiens : « San Simón n’est pas Espagnol. Ce nom est celui qu’ils lui ont donné mais il existait avant eux sous un autre nom ». Tendant à faire l’impasse sur les multiples facettes du personnage, l’homme ramène San Simón à une dimension exclusivement maya et en fait un élément d’identification indienne fort, qui transcende les frontières entre les différentes communautés mayas du pays.

19 Un certain nombre de temples ont aussi ouvert leurs portes dans les villes les plus touristiques du pays, et des prêtres – garants de l’« authenticité » du culte – proposent des cérémonies à un public large en quête d’expériences religieuses et médicinales, ou tout simplement avide de connaissances sur la culture maya. Comme à la Antigua, où un temple fut construit au début des années 2000 dans un centre de ventes d’artisanat indien. Le lieu s’appelle le Nim Pot – du nom d’un vêtement traditionnel – et présente une pléiade de costumes typiques des localités du pays, les fameux cerfs-volants géants utilisés pour la fête des morts, et vend des objets artisanaux en tous genres – anciens et récents – ainsi que quelques livres ethnologiques. L’endroit est très couru des touristes et on y présented’ailleurs régulièrement des « danses traditionnelles » ou des saynètes jouées par des enfants.

20 Au début, on y trouvait un petit autel organisé autour d’une figure de San Simón – ici appelé plus volontiers Maximón – de petite taille, installée dans un coin reculé. Plus récemment, un petit temple de style exotique – fait de bambous et de paille – a été construit dans la cour de la boutique pour accueillir le saint. L’image, fabriquée de bric et de broc avec des éléments en provenance de plusieurs localités du pays, rassemble un corps construit à Nahualá – où plusieurs familles sont réputées pour accomplir le travail à la fois manuel et spirituel qui consiste à donner forme à une nouvelle effigie –, un chapeau et une chemise typiques de Todos Santos Cuchumatanes – un village des hautes terres situé tout au nord du pays, au-delà de Huehuetenango –, un pantalon et un tzute – foulard traditionnel des hommes d’une confrérie – de Santiago Atitlán, ainsi qu’une serviette aux couleurs de Chichicastenango – ville importante de la région des Mayas Quiché –. L’image vénérée ici propose une identité « maya » abolissant les frontières entre les différentes ethnies qui peuplent le territoire guatémaltèque.

21 Le prêtre qui officie dans ce temple présente d’ailleurs le personnage comme un élément de la culture maya. Le plus souvent, il réalise des cérémonies pour des touristes internationaux. Il explique alors aux visiteurs que Maximón est un Indien, un prêtre, qui vécut au Guatemala il y a très longtemps. Il avait des connaissances en botanique et à propos du calendrier et de la « cosmovision » maya. Mais les Espagnols l’ont tué à leur arrivée dans le pays. Ici encore, nous retrouvons un discours qui fait de Maximón un élément purement maya préexistant à l’arrivée du catholicisme. Et les explications que le prêtre fournit sur les rituels mettent l’accent sur l’utilisation des plantes « sacrées pour les Mayas », le rapport à la nature, les quatre points cardinaux... Ici, tout est fait pour inscrire ce culte dans le cadre d’une « spiritualité maya » que le spécialiste religieux s’efforce de mettre à la portée de tous. Ce type d’expérience n’est pas isolé.

Le saint des voyageurs et son culte à Los Angeles

22 Maximón ou plutôt San Simón a traversé les frontières avec les Guatémaltèques partis vers le Mexique ou les États-Unis. Ce n’est certainement pas un hasard. Car au Guatemala, il a toujours été associé aux voyages et au commerce.

23 À Santiago Atitlán, il passe lui-même pour un voyageur. Plusieurs histoires locales le mettent en scène sur les routes du pays, généralement à pied, mais parfois aussi à cheval. Divers indices permettent de se rendre compte que l’on est en sa présence : une fragrance inhabituelle, une odeur de tabac, un objet poussé par le vent dans une ruelle, des oiseaux qui s’envolent tout d’un coup sans raison apparente ou un bruit de sabots. Cette particularité semble ancrée dans le mode de pensée religieux maya. E. Thompson affirme que les anciens sculpteurs mayas gardaient leurs idoles dans des jarres par peur qu’elles ne sortent la nuit [Thompson 1954, p. 254].

24 Pilar Sanchiz Ochoa souligne que le visage noir du San Simón de San Lucas Toliman – près de Santiago Atitlán- rappelle le dieu noir du commerce des Mayas, Ek Chuah [Sanchiz Ochoa, 1993]. Ce dernier était à la fois le dieu du commerce et du cacao, peut-être parce que les graines de cette plante servaient de monnaie et donc de base à toute transaction commerciale dans la Mésoamérique. Il apparaît généralement dans les codex peint en noir avec un ballot sur l’épaule et parfois un bâton à la main. Diego de Landa raconte que les voyageurs, très certainement des commerçants, emportaient avec eux de l’encens qu’ils brûlaient la nuit sur trois pierres, demandant à Ek Chuah de leur permettre de rentrer sains et saufs à leurs domiciles [Thompson, 1970, p. 370-372]. Il apparaît alors comme le protecteur de ceux qui voyagent pour subvenir aux besoins de leurs familles.

25 Un peu partout au Guatemala, les candidats actuels au voyage et à l’émigration viennent donc consulter la figure de Maximón ou de San Simón, obtenir sa bénédiction et sa protection. Comme cette femme venue consulter une prêtresse dans un centre cultuel de Panajachel avant d’entreprendre les démarches pour partir vers les États-Unis. Au terme d’un rituel de divination avec des cigares pour support, celle-ci annonce à sa cliente que San Simón est d’accord, qu’elle aura sa carte verte pour partir rejoindre sa fille là-bas. Il ne lui reste plus qu’à lui offrir ce qu’il réclame... Pour ce type de rituel, il n’est pas rare que dans certains lieux de culte, on habille la divinité en costume militaire, de policier, ou de la patrouille de surveillance de la frontière, costumes lui conférant les attributs des autorités.

26 Les candidats au départ et au passage illégal de la frontière emportent même parfois avec eux une statuette de San Simón, comme me l’apprirent nombre de mes interlocuteurs rencontrés à Los Angeles. Et les histoires sur le passage « miraculeux » de la frontière grâce à son intervention sont légion. En ce sens, San Simon rejoint d’autres figures de saints non catholiques mexicaines telles que celles de Jesus Malverde ou de Juan Soldado, à qui s’adressent beaucoup de migrants transfrontaliers. Comme le note Miguel Olmos Aguilera, ces personnages ont la particularité de provenir d’un milieu métis, et d’être représentés sous l’apparence d’un homme de peau blanche [M. Olmos Aguilera, 2008, p. 50-51]. San Simon n’échappe pas à cette règle. La figure qui a traversé les frontières n’est pas celle du monde indien des abords du lac Atitlán, mais une figure métissée, s’apparentant au monde occidental blanc.

27 À Los Angeles, mes visites dans les multiples botánicas de la ville m’ont permis de me rendre compte de la présence significative de San Simón dans cet univers particulier. À la fois centres spirituels, commerces d’approvisionnement en objets religieux de provenances diverses et centres de santé alternatifs, lesbotánicas sont des petites boutiques où la foi côtoie le business. Micro-espace traversé par une pluralité de pratiques et de conceptions, on y trouve tout le matériel nécessaire pour les rituels du catholicisme populaire, de la santería, du palo mayombe, du spiritisme, du vodou, de l’occultisme en tout genre, mais aussi diverses médecines traditionnelles indiennes, la naturopathie... Ces botánicas sont, pour reprendre les propos de Patrick Arthur Polk, un moyen d’assurer la continuitédes traditions des pays d’origine pour les Latino-Américains, et ce dans un contexte de migration, de diaspora et d’exil [Polk, 2004a, p. 20]. Généralement, elles sont tenues par des expatriés d’origine latino-américaine. Ce sont les Cubains et les Porto-Ricains qui ont ouvert les premières botánicas de Los Angeles dans les années 1950 [Polk, 2004b, p. 31]. Dans les décennies qui suivirent, des personnes d’origine culturelle diverses s’y sont intéressées – généralement pas vagues successives – : des Mexicains – années 1960 et début 1970 –, des Salvadoriens, des Guatémaltèques – années 1980 et 1990 –... Dans certains cas, ce sont d’anciennes boutiques vendant des plantes médicinales qui se sont transformées, passant deyerbería à botánica. Certains Afro-Américains et Américains d’origine asiatique ont aussi ouvert leurs boutiques. Mais aujourd’hui, la majorité des propriétaires de botánicas dans le sud de la Californie sont d’origine mexicaine et centraméricaine. Ils se définissent le plus souvent comme des « guides spirituels ».

28 Pour Joseph Murphy, ces boutiques constituent de véritables refuges face au monde extérieur froid et parfois hostile, un lieu visible et facilement identifiable où le consommateur peut exprimer librement ses croyances [Murphy, 1988, p. 48]. Mais il me semble qu’elles sont aussi le creuset d’une hybridité ouverte à des influences extrêmement diverses. Beaucoup de propriétaires de botánicas tentent de conserver des pratiques traditionnelles issues de leurs pays d’origine tout en expérimentant de nouvelles façons d’envisager le sacré et de nouvelles pratiques. Et ce n’est à mon avis pas un hasard si San Simón y a pris sa place. Tout le matériel nécessaire au culte est vendu dans nombre d’entre elles, ainsi que des figurines en plâtre destinées à des autels particuliers. Certaines proviennent directement du Guatemala. D’autres sont de production locale et attestent d’ailleurs de transformations physiques significatives. Comme l’ajout d’un fusil comme attribut à la place du bâton symbole de l’autorité traditionnelle dans les confréries.

29 Plusieurs propriétaires de botánicas, tous d’origine guatémaltèque, ont même reconstitué un autel dans un coin de leur commerce. C’est le cas dans une botánicaappelée « San Simon de los llanos », où le propriétaire a construit un temple juste à côté de sa boutique. Une statue semblable à celle de San Andrés Itzapa au Guatemala trône dans une assez grande pièce, enfermée dans un coffre de verre. D’autres figures telles la Vierge Marie, le Christ sur sa croix, la Santa Muerte, la vierge de Guadalupe, une divinité hindoue, Saint Judas Thaddée, San Antonio de Paula, Buddha... ont également pris place à ses côtés. Le San Simon qui trône dans ce temple a été fabriqué au Guatemala, à la Antigua. Alors que je lui demandais s’il avait été fait par un prêtre maya, influencé par ma longue expérience du culte au Guatemala, Carlos, le propriétaire des lieux, eut l’air surpris et me répondit que non, il avait tout simplement été fabriqué par quelqu’un qui fabrique des San Simón. Ce détail allait avoir de l’importance.

30 Carlos est arrivé à Los Angeles dans les années 1980 et vient de Samayac, un village de l’ouest du Guatemala. Il exerce depuis plus d’une trentaine d’années, mais n’a ouvert sa première botánica qu’en 1994. Il se dit guérisseur et affirme être le plus souvent consulté pour des problèmes de santé, d’alcoolisme, derelations de couple, des difficultés économiques, pour traverser la frontière sans encombre ou obtenir des papiers en règle. Pour ce faire, il travaille surtout avec San Simón qui apparaît comme son principal interlocuteur. Celui-ci le guide, lui apparaît pour effectuer des diagnostics, lui donner les indications pour soigner ses patients, etc. Ici, la dualité qui caractérise le personnage au Guatemala est également de mise. Carlos réalise, avec l’aide de San Simón, de la magie dite noire. Dans le bureau où il reçoit ses patients, les objets attestent de l’hybridité de ses pratiques. Il semble avoir intégré au cours de ses divers voyages quantité d’éléments extérieurs et n’hésite pas à faire appel à la Santa Muerte – si populaire au Mexique – par exemple. Sur une publicité pour son temple, il a indiqué « Indien de Samayac, guérisseur de naissance, astrologue y parapsychologue, conseiller spirituel ». Le texte affirme qu’il effectue tout type de travail pour l’amour, la chance, la protection. Se cura mal puesto, se hace magia negra, magia blanca, amarres, ligamientos, endulzamientos. Se leen las cartas, colorines y el vaso. Sur cette affiche, figurent une photo de San Simon, une représentation d’Indien nord-américain, une photo de Carlos et une figurine de Bouddha...

31 L’histoire racontée par Carlos pour expliquer l’origine de San Simon fait référence à une version très éloignée des légendes sur la création d’un protecteur par les anciens Mayas racontée en zone indienne au Guatemala. Il devient ici un homme ayant réellement vécu il y a quelque soixante ou soixante-dix ans. Jeune docteur d’origine italienne, il vint un jour dans le village guatémaltèque de Zunil (où un important culte dédié à San Simon s’est développé) avec beaucoup d’argent et consacra son existence à aider les populations locales. Il choisit l’endroit à cause de la pauvreté de ses habitants et devint très populaire en leur donnant des médicaments, de l’argent, des vaccins... Bref, il protégeait les gens et tout le monde l’aimait. Ce qui ne manqua pas de susciter l’envie. Et ceux qui l’enviaient voulurent le tuer. Pour le discréditer, ils disaient qu’il n’était pas un médecin mais un sorcier. Ils ne le laissèrent pas travailler et lui interdirent de donner quoi que ce soit aux autochtones. Les Indiens, quant à eux, le protégèrent et essayèrent de le cacher. Par la suite, il entreprit un voyage vers la capitale, au cours duquel il s’arrêta dans un endroit isolé où un vieil homme lui offrit un café. La boisson le transforma miraculeusement en San Simón. L’endroit en question n’était autre que San Andrés Itzapa, lieu de culte de grande renommée auquel les fidèles que nous avons rencontrés à Los Angeles se réfèrent sans cesse. Ici, San Simón n’est jamais mis en relation avec le Maximón de la région du lac Atitlán. En montrant des photos de ce dernier, j’ai même ressenti une certaine ignorance ou tout du moins une indifférence à son égard. La seule référence qui importe ici, c’est celle du San Simon de Zunil ou de San Andrés Itzapa, où les figures du Saint sont plus métissées.

32 L’histoire racontée par Carlos reprend d’ailleurs des bribes d’une légende qui m’avait été contée à Zunil, avec d’autres détails, notamment l’emprisonnement de l’homme dont les agissements gênaient le gouvernement, sa vengeance sur la personne du chef de la police du département de Quetzaltenango – qui tomba gravement malade – et finalement sa sortie victorieuse de prison attestant de cefait de son pouvoir supérieur à celui des autorités officielles. Le personnage n’était cependant pas un Italien comme dans le cas présent. À Los Angeles, c’est la dimension internationale qui est mise en avant. San Simón vient de loin, et c’est ce qui semble lui conférer autant de pouvoir. C’est aussi certainement une façon pour ces déracinés de le rendre plus proche de leurs préoccupations de migrants.

33 Au Guatemala, le 28 octobre – jour de la saint Simon – donne lieu à de nombreuses festivités à travers le pays. On fait venir des musiciens, on danse, on mange, et on apporte quantité d’offrandes à San Simón. À Los Angeles, des fêtes privées et publiques sont également organisées. Depuis quelques années, Carlos met même en place une fête à laquelle il convie tous les fidèles de son entourage et les clients de sa boutique. L’événement, qu’il appelle « l’anniversaire de San Simón », prend une dimension culturelle et folklorique. Il s’associe alors avec une association locale qui prend le nom de « confrérie San Simón ». Il s’agit de quelques personnes qui tentent de construire une « confrérie San Simón » un peu sur le modèle de celle qui existe à San Andrés Itzapa. Et qui vise à regrouper le plus possible d’adeptes. Ils ont par exemple pour projet de créer des liens avec les fidèles de San Francisco, au nord de la Californie. Cette association est totalement indépendante du temple de Carlos et détient son propre lieu de culte, installé dans un minuscule temple construit dans l’arrière-cour de la maison d’une famille – dont le fils est aussi le président de la confrérie. Prenant ses distances avec la dimension commerciale du culte tel qu’il s’exprime dans l’univers des botánicas, celui-ci tente de proposer un autre mode d’organisation, plus proche de celui du pays d’origine.

34 L’an passé, j’ai assisté aux festivités. La journée a drainé un public assez nombreux, essentiellement composé de Centraméricains ou de Nord-Américains originaires de l’un des pays d’Amérique centrale. La journée s’est organisée autour de 4 temps forts :

35

  1. Des danses dans le temple attenant à la botánica « San Simón de los llanos », dès les premières heures du matin, comme cela se fait un peu partout au Guatemala.
  2. Un accueil dans la maison du président de la « confrérie San Simón » avec une distribution de nourriture, la préparation d’autels portables, et là encore des danses, mais cette fois-ci avec la divinité dans les bras – comme cela se fait à San Andrés Itzapa et chez de nombreux particuliers détenteurs d’une effigie, excepté à Santiago Atitlán où seul le spécialiste en charge du culte est habilité à le faire.
  3. Une procession dans les rues de Los Angeles.
  4. Une soirée en son honneur avec repas, jeux, spectacle et bal. Ce quatrième temps donne à l’événement une dimension festive. Si le repas est typique du Guatemala, le spectacle, lui, est plus ouvert aux influences mexicaines et nord-américaines.

36 Nous allons nous attarder quelques instants sur la procession qui est, à mon sens, riche en enseignements sur les représentations qui sous-tendent l’événement. Elle existe officiellement depuis 7 ans. Auparavant, les festivités se cantonnaient à un espace privé, avec juste une petite sortie sur le trottoir. Mais aujourd’hui, les organisateurs bénéficient d’une autorisation légale de défiler et même d’une escorte policière, ce dont les organisateurs semblent extrêmement fiers. Cette reconnaissance officielle de la procession est un véritable signe pour eux car elle signifie que San Simón ouvre encore une frontière – le thème du passage de la frontière est primordial parmi les fidèles de Los Angeles –, abaisse une barrière avec la population nord-américaine. Carlos insiste bien sur le fait que des visiteurs viennent le voir de toutes parts : d’Inde, d’Israël, de Russie, de France... Il met sans cesse en avant la dimension internationale de sa botánica.

37 Cette procession consiste en un défilé dans quelques rues de Los Angeles, dans le quartier de Pico Avenue qui accueille beaucoup de Guatémaltèques. Sur le modèle des processions dédiées aux saints ou à la vierge en Amérique latine, les participants se relaient pour porter San Simón, installé sur un autel portable. De nombreux fidèles portent également de petites représentations de San Simón dans des paniers. Toutes ces figures sont agrémentées de cigarettes et portent la marque particulière de leurs propriétaires : un sombrero mexicain, un tissu guatémaltèque, un masque préhispanique... Tous les arrangements semblent possibles. Le cortège commence avec le drapeau guatémaltèque porté fièrement par une jeune femme, un encensoir diffusant du copal, les miss San Simón élues pour l’occasion et exhibées dans un pick-up, des femmes arborant des vêtements traditionnels typiques du Guatemala, certaines portants des paniers sur leur tête comme le font les femmes indiennes. Un peu plus tôt dans la journée, je m’étais entretenue avec nombre d’entre elles, alors en plein préparatifs. Elles étaient en train de revêtir des huipiles – sortes de blouses traditionnelles portées par les femmes indiennes du Guatemala et représentant un village particulier –. Certaines portaient celui de Nebaj, de Santiago Atitlán, de San Antonio Aguascalientes, de Santa Catarina Palopó, etc. Remarquant certains motifs que je ne connaissais pas, je les avais alors interrogées sur leur provenance. Silence gêné de certaines, réponse franche des autres : « Je ne sais pas. Je ne suis pas Guatémaltèque ». Plusieurs venaient d’autres pays d’Amérique Centrale, mais revêtaient ce costume pour la procession. Quelques-unes comptaient même sur moi – anthropologue, donc détentrice d’un savoir sur les traditions du pays dans lequel elle travaille – pour leur indiquer la provenance de leur costume. Car c’est l’identité guatémaltèque qui était mise à l’honneur tout au long de la journée, et notamment dans la procession. Et quelle que soit l’identité des participants, ils jouaient le jeu en se déguisant en Guatémaltèque, patrie d’origine de San Simon, qu’il s’agissait d’honorer en cette journée « anniversaire ». De nombreux participants étaient d’ailleurs simplement habillés avec des textiles guatémaltèques à l’apparence plus moderne, des chemises avec le drapeau guatémaltèque ou le quetzal, oiseau emblématique du pays.

38 Carlos, lui, a revêtu un costume blanc brodé de motifs de fleurs, d’oiseaux et de personnages très colorés, avec une ceinture en provenance du Guatemala, unturban – emblème des prêtres mayas au Guatemala – et un bâton symbolisant le pouvoir dans les confréries ainsi que de multiples rangées de colliers de graines rouges et noires dans un assemblage que je n’avais encore jamais observé auparavant. La mise en scène évoque le Guatemala, le monde des confréries et des prêtres – guérisseurs. Mais dans une configuration totalement inédite. Carlos a laissé libre cours à son imagination pour construire son personnage et appuyer sa légitimité sur son origine d’Indien venu du Guatemala.

39 Dans le cortège, on note la présence d’un groupe de danseurs appelé les danseurs de la conquête, venus à la demande des organisateurs. Ils ont d’ailleurs déjà dansé une partie de la matinée devant les portes de la botánica avant le départ pour la procession. Ils exécutent des danses de la conquête mais d’un genre un peu particulier. Au lieu d’évoquer des épisodes de la conquête espagnole, les danseurs dansent simplement en formant des cercles. Leurs costumes mêmes signifient bien la perte du sens initial de cette danse dans le contexte californien. S’ils portent des masques de conquérants espagnols, leurs costumes relèvent plus d’un folklore hybride que d’une tradition extrêmement codifiée : longues robes colorées décorées de figures d’Indiens représentées avec des plumes, de Vierges de Guadalupe...

40 Tout ce cortège est accompagné de musique. Mais ici, pas de flûte, de tambour et de marimba (instrument emblématique des communautés indiennes du Guatemala présent dans toutes les cérémonies). Encore moins de chirimia (hautbois accompagnant les rituels des confréries) ou de tun (tambour préhispanique taillé dans un grand cylindre de bois qui accompagne certaines danses). L’orchestre s’apparente plutôt à une fanfare jouant des airs mexicains à grand renfort de trompettes et de batterie.

41 Ce défilé me semble mettre trois éléments en exergue :

42 D’abord l’importance d’une référence au Guatemala comme lieu d’origine du culte (qui se ressent à tous les niveaux de la mise en scène) ; cette origine servant de légitimité aux pratiques. Elle permet aux fidèles de s’inscrire dans une lignée croyante reconnue. Le culte est investi par des Latino-Américains d’origines nationales diverses ayant expérimenté les mêmes situations migratoires et les mêmes difficultés d’insertion dans le contexte nord-américain. Le lieu d’origine de San Simón semble avoir une importance particulière à leurs yeux. D’ailleurs, ils sont nombreux à s’être rendus en pèlerinage au Guatemala – essentiellement à San Andrés Itzapa – ou à envisager de le faire un jour. Tout se passe comme si cette procession était une façon d’affirmer publiquement et fièrement une identité guatémaltèque dans une ville comme Los Angeles composée d’une large part de migrants. La religion est un élément leur permettant de mettre en scène cette identité. Et les participants se réfèrent à une identité nationale guatémaltèque – et plus largement centraméricaine – certainement plus significative pour eux qu’une identité maya en référence à un passé préhispanique. Ce qui fait sens dans le contexte guatémaltèque n’est pas nécessairement ce qui fait sens pour eux. Si des éléments mayas – tel un masque – sont parfois présents, ils ne sont jamais mis en avant et semblent s’ajouter simplement aux autres symboles. La langue officiellede l’événement est l’espagnol. Et Carlos ne fait pas référence à la « tradition maya » comme le font les prêtres-guérisseurs du Guatemala. Il se fait appeler « l’Indien de Samayac » – village du Guatemala –. Ce nom, qui figure sur le devant de sa boutique et sur des tee-shirts distribués aux membres actifs de la journée, valorise une dimension indienne générique.

43 Ensuite une ouverture internationale – voire universelle –, qui peut se lire à plusieurs niveaux : dans la légende mobilisée pour expliquer l’origine du personnage mais aussi dans les propos des protagonistes. Le président de la confrérie, dans son discours d’ouverture des festivités, ne tenta pas de les inscrire dans une tradition préhispanique particulière, mais souligna plutôt leur dimension spirituelle et humaine au sens large du terme. Il évoqua cette fête comme la seule « authentique » se réalisant à Los Angeles ; une fête « proche de l’être humain », « riche en émotions ». Il appela chacun à laisser s’exprimer ses émotions, à chanter, danser, crier, pleurer, « car c’est ainsi qu’est l’être humain ».

44 Enfin une forte dimension individuelle et syncrétique dans les pratiques, qui se vérifie dans la richesse des arrangements esthétiques et le bricolage des autels particuliers portés par plusieurs participants. Le culte s’adapte et évolue sans cesse. C’est ainsi que tandis que Carlos fait abondamment fumer et boire San Simón, le président de la confrérie nous a confié ne jamais le faire et désirer éradiquer cette dimension du culte, s’inquiétant de l’image renvoyée à l’extérieur par ce type d’agissements. C’est pourtant, au Guatemala, un des fondements majeurs du traitement réservé à la divinité, en référence au traitement que réservaient les anciens Mayas à leurs dieux. Le bricolage auquel il se livre semble s’éloigner de plus en plus des précontraintes liées au monde maya.

Conclusion

45 À Los Angeles, on a ainsi vu une nouvelle forme de religiosité prendre forme, modifier l’environnement religieux des populations nationales en s’inscrivant dans le contexte des botánicas, s’étendre à diverses populations immigrantes, et s’articuler avec d’autres influences religieuses. Cette construction bricolée montre bien que les pratiques religieuses des migrants ne sont ni des répliques exactes de celles du pays d’origine, ni des constructions complètement nouvelles  [12].

46 Cette religiosité mobile n’est pas sans ancrage territorial. Le culte reste balisé par des lieux de référence tel San Andrés Itzapa. Les fidèles semblent avoir besoin de savoir d’où vient ce culte, et de visiter San Simón dans son environnement d’origine supposé. La plupart des fidèles rencontrés à Los Angeles étaient, soit déjà allés en pèlerinage à San Andrés Itzapa, soit formaient le vœu d’y aller un jour. C’est vrai pour les Guatémaltèques, mais aussi pour des Salvadoriens, des Mexicaines, des Honduriens... ayant adopté le culte. Certains protagonistes fontmême des allers-retours réguliers entre les deux pays. Ce n’est donc pas un hasard si San Andrés Itzapa m’est apparu, alors que je travaillais dans le pays, comme le lieu de culte le plus ouvert aux influences extérieures. Les rues y ont été envahies d’échoppes proposant des articles de culte hétéroclites (bougies, encens, fleurs, œufs, parfums, statuettes de San Simón de toutes les couleurs, etc.), mais aussi des jeux de tarots, des livres ésotériques divers, le Nuevo devocionario espiritista d’Allan Kardec, des ouvrages de « magie noire » et de « magie blanche », des photos du Christ, des statuettes de San Gregorio et du Rey San Pascual  [13], des figures de divinités afro-américaines, et même de bouddha... Dans un contexte de rapprochement des espaces et d’intensification des contacts, les emprunts de nouveaux référents religieux se jouent des frontières. Le culte y a assimilé – peut-être plus qu’ailleurs – toute une série de traits propres au monde métis, urbain, international.

47 À l’instar des religions dites traditionnelles étudiées dans un livre récent paru au Mexique [Argyriadis, de la Torre, Gutierrez Zuñiga, Aguilar Ros, 2008], le culte de Maximón/San Simón, identifié il y a seulement quelques décennies à un territoire, une culture, voire un groupe ethnique, est aujourd’hui pris dans un processus de translocalisation. Lié à l’expérience des migrants guatémaltèques, le culte est aujourd’hui implanté dans plusieurs villes des États-Unis, du Canada et d’Amérique centrale. En se relocalisant à Los Angeles, le culte originaire des hauts plateaux du Guatemala a subi de nombreuses modifications. Les populations concernées ont changé ; les rituels et leur signification aussi. L’histoire même de San Simón et tout l’imaginaire qui sous-tend le culte ont évolué. Car comme le souligne André Mary, la mobilité du religieux ne s’actualise pas seulement à travers le « passage des frontières » et « les parcours migratoires », elle se vit aussi dans l’imaginaire des acteurs religieux. Aujourd’hui, en Californie, le culte de San Simon est porteur d’un ensemble de significations collectives propres au monde des migrants venus d’Amérique latine. On assiste, comme nous l’avons vu, à la fois à un bricolage individualisé prenant place dans un monde occidental où domine un régime d’individualisation des croyances et des pratiques, et en même temps à la création de nouveaux univers communautaires.

Notes

  • [*]
    Maître de conférences à l’université Paris Ouest Nanterre La Défense, membre du Laboratoire d’Ethnologie et de Sociologie Comparative, centre EREA, CNRS, UMR 7186.
  • [1]
    Marquant le passage d’un cycle à un autre, le Uayeb était une période particulièrement redoutée, censée apporter divers dangers. López de Cogolludo, dans son historia de Yucatan escrita en el siglo XVII[1807-1868], s’y réfère en affirmant que « les Indiens craignaient ces jours, croyant qu’ils étaient malheureux et qu’ils apportaient avec eux le danger de la mort subite, les pestes et d’autres infortunes ». Éric Thompson signale que ces cinq jours étaient de tension, de tristesse, et qu’on n’entreprenait alors aucune activité non absolument nécessaire. En même temps, ils étaient aussi le prélude d’un nouveau cycle vital. Présidant de nombreuses cérémonies agricoles à cette période cruciale de l’année, Maximón assure de bonnes récoltes aux Indiens de la région.
  • [2]
    Le terme « ladino » est employé au Guatemala – comme au Salvador ou au Honduras – pour désigner le métis. Sa signification est plus socioculturelle que raciale, encore que la grosse majorité des Ladinos soit formée de métis d’Indiens et de blancs. L’Indien est en fait celui qui présente un certain nombre de traits culturels propres aux 22 groupes ethniques d’origine maya qui peuplent le pays. Et le Ladino est celui dont les traits culturels l’approchent du monde occidental. Il parle l’espagnol à la maison, a délaissé l’habit traditionnel pour un jean et une chemise ou un tee-shirt, a adopté un mode de vie occidentalisé...
  • [3]
    À partir des années 1970, de sanglants affrontements entre la guérilla et le gouvernement font plusieurs dizaines de milliers de morts au Guatemala. Ce n’est qu’en 1996 que les représentants du gouvernement et les chefs de l’Union Révolutionnaire Nationale Guatémaltèque (URNG) concluent des accords de paix mettant fin à cette guerre civile qui déchire le pays depuis plus de trois décennies.
  • [4]
    S’il n’existe pas de données quantitatives réellement fiables sur le développement des groupes évangéliques en Amérique latine, il semble tout de même que ce soit au Guatemala que l’on trouve le pourcentage le plus élevé de convertis de toute l’Amérique latine. Le chiffre moyen généralement avancé se situe entre 25 et 30 % de la population totale. Le pentecôtisme est le principal moteur de cette percée du protestantisme au Guatemala, comme sur l’ensemble du sous-continent latino-américain, où l’on estime que les trois-quarts des convertis sont aujourd’hui des pentecôtistes (Le Bot, 1994, 228). Les années d’expansion du pentecôtisme au Guatemala ont été marquées par un événement particulier : le tremblement de terre du 4 février 1976. Autour de cette catastrophe naturelle, qui touche très durement les secteurs populaires du pays, s’organise l’arrivée de nombreuses institutions et missions nord-américaines venues pour « prêter main forte ». 1976 est notamment l’année où s’installe au Guatemala l’Église du Verbe – filiale de la Gospel Outreach, organisation californienne –, fer de lance du mouvement dit néo-pentecôtiste, qui permet au mouvement évangélique de commencer à prendre également racine au sein des élites urbaines, traditionnellement catholiques.
  • [5]
    Les chiffres officiels avancent quelque 43000 réfugiés guatémaltèques au Chiapas. Les ONG et différents organismes situent plutôt leur nombre aux alentours de 1000000. (Ruz, 2009).
  • [6]
    Selon le recensement de 1990, 159000, soit 59 % des 269000 Guatémaltèques vivant aux USA, résidaient dans la zone des cinq comtés de Los Angeles (Los Angeles, Orange, San Bernardino, Ventura et Riverside). Cf. Popkin, 1999.
  • [7]
    Les Atitèques sont les habitants de Santiago Atitlán.
  • [8]
    De réels conflits ont même éclaté autour du personnage. Sur ces épisodes, voir Mendelson, 1965 et Pédron Colombani, 2005.
  • [9]
    Entre 1980 et 1992, la région du lac Atitlán et Santiago se sont trouvés au cœur de conflits d’une grande violence entre la guérilla et l’armée. Dans ce contexte, Santiago a été le lieu de conversions massives. Comme le signale Mario Roberto Morales – auteur d’un livre sur la question ethnique au Guatemala –, après l’éradication de la guérilla par l’armée à Santiago, l’âme brisée des veuves et des orphelins a été « rafistolée » par un rituel simple qui les invitait à effacer le passé ancestral comme un poids accablant, les mettait en contact direct avec l’Esprit Saint, tout en leur offrant de rapides et faciles opportunités d’ascension sociale et politique par l’intermédiaire du ministère religieux [Morales, 1998, p. 337].
  • [10]
    Même si des visiteurs, guidés par des prêtres guérisseurs de tout l’altiplano, viennent rendre un culte à Maximón tout au long de l’année, c’est tout de même la semaine sainte qui représente le moment le plus fort du culte. Jusque dans les années quatre-vingt, l’effigie ne prenait d’ailleurs forme que pour quelques jours afin de présider aux rituels de fertilité en cette période charnière correspondant à la fois auUayeb du calendrier maya, aux célébrations de Pâques catholiques et au début de la saison des pluies. Aujourd’hui, la divinité demeurant entière toute l’année, c’est plutôt une sorte de « rénovation » qui se joue là. Mais il semble important qu’en cette période Maximón prenne vie à nouveau pour marquer l’entrée dans un nouveau cycle et assurer la perpétuation de la vie. Les cérémonies sont extrêmement complexes et riches en événements, et impliquent la participation de tout le village et des autorités municipales – même si celles-ci sont converties au pentecôtisme –.
  • [11]
    Voir par exemple les descriptions faites par de Suremain, 1996.
  • [12]
    Sur ce sujet, voir notamment le numéro spécial de la revue Anthropologie et sociétés intitulé « Le religieux en mouvement », coordonné par Deidre Meintel et Marie Nathalie Leblanc [2003].
  • [13]
    Le Rey San Pascual est un saint populaire guatémaltèque dont la chapelle se trouve à Olintepeque, petite ville près de Quetzaltenango. Il a l’apparence d’un squelette et est utilisé dans des rituels de guérison ainsi que pour entrer en communication avec les morts.
Français

Au Guatemala, Maximón est un personnage aux multiples facettes issu de la rencontre entre deux univers de sens – maya et catholique. Son culte, identifié il y a seulement quelques décennies à un territoire, une culture, voire un groupe ethnique, est aujourd’hui pris dans un processus de translocalisation. Il s’est répandu sous diverses formes dans l’ensemble du pays – y compris parmi les couches métisses urbaines –, mais également au Mexique et aux Etats-Unis, au gré des flux migratoires des guatémaltèques. Cet article propose une réflexion conjointe sur les dynamiques nationales et internationales du culte, sur les transformations et re-significations du culte, ainsi que sur les revendications identitaires sous-jacentes. À partir d’un travail de terrain mené dans la ville de Los Angeles, nous verrons notamment comment le culte a pris une dimension individuelle et syncrétique, s’éloigne du monde maya et devient porteur d’un ensemble de significations collectives propres au monde des migrants latino-américains.

Mots-clés

  • Guatemala
  • États-Unis
  • Maximón
  • San Simón
  • migration
  • maya
  • hybridité
  • syncrétisme globalisation
  • transnationalisation
  • revendication identitaire

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Sylvie Pédron Colombani [*]
  • [*]
    Maître de conférences à l’université Paris Ouest Nanterre La Défense, membre du Laboratoire d’Ethnologie et de Sociologie Comparative, centre EREA, CNRS, UMR 7186.
Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire
Mis en ligne sur Cairn.info le 10/12/2010
https://doi.org/10.3917/autr.056.0075
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