CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1 La proposition présentée ici s’appuie essentiellement sur des recherches réalisées sur des métropoles d’Amérique latine (Mexico, San Salvador, Lima, Rio de Janeiro) dans le cadre du réseau de recherche « Ambulantage entre Local & Global »  [1], afin de tester la possibilité d’en généraliser les hypothèses et les résultats dans d’autres contextes urbains, du sud et du nord, dans une perspective comparative.

2 Il s’agit d’exposer la première étape d’une modélisation non mathématique mais heuristique, qui ne tend pas tant à réduire la complexité qu’à offrir une représentation dynamique, systémique et contextuelle d’un phénomène [Le Moigne, 2000]. L’exercice correspond ici à une phase intermédiaire de la recherche, à mi-chemin entre un travail de synthèse empirique sur la portée générale de phénomènes observés localement, et un travail de réflexion théorique, hypothético-déductif, sur les mutations des villes contemporaines dans le cadre de la globalisation, mutations que je résumerai avec le terme « métropolisation ».

3 Le point de départ de l’article sera la variété des identifications du commerce dit de rue, informel ou ambulant dans les métropoles contemporaines. Nous mettrons ensuite en relation les principales identifications de ce commerce avec certaines mutations de ces métropoles, ce qui nous permettra de qualifier les conditions de la métropolisation propices à ce secteur d’activité. Ces conditions conduisent à déplacer la perspective du vendeur vers le client, et ainsi à s’interroger sur l’expérience de la citadinité contemporaine.

Commerce de rue, commerce informel ou commerce ambulant : une ou plusieurs réalités ?

4 D’une langue à l’autre (nous comparons ici les usages de l’anglais, de l’espagnol et du français) et d’un pays à l’autre, les façons d’identifier ce type de commerce présentent à la fois des similitudes et des différences significatives.

5 À l’échelle d’un pays ou d’une ville, il apparaît souvent une terminologie spécifique : par exemple, on parlera de « hawker » ou « pedlar / peddler » en Grande-Bretagne et aux États-Unis, de « colporteur » en France, de « camelot » au Québec ou en Afrique francophone (ainsi qu’au Brésil : « camelô »). Les produits vendus sont souvent dévalorisés de façon vernaculaire comme étant de la « camelote » (France), de la « chatarra » (Mexique), de la marchandise « chicha » et « bamba » (Pérou) ou « trucho » (Argentine). On trouve aussi de savoureuses innovations lexicales, comme le « camelodrôme » (camelodrómo) qui désigne au Brésil un marché construit pour réinstaller des vendeurs qui opéraient dans la rue, aussi dénommé par les autorités « mercado popular »  [2], tandis qu’au Mexique on parle officiellement de « plaza de comercio popular » [Stamm, 2005].

6 Pour identifier l’activité de manière générique et non spécifique, il existe trois principales qualifications (tab.1). L’identification du « commerce informel », élément du secteur informel de l’économie, semble dominante dans les trois langues et dans tous les pays concernés, comme si le vocabulaire de l’expertise économiciste était hégémonique dans les discours politiques, médiatiques et scientifiques. En revanche, l’anglais diffère sensiblement de l’espagnol et du français quand il s’agit d’identifier non plus un vaste « secteur », mais l’activité précise d’acteurs : il parle de « street vendors », faisant de leur lieu d’exercice, la rue, le déterminant principal de ces vendeurs. L’espagnol et le français insistent de leur côté sur un autre déterminant, celui de la mobilité du vendeur ( « vendedores ambulantes » ou « marchands ambulants »).

Tab. 1

Les représentations lexicales du commerce de rue, informel ou ambulant

Types de
commerce
Principales expressions :
a) anglais, b) espagnol,
c) français
Champs et acteurs
de la représentation
lexicale
Informations
ou observations
Informel a) Informal Sector or Trade
b) Economia o comercio
informal
c) Secteur ou commerce
informel
Économistes, experts
en développement,
gouvernements
nationaux
Absence d’enregistrement,
d’informations statistiques
et / ou de perception
fiscale
figure im1
Types de
commerce
Principales expressions :
a) anglais, b) espagnol,
c) français
Champs et acteurs
de la représentation
lexicale
Informations
ou observations
Sur la voie
publique
a) Street Vendors /
Merchants / Trading
Juristes, experts en
aménagement urbain,
gouvernements
locaux
Normativité juridique de
l’occupation légitime ou
illégitime de l’espace
public, visibilité dans le
paysage urbain
Ambulant b) Vendedores ambulantes /
Venta ambulante
c) Marchands ou vendeurs
ambulants
Clients et vendeurs,
mass media
Mobilité du vendeur,
instabilité du dispositif de
vente
figure im2

Les représentations lexicales du commerce de rue, informel ou ambulant


Monnet 2006.

7 Sous ces différentes dénominations, jusqu’à quel point parle-t-on du même commerce ? L’identification d’un commerce dit « informel » renvoie à l’absence d’enregistrement légal et / ou fiscal de l’activité ; ce type a été défini par des économistes pour le différencier des activités qui pouvaient être mesurées et analysées par la statistique officielle. C’est une identification négative (est informel tout ce qui n’est pas enregistré) utile pour les experts et les gouvernements nationaux pour quantifier l’évasion fiscale, la piraterie, l’absence de protections ou de garanties. C’est dans ce registre que sont publiées la plupart des études scientifiques ou techniques [cf. BIT, 2000 ; Lautier, 2004].

8 Cependant, les gouvernements locaux, qui sont en charge de l’ordre public, utilisent aussi une définition de la vente selon le statut juridique de l’espace où elle se réalise ; ils opposent ainsi le commerce sur la voie publique aux transactions qui se déroulent à l’intérieur d’un espace privé.

9 Enfin, l’identification par le caractère « ambulant » apparaît communément utilisée par les clients et les vendeurs, ainsi que par les médias, dans les aires linguistiques espagnole et française. À la différence de l’identification par la formalité ou son absence, l’identification par la rue ou par la mobilité relève de l’expérience commune en structurant, qualitativement, le paysage urbain, tant physique que social.

10 Ces trois identifications, correspondant chacune à une grande dichotomie (informel/formel ; public/privé ; ambulant/fixe), composent ensemble un « triangle dichotomique » (Graphique1), à l’intérieur duquel on trouverait le commerce de rue, informel et ambulant, opposé aux activités commerciales caractérisées par leur formalité et par leur localisation fixe dans un espace privé et intérieur (établissement, magasin ou boutique). Cette première modélisation graphique apparaît d’emblée excessivement simplificatrice, car il est fréquent d’observer que les commerces considérés ne sont pas en même temps ambulants, informels et sur la voie publique.

Graphique 1

Les identifications dichotomiques du commerce de rue, ambulant et/ou informel

figure im3

Les identifications dichotomiques du commerce de rue, ambulant et/ou informel


11 En effet, des marchands ambulants formels (comme les crieurs de journaux) coexistent avec des commerces informels qui ne se trouvent ni dans la rue ni ambulants, comme les boutiques improvisées à l’intérieur des domiciles. On rencontre également des commerces de rue qui ne sont pas ambulants, comme les étals ou les kiosques, tandis que l’on trouve aussi du commerce ambulant hors de la rue, par exemple avec les colporteurs dans les trains ou dans les bus, voire dans des édifices. Le commerce dit de rue, ambulant ou informel ne constitue donc pas un objet stable et net, mais un objet « flou et fluide » [Monnet, 2001] : il faut considérer qu’il présente une certaine unité tout en ayant des limites mouvantes et qui changent selon les circonstances. Cela pose un défi à la recherche tenue d’identifier précisément son objet, alors que dans le cas qui nous occupe ici, je fais l’hypothèse que pour comprendre le phénomène et affronter le défi de sa complexité [Morin, 1988], il est nécessaire de respecter son caractère changeant et incertain.

12 Dans ces conditions, ce que nous appellerons dans la suite de ce texte « commerce ambulant » apparaîtra comme une activité à la fois ou concurremment caractérisée par son statut juridico-économique (sa formalité), par son lieu d’exercice (sa spatialité) ou par son caractère mobile (sa mobilité). Une deuxième modélisation graphique figure les champs intersectés dans lesquels on peut situer les différents types de transactions ambulantes (graphique n° 2).

Graphique 2

Les identifications dynamiques du commerce de rue, ambulant et/ou informel

figure im4

Les identifications dynamiques du commerce de rue, ambulant et/ou informel



INFORMALITÉ : statut normatif ou descriptif de la transaction commerciale, du vendeur, du produit ou du service, selon qu’ils sont ou non enregistrés légalement, soumis au paiement de taxes et/ou à un contrôle sanitaire ou de sécurité, socialement représentés comme marginaux, etc. Flèche « Informalité » : continuum du plus informel au centre vers le moins informel à la périphérie
MOBILITÉ : statut temporel de l’activité selon la durée d’occupation d’un même lieu et/ou la rapidité d’occupation successive d’une série de lieux. Catégorisations : mobilité/permanence, précarité/sécurité, flexibilité/ rigidité. Flèche « Mobilité » : continuum du plus mobile au centre vers le moins mobile à la périphérie SPATIALITÉ : statut normatif ou descriptif de l’espace où se déroule l’activité. Catégorisations : public/privé, ouvert/fermé, extérieur/intérieur. Flèche « Spatialité » : continuum de l’espace le plus public au centre vers le moins public à la périphérie
ZONES :
• Zone 1 : Transactions qui sont à la fois informelles (le vendeur travaille au noir et/ou vend des marchandises illégales), ambulantes (le vendeur ne s’arrête que de façon temporaire et/ou le client est en déplacement) et dans la rue. Exemples : la vente aux automobilistes de gommes, bonbons et cigarettes aux feux rouges (Mexico), la vente de châtaignes aux passants (Paris), la vente de montres à Time Square (New York).
• Zone 2 : Transactions non ambulantes mais informelles dans un espace de circulation. Exemple : les étals non autorisés permanents dans les quartiers commerçants centraux ou autour des infrastructures de transport collectif (Amérique latine).
• Zone 3 : Transactions ambulantes dans un espace de circulation, mais pas informelles. Exemples : crieurs de journaux, vendeurs ambulants patentés de cartes téléphoniques, vendeurs de glaces, musiciens agréés dans le métro.
• Zone 4 : Transactions informelles et ambulantes hors de l’espace public. Exemples : vente à la sauvette dans les restaurants (fleurs : Paris, Mexico, etc.), dans les salles d’attente des hôpitaux (sucreries et snacks, Mexico), dans les wagons de train ou dans les bus (disques pirates, Mexico), dans les immeubles de bureau (café, Mexico).

13 Il est donc proposé de vérifier les conditions d’apparition dans diverses métropoles du phénomène que je propose d’appeler « Ambulantage » [Monnet, 2006] et qui peut être résumé ainsi :

14

  1. des situations d’échange économique (vente de biens et prestation de services),
  2. caractérisées par l’occupation temporaire ou précaire d’un espace de circulation ouvert au public (et pas nécessairement juridiquement public, comme les bus, trains, centres commerciaux, hôpitaux, etc.),
  3. l’une ou les deux parties de l’échange (vendeur ou client) étant « ambulante », c’est-à-dire en mouvement.

15 Le commerce ambulant n’est donc pas exclusivement caractérisé par la situation du vendeur, mais aussi par celle du client, qui achète voire consomme dans un espace de circulation, au cours de ses déplacements, comme nous le verrons plus loin.

16 Si, comme nous l’avons vu, il n’est pas pertinent de considérer que les trois critères d’identification fonctionnent de façon dichotomique par un jeu d’inclusion-exclusion automatique des activités qui nous intéressent, en revanche ils semblent opératoires pour établir comment notre objet flou et fluide se définit, de façon dynamique, par les relations qu’il entretient avec les grandes mutations urbaines, dans la mesure où ces dernières peuvent être analysées à travers le prisme de la formalité, de la mobilité et de la spatialité des transactions.

L’évolution de la spatialité, de la mobilité et de la formalité des transactions : le développement de l’ambulantage

17 Les espaces dédiés aux transactions commerciales ont connu plusieurs bouleversements au cours des trois derniers siècles  [3]. Jusqu’au XVIIIe siècle, les formes dominantes du commerce urbain étaient le marché de plein air ou la foire, d’une part, et les boutiques où les artisans encadrés par des corporations exposaient et vendaient leur production, d’autre part. On trouvait aussi une foule de vendeurs de rue, ainsi que de petites échoppes spécialisées dans le commerce de détail sur les ponts ou le long des murs des grands édifices (églises, couvents, etc.). L’essentiel des transactions se déroulait alors à l’air libre, le client n’entrait pas physiquement à l’intérieur des boutiques ou des échoppes ; la distinction moderne entre espace privé et espace public commençait à peine à être fonctionnelle.

18 Au cours du XIXe siècle, la construction de l’administration de l’État national conduit à une politique de formalisation systématique des activités économiques, en menant les premiers recensements, en utilisant les premières statistiques, en remplaçant le système des péages aux entrées de ville par un système de taxation des établissements et en commençant à faire la chasse aux vendeurs de rue. Les autorités publiques enferment les marchés dans des Halles et les investisseurs privés inventent et diffusent le modèle des grands magasins ; les transactions commerciales se déroulent de plus en plus à l’intérieur, dans des espaces fermés et privés, et c’est alors que les représentations sociales opposent nettement les « commerces établis » et les « métiers de la rue ».

19 Durant la deuxième moitié du XXe siècle, se produit une évolution paradoxale avec la diffusion progressive de l’urbanisme fonctionnaliste comme élément précoce de la globalisation. Tandis que le modèle commercial dominant prévoit que les transactions se déroulent dans un espace privé spécialisé dans cette fonction, l’espace public est réservé aux fonctions de déplacement. La rue est alors conçue et aménagée par les pouvoirs publics comme l’espace spécialisé dans les flux de véhicules et / ou de piétons, sans place prévue pour les transactions. De leur côté, les promoteurs inventent le centre commercial intégré suburbain, structuré autour d’un mail piétonnier intérieur et coupé de son environnement par des murs aveugles et de grandes étendues de stationnement, en corrélation avec le développement de l’usage de la voiture individuelle. Mais, dans le même temps la généralisation de la vitrine-façade bouleverse le rapport des magasins aux passants : le mail piétonnier des centres commerciaux autant que l’alignement des vitrines dans les rues commerçantes les plus denses favorisent la naissance d’une nouvelle pratique sociale, le lèche-vitrine, qui deviendra une pratique massive de loisirs. L’espace de circulation piétonnier redevient ainsi un espace, sinon de consommation, du moins d’interaction avec la marchandise. Le succès des rues piétonnes est venu couronner cette évolution.

20 Depuis la fin du XXe siècle, la tendance à la spécialisation monofonctionnelle des espaces s’affaiblit, voire s’inverse. Les responsables des infrastructures de transport intègrent des fonctions commerciales dans des espaces de circulation : des kiosques, des stands ou des distributeurs automatiques ont fait leur apparition d’abord dans les entrées des gares et des stations, puis dans les couloirs et dans les wagons. De leur côté, les concepteurs et promoteurs de centres commerciaux cherchent à animer leur mail et leurs accès en y installant des petits kiosques, étals et carrioles, ou en programmant des spectacles [Sabatier 2006], tandis que les gestionnaires des parcs de loisirs renforcent leurs espaces commerciaux internes et externes [Didier, 2000].

21 Dans ce contexte, nous observons une nouvelle expansion du commerce ambulant. Nouvelle dans les pays du nord, où les « métiers de la rue » semblaient « disparus » ou « oubliés » [Berrouet & Laurendon, 2005]. Nouvelle aussi dans les pays du sud, dont les conditions ont fondamentalement changé depuis que Milton Santos (1975) décrivait les circuits « supérieur » et « inférieur » des métropoles « incomplètes » du Tiers-Monde dans les années 1950 et 1960, ou depuis que Hernando de Soto (1986) voyait dans les acteurs de l’économie informelle des années 1970-1980 des entrepreneurs micro-capitalistes capables de créer davantage d’emplois et de revenus, une fois « libérés » des pesanteurs des réglementations étatiques.

22 Or, depuis une vingtaine d’années, la globalisation des échanges et de la consommation modifie profondément le commerce urbain. Dans les pays où l’État de droit est peu effectif, elle soutient le développement massif de la « piraterie industrielle » (contrebande ou contrefaçon) qui trouve ses débouchés dans le commerce informel [Cross, 2005b]. Dans les pays riches, la globalisation accompagne un important flux d’immigrants dont un bon nombre, à cause de leur statut illégal ou du fait de leurs filières de circulation, s’emploie dans l’économie informelle ou dans la rue [Tarrius, 2002]. Dans tous les pays, le phénomène est renforcé par l’entrée dans le commerce ambulant des entreprises formelles qui cherchent à profiter du marché émergent des « clients ambulants ».

23 En effet, l’intensification des mobilités métropolitaines [Ascher, 1995 ; Allemand & alii, 2004 ; Bourdin, 2005] favorise le développement de l’ambulantage. Notre modélisation soutient l’hypothèse que le citadin utilise ses déplacements entre ses différents espaces-temps d’activité ou de repos (travail, loisirs, domicile, approvisionnement du foyer), pour acquérir des biens spécifiques ou bénéficier de services particuliers. À la différence du client qui se rend volontairement dans un magasin avec l’intention préalable d’y acheter un bien ou un service, le client du commerce ambulant apparaît alors comme un client opportuniste et furtif.

24 Opportuniste, car nous postulerons que l’acte d’achat se décide souvent selon les circonstances :

25

  1. au moment où surgit le besoin (par exemple : je n’ai plus de cigarette ou de crédit téléphonique, donc je cherche autour de moi une réponse à ma demande, à laquelle répondent les vendeurs ambulants qui passent entre les voitures au feu rouge) ;
  2. par impulsion face à une offre (par exemple, les gros titres d’un journal déterminent ma décision de l’acquérir, ou la vision d’un vendeur de glaces me donne envie d’en acheter) ;
  3. par adaptation au lieu où je me trouve (exemple : à l’heure de déjeuner, j’achète un sandwich lorsque s’en offre l’occasion lors d’un déplacement entre deux de mes activités).

26 Furtif, car à la différence d’un achat programmé, l’achat « ambulant », réalisé voire consommé immédiatement, est rapidement oublié puisqu’il n’a pas modifié fondamentalement la trajectoire du consommateur et ne représente qu’une halte dans une succession de haltes, au point que le « passant » n’a pas eu nécessairement conscience d’être devenu « client ».

27 Même si elles sont furtives, les opportunités de transaction créées par la rencontre entre acheteurs et vendeurs ambulants ne sont pas fortuites. Les mobilités et les nécessités des premiers sont fortement déterminées, et l’adaptation des seconds à ces déterminants est cruciale. Les vendeurs ambulants, plus encore que les autres commerçants, vont ainsi à la rencontre de leurs clients :

28

  • avec le porte à porte (comme le colportage de maison en maison, les vendeurs de bouquets de fleurs qui passent le soir de restaurants en restaurants, ou certains crieurs de journaux, cf. Akbar 2005) ou le « bureau à bureau » (comme les petits vendeurs de café qui circulent dans les immeubles de bureaux) ;
  • en circulant au milieu de voyageurs captifs dans les salles d’attente (hôpitaux, administrations, etc.) et surtout dans les moyens de transport : formellement dans les trains ou avions pour les repas, snacks ou rafraîchissements « à la place », informellement dans les bus, les rames de métro, ou entre les voitures arrêtées par un feu ou un embouteillage ;
  • en installant des éventaires aux ruptures de charge des flux de voyageurs : carrefours [Monnet, Giglia & Capron, 2005], arrêts de bus, gares ou aux accès d’édifices (halles, églises, hôpitaux, administrations publiques ou d’entreprises, chantiers) ;
  • en se déployant devant les boutiques dans les rues les plus commerçantes, de façon massive et permanente quand la géopolitique locale le permet, comme dans les centres historiques d’Amérique latine [Cross, 1998 ; Monnet & Bonnafé, 2005], de façon plus discrète mais formelle avec les comptoirs mobiles que les établissements installent dans l’espace public, ou encore à la sauvette là où les interdictions sont effectives.

29 À l’ambulantage du client répond ainsi une offre qui s’organise de façon spécifique. Les commerçants « informels » forment un monde hétérogène (petits vendeurs à la sauvette, réseaux ethniques, puissantes « mafias » des centre-ville, etc.). Ils sont bien représentés dans la vente de briquets, cigarettes, gadgets, artisanat, fleurs ou fruits, et dans le spectacle vivant (musiciens, cracheurs de feu, etc.), et donnent lieu à la plupart des études (Commerce et mobilités urbaines… 2005 ; Comércio, culturas e políticas urbanas 2005). Mais, généralement absentes des recherches, les entreprises formelles, des plus petites aux plus grandes, sont bien présentes dans la vente ambulante des métropoles du sud et du nord. Alors que les vendeurs informels concentrent la distribution des produits manufacturés bon marché ou pirates, les entreprises formelles investissent particulièrement deux créneaux de vente aux clients ambulants : l’alimentaire d’une part, l’information-communication d’autre part.

30 Les besoins du client ambulant s’expriment aujourd’hui dans l’utilisation des ruptures de charge de ses déplacements pour se restaurer, acheter du snack alimentaire à consommer pendant les temps de transport ou au travail, ou compléter les courses à ramener chez soi. Il y a de multiples exemples de l’offre formelle qui répond à cette demande. Partout se multiplient les distributeurs automatiques de snacks et sodas. Dans toutes les villes de France, de nombreuses boulangeries ont remplacé leur vitrine par un comptoir mobile qui s’avance dans la rue, pour vendre des sandwichs au client de passage. Après avoir lutté contre leur présence pendant des décennies, l’administration du métro parisien accrédite désormais une quarantaine de vendeurs de fruits et légumes [APRIFEL, 2005], sur le modèle des 400 musiciens ambulants qu’elle autorise depuis 1997 [Fernandez, 2004]. D’autres entreprises de métro dans le monde considèrent officiellement le commerce comme une activité qui doit être développée dans leur enceinte [STM, 2004]. Au Mexique, l’introduction sur le marché des sorbets « BonIce » par l’entreprise colombienne Quala, déjà présente en Équateur et au Vénézuela, passe exclusivement par la vente ambulante depuis 2004  [4].

31 La demande des clients ambulants renvoie également à « l’occupation » des temps libres « forcés » durant les trajets ou les attentes, pour s’informer (journaux, publicité), communiquer (téléphones mobiles), se divertir (baladeurs, consoles de jeux) voire s’orienter (GPS).

32 Alors que le traditionnel crieur ambulant de journaux avait quasiment disparu des paysages urbains, un nouveau journal qui a fait son apparition à Mexico en 1994 (Reforma) a choisi de réinventer cette fonction avec deux innovations significatives de la métropolisation : les crieurs désormais revêtus d’uniformes voyants couverts des logos de l’entreprise, vendent aux automobilistes arrêtés aux feux rouges. Dans plusieurs métropoles d’Europe et des Amériques, les périodiques gratuits se sont récemment développés et multipliés [5] en pariant sur le marché publicitaire que représentent les consommateurs ambulants :

33

Comment expliquez-vous la réussite d’À Nous Paris ? […] nous bénéficions d’un extraordinaire réseau de diffusion, celui de la RATP, grâce à l’accord exclusif que nous avons signé en 1999. […] Ce réseau nous permet de toucher une audience très bien connue, tant d’un point de vue quantitatif que qualitatif, ce qui séduit les annonceurs. Il faut savoir que près de 2,5 millions de personnes transitent chaque jour dans le métro et le RER. À Nous Paris ! est diffusé à 400 000 exemplaires chaque semaine et touche un peu plus d’un million de lecteurs réguliers. Il s’agit de l’audience la plus « parisienne », avec notamment énormément de jeunes de moins de 35 ans. Cette cible intéresse énormément les annonceurs  [6].

34 Après que le format « livre de poche » a permis d’emmener partout avec soi tant un roman qu’un essai, un agenda ou un carnet de notes ou de jeux, la convergence des technologies numériques mobiles banalise qu’un même « portable » serve à la fois à téléphoner, à échanger des courriels, à organiser son emploi du temps, à jouer et à trouver ou recevoir de l’information, pendant les temps de transport. Au Mexique, TELCEL, qui dépend du géant des télécommunications TELMEX, a reproduit la recette du journal Reforma et franchisé des milliers de vendeurs en uniforme pour vendre du « temps de communication » aux automobilistes. À son tour, l’Espagnol Telefónica a adopté la même stratégie publicitaire et commerciale en Amérique centrale.

35 Le développement des transactions ambulantes est favorisé par les conditions mêmes de la métropolisation contemporaine, parce qu’au-delà de l’intensification des mobilités et des flux, celle-ci démultiplie les interstices tant spatiaux que sociaux où peuvent se nicher les vendeurs et se trouver les acheteurs.

Métropolisation et multiplication des interstices socio-spatiaux

36 La modélisation pose l’hypothèse que les transactions ambulantes créent et / ou exploitent les espaces de l’entre-deux, les interstices de la mobilité, de la spatialité et de la formalité.

37

  1. Nous l’avons déjà vu, les transactions ambulantes se développent dans les interstices de la mobilité. Les occasions d’échange entre vendeurs et clients apparaissent dans les temps morts et dans les temps forts des déplacements : dans les moyens de transport (à l’arrêt dans un véhicule individuel, entre deux arrêts dans les transports collectifs) et dans les salles d’attente (gares, hôpitaux), aux ruptures de charge et aux changements de modes de déplacement, aux arrêts forcés dans les carrefours et sur les seuils.
  2. Les interstices spatiaux sont particulièrement propices : dans l’espace-temps entre travail et domicile, entre deux bâtiments, entre un moyen de transport et un autre, avec des vendeurs qui se trouvent dans un espace juridique et des acheteurs qui se situent dans un autre. Tandis qu’on peut observer à Paris un vendeur situé dans l’espace public qui vend des fleurs à travers des grilles à des acheteurs qui se trouvent dans l’enceinte du métro, dans un site archéologique mexicain des touristes sont interpellés par des marchands situés à l’extérieur du grillage. Souvent, le commerce informel profite des « no man’s lands » sur lesquels les compétences juridiques ou policières sont les moins clairement établies ou revendiquées, comme les passerelles, les passages souterrains, les accès d’immeubles, les angles morts de couloirs ou de places, les hors-champ des caméras de surveillance [Tonnelat, 2005]. De son côté, le commerce établi ne se contente pas d’essayer d’attirer le chaland vers l’intérieur, mais il déploie des éventaires à l’extérieur ou déplace des comptoirs mobiles pour « attraper » le client de passage.
  3. La transaction ambulante utilise enfin les interstices de la formalité. Ces interstices se multiplient quand à côté du « marché noir » franchement illégal (filières d’emploi pour travailleurs immigrés sans statut dans les pays riches, filières de distribution de contrebande, contrefaçon ou piraterie) apparaît un « marché gris » dont la légalité et la formalité sont floues : « petits boulots » précaires pour les chômeurs, les intérimaires, les étudiants (distribution de prospectus, livraisons, vente en sous-traitance de cartes téléphoniques, etc.) ; vide-greniers, braderies de rue, ventes de garage ; génération spontanée de micro-entreprises, surtout dans l’alimentaire (produits préparés à domicile et vendus sur le pas de porte ou dans la rue), avec un recours massif au personnel familial et enfantin non rémunéré. Ces interstices de la formalité permettent à la fois d’exploiter la tolérance des autorités ou de la société vis-à-vis du respect des règles et de jouer sur la connivence entre vendeurs et clients. Celle-ci se fonde sur des valeurs sociales associées aux relations interpersonnelles directes, au patrimoine paysager visuel, sonore et olfactif du désordre de la rue, par contraste avec des transactions qui seraient de plus en plus dépersonnalisées, aseptisées et automatisées à l’intérieur des établissements commerciaux. Pour lutter contre cet excès de formalisme, les grandes surfaces déploient beaucoup d’énergie pour animer leurs galeries ou leurs devantures, obtenir une ambiance festive et créer une informalité contrôlée.

38 Ces différents types d’interstices sont structurellement généralisés par le processus actuel de métropolisation. En effet, la métropolisation se spatialise dans le caractère extensif des agglomérations urbaines, l’interdépendance entre des zones de résidence, de travail, de consommation et de services toujours plus éloignées les unes des autres, la privatisation de services publics (transports, eau, courrier, santé, éducation) et la publicisation d’espaces privés (centres commerciaux, parcs de loisirs, etc.), la croissance de l’emprise des infrastructures de communication et d’intermodalité, la multiplication des surfaces et des écrans dévolus à l’information et à la publicité. Toutes ces dynamiques sont favorables à l’apparition ou à l’exploitation d’interstices spatiaux pour l’ambulantage.

39 La métropolisation transforme aussi le champ de la formalité : avec le développement de l’économie postfordiste et du capitalisme dit flexible ou cognitif, on observe un processus de précarisation du travail salarié et la croissance des relations de sous-traitance et de franchisage [Ascher, 1995 ; Bourdin, 2005b]. Au-delà de cet « assouplissement » général des règles du marché du travail, se modifie la conception même des limites entre public et privé, entre individu et collectivité, entre intérêt des entreprises et intérêt général, entre consommation et loisirs. Ce qui est considéré comme informel ici peut apparaître comme informel là. La globalisation implique que les acteurs métropolitains raisonnent à plusieurs échelles : une entreprise peut se délocaliser pour profiter de règles plus avantageuses ailleurs, tout comme un travailleur peut émigrer pour les mêmes raisons. Les filières du commerce ambulant jouent de ces différences de formalité comme elles jouent des échelles : des vendeurs sénégalais immigrés illégalement en Europe peuvent vendre des ceintures péruviennes achetées à Mexico par un intermédiaire allemand entré avec un visa de touriste…  [7]

40 Enfin, la métropolisation accentue aussi l’importance de la mobilité, en donnant à la logistique une place centrale dans la réorganisation des entreprises [Lasserre, 2000], en favorisant le développement et l’usage des nouvelles technologies d’information-communication (téléphones et ordinateurs portables, lecteurs de CD et DVD, écrans d’information continue et de publicité interrompue, etc.) qui créent à leur tour de nouvelles niches pour la vente ambulante (cartes téléphoniques, disques), enfin en démultipliant les possibilités de manger hors de chez soi et « en chemin » [Ascher, 2005].

41 Ces interstices spatiaux, temporels, économiques et normatifs, propices aux transactions ambulantes et aux services à la mobilité, ont en commun avec les « espaces intermédiaires » dont parle Laurence Roulleau-Berger [2005] d’apparaître et de disparaître au gré des flux, des répressions et des tolérances, des phases spontanées ou volontaristes du renouvellement urbain, des mouvements de population, etc. Loin d’être stables (même s’ils peuvent être durables), ils participent d’une géographie floue et fluide de la ville.

42 Notre modélisation théorique de l’ambulantage, loin de l’enfermer dans une seule identification dichotomique (ambulant / fixe, informel / formel, ou espace public / privé), permet de comprendre que ce phénomène se trouve à l’intersection de ces dualités qui traversent l’ensemble de la société, de l’économie et de la politique urbaines. Les caractéristiques mêmes de la métropolisation rendent plus confuses ces identifications qui apparaissent de plus en plus comme des continuums (graphique 3). En faisant dépendre les transactions ambulantes de la mobilisation des acheteurs autant que des vendeurs, le modèle prédit le développement de l’ambulantage en phase avec la métropolisation contemporaine.

Graphique 3

Le commerce de rue/informel/ambulant dans les interstices socio-spatiaux de la métropole

figure im5

Le commerce de rue/informel/ambulant dans les interstices socio-spatiaux de la métropole



Légende :
– Interstices spatiaux : espaces de l’entre-deux, passages, seuils, interfaces (accès, escaliers, passerelles aériennes, passages souterrains, angles morts, limites matérielles de juridiction).
– Interstices de la formalité : marché noir, immigrés illégaux, contrebande, piraterie, corruption, sous-traitance, franchise, tolérances, innovations.
– Interstices de la mobilité : ruptures du mouvement, temps passifs et captifs dans les moyens de transport (à l’arrêt dans un véhicule individuel, entre deux arrêts dans les transports collectifs) et dans les salles d’attente, ruptures de charge et changements de modes de déplacement.

Conclusion : du client au citoyen

43 Les entreprises, comme les vendeurs à la sauvette, semblent avoir compris que pour accéder au marché des clients ambulants, l’offre commerciale assumée en et par des lieux (établissements) pouvait être complétée par des fonctions commerciales assurées directement sur ou par un voyageur (vendeur ou acheteur). L’ambulantage ne concerne pas toutes les formes de commerce et de service, mais révèle des transformations de l’urbanité liées à la métropolisation et à la mobilité généralisée. On observera ces transformations principalement dans les domaines de l’information-communication ou de l’alimentation, mais aussi dans l’accès à des biens de consommations ou dans le divertissement et la solidarité (mendiants, musiciens, jongleurs, quêteurs pour des causes humanitaires ou politiques). Notre modélisation invite à corréler :

44

  • le développement des transactions ambulantes et l’évolution des infrastructures de transport et commerciales vers moins de monofonctionnalité ;
  • la convergence des TICs « mobiles » avec les technologies de transport, leur banalisation avec le développement de « SICs » (services d’information-communication) mobiles qui contribuent à la territorialisation réticulaire et multiscalaire de leurs usagers ;
  • la redéfinition des rapports public-privé et de la sphère publique, tant dans les espaces de circulation que dans la sphère de la gouvernance et de la citoyenneté.

45 Ce dernier point ouvre une perspective que nous ne ferons qu’évoquer ici. En effet, l’ambulantage participe pleinement d’une expérience métropolitaine floue et fluide, composite et complexe, pour l’individu. Les lieux mêmes où celui-ci se réalise dans chacune de ses dimensions (travailleur, consommateur, électeur, activiste, ami, parent ou enfant, entre autres) coïncident de moins en moins et sont de plus en plus dispersés. L’unification de l’expérience citadine dépend de plus en plus des réseaux où les habitants trouvent les biens et les services ambulants que nous avons approchés ici, et en particulier les services d’information qui contribuent de plus en plus à structurer, via les médias, la publicité et la communication électronique, la représentation de la cité et la sphère publique comme une « communauté imaginée » [Anderson, 1983]. Or, la politique urbaine est structurellement inadaptée à cette évolution, car l’expression légale de la souveraineté politique des citoyens reste cantonnée à une petite aire : l’individu n’est électeur que dans la circonscription où il a sa résidence légale, qui ne correspond pas à l’espace dans lequel s’organise sa vie en tant que travailleur, usager des services et des transports, consommateur ou visiteur. L’ambulantage généralisé apparaît ainsi comme un défi à une gouvernance métropolitaine qui resterait conçue comme une structure de coopération entre institutions dont la compétence aréolaire et monoscalaire a de moins en moins de pertinence pour un citoyen dont l’expérience et les demandes se déploient, dans une territorialité réticulaire, floue et fluide, différenciée (et inégalitaire), du local au global.

Notes

  • [?]
    Université de Toulouse-Le Mirail & Centre National de la Recherche Scientifique (UMR Architecture Urbanisme Société, Laboratoire Théorie des Mutations Urbaines), jerome.monnet@laposte.net
  • [1]
    Une première version de cette modélisation a été présentée lors du colloque de Rio de Janeiro « Comércio, culturas e políticas urbanas em tempos de globalização » [2005] ; autres publications du réseau « Ambulantage entre Global et Local » : Commerce et mobilités urbaines… 2005 ; Monnet & Bonnafé 2005.
  • [2]
    Cf. Carvalho & Martins, Bitencourt & alii, « Mesa 2 » & Vieira & Mello, « Mesa 4 » in Comércio, culturas e políticas… 2005.
  • [3]
    Pour les transformations des modes de vie de la ville préindustrielle à la métropole postindustrielle, cf. Ascher 1995, 2005 ; pour les mutations commerciales de Paris de l’Ancien Régime à la Belle époque, cf. De Andia 2006 ; pour l’évolution des relations entre commerce et espace public à Mexico, cf. Aguayo & Roca 2004, De Alba et alii 2005 ; à Paris : Berrouet & Laurendon 2005 ; pour la diffusion des centres commerciaux intégrés, cf. Capron 1996, Longstreth 1997, Moretti 2005 ; pour le rapport entre commerce et loisirs, cf. Piolle 1979, Sabatier 2006.
  • [4]
    Site de l’entreprise [http://www.quala.com.co].
  • [5]
    « Toutes éditions confondues, Metro revendique « plus de 9 millions de lecteurs », ce qui le hisserait à la cinquième place des quotidiens les plus lus au monde, derrière l’allemand Bild et des journaux japonais […]. Metro est distribué dans treize pays (quatrorze avec la France) et vingt villes ». Association ACRIMED (Action-Critique-Médias)/Observatoire des médias, « Gratuits de tous pays », avril 2002 (http:// www.acrimed.org/article254.html).
  • [6]
    Entretien avec Michel Lallement, DG de À Nous Paris, recueilli par Thomas Bronnec, LExpansion.com, 18/02/2002 (http://www.lexpansion.com/html/dossiers/60/A56567.html). Cf. également : le quotidien gratuit 20 minutes, dont le titre signifie qu’il peut être lu durant un trajet en transport collectif, et qui cherche l’ « optimisation des emplacements [de distribution] en banlieue pour atteindre les lecteurs en début de trajet » (Présentation du système de distribution de 20 minutes en Ile de France. Géomarketing et chrono-marketing, juin 2003 [http://www.20minb2b.com/pdf/process_distrib.pdf]).
  • [7]
    Caroline Stamm, communication personnelle, printemps 2004.
Français

L’article porte sur le commerce de rue, ambulant ou informel, défini par les situations d’échange économique caractérisées par l’occupation temporaire ou précaire d’un espace de circulation ouvert au public. Il propose une ébauche de modélisation systémique et contextuelle des rapports entre les transactions ambulantes et la métropolisation, saisie du point de vue du client, dans la perspective de l’intensification des mobilités, de la multiplication des interstices socio-spatiaux, et d’une citadinité éclatée entre les différentes dimensions de l’expérience métropolitaine.

Mots-clés

  • commerce ambulant
  • vendeurs de rue
  • économie informelle
  • mobilités urbaines
  • expérience citadine
  • métropolisation
  • globalisation
  • modélisation

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Jérôme Monnet [٭]
  • [?]
    Université de Toulouse-Le Mirail & Centre National de la Recherche Scientifique (UMR Architecture Urbanisme Société, Laboratoire Théorie des Mutations Urbaines), jerome.monnet@laposte.net
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/03/2010
https://doi.org/10.3917/autr.039.0093
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