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La décentralisation comme condition du fonctionnement des systèmes d’enseignement

1 Le processus de décentralisation touche tous les pays et particulièrement ceux du Sud, où l’État est appelé à s’effacer partiellement pour faire place aux initiatives privées, qu’elles émanent de la population, des ONG ou d’opérateurs économiques. Il touche l’essentiel des secteurs traditionnellement considérés comme l’apanage de l’autorité publique. La décentralisation ainsi prescrite est en partie issue d’une conception aujourd’hui largement répandue du développement qui affirme que « l’essentiel des transformations nécessaires à l’avenir sera fait par les habitants de la région eux-mêmes, sous la pression des contraintes et incitations de leur environnement immédiat » [Cour, 1994 : 46]. Dans cette perspective, il s’agit de conscientiser puis de responsabiliser le citoyen afin qu’il devienne un partenaire majeur de toutes les actions visant le développement. Pour favoriser l’avènement de ce citoyen responsable, « c’est au niveau local assez naturellement[1] que doivent de préférence s’organiser les services publics essentiels et se gérer les problèmes institutionnels du quotidien » [ibidem]. La décentralisation vers les collectivités locales doit permettre la responsabilisation des populations tout en « soulageant l’autorité centrale » [ibidem].

2 Cette représentation de ce que serait le modèle idéal de développement pour les pays d’Afrique subsaharienne est devenue très commune. Elle s’est imposée notamment à la suite de l’échec des programmes dits d’ajustement structurel. En 1991, la Banque mondiale, dans son rapport Management Development : the Governance Dimension, recommande à l’Afrique une gestion plus efficace et transparente du secteur public. De nouveaux programmes visent à restaurer l’État de droit, à rendre les dirigeants politiques responsables, à équilibrer les dépenses publiques, à améliorer les méthodes de comptabilité et de vérification des comptes, à décentraliser les services publics. C’est à ce moment qu’apparaît le concept de « bonne gouvernance [2] », désignant un nouveau mode de gestion des affaires publiques fondé sur une logique entrepreneuriale. La gouvernance s’inscrit dans la théorie du public choice, qui voit, dans la multiplication d’agences publiques et privées coopérant sur la base de contrats, la solution aux problèmes rencontrés par l’action publique.

3 L’éducation est un domaine important du secteur public et, à ce titre, est visée par les prescriptions de décentralisation. L’OCDE, Club du Sahel, affirme d’ailleurs que « c’est seulement dans une décentralisation réussie de l’éducation [primaire], dans un contrôle rapproché des clients sur les services offerts, que la région d’Afrique de l’Ouest trouvera la capacité de faire face à grande échelle à ses besoins de formation » [Cour, 1994 : 37]. L’Unesco et son Institut international de planification pour l’éducation, que l’on sait critiques par rapport aux discours « économistes », arrivent à une recommandation assez proche. « Face aux phénomènes de crise qui affectent les systèmes d’enseignement de la région [d’Afrique de l’Ouest], il s’avère indispensable d’imaginer de nouvelles stratégies éducatives. Dans cette perspective, une des dimensions clés concerne l’articulation entre le système formel et les autres modalités d’éducation et de formation » [Atchoarena, Niameogo, 1998 : 13]. Le constat ainsi dressé par l’Unesco invite aux dialogues entre l’école formelle et les initiatives des autres opérateurs de terrain, qui ne peuvent se concevoir que dans un schéma où la décision est décentralisée.

4 Les analyses débouchant sur des recommandations en faveur de la décentralisation des systèmes d’enseignement s’appuient sur des arguments multiples. Le premier de ces arguments est que la situation est peu brillante, voire qu’elle s’aggrave avec la désaffection de l’école publique dans de nombreux pays. Si le taux net de scolarisation en Afrique de l’Ouest est passé, entre 1960 et 1991, de 25% à 50%, 80 millions d’enfants d’âge scolaire n’ont toujours pas accès à l’enseignement [Ursinov, 1999 : 32]. Le nombre absolu d’analphabètes augmente, même si leur part dans la population diminue, les budgets consacrés à l’éducation ne peuvent suivre le rythme de la croissance démographique. Les États ont donc été amenés à adopter une politique du « faire-faire » par laquelle l’autorité publique délègue à d’autres instances le soin de réaliser les missions qu’elle est incapable de prendre correctement en charge. Les initiatives privées, encouragées par les autorités publiques, se sont dès lors multipliées aux marges de l’école formelle, les ONG, qui bénéficient souvent d’une aide extérieure, ont acquis une place reconnue dans un paysage éducatif en recomposition constante [Charlier, Pierrard, 1999]. Dans ce schéma, la décentralisation n’apparaît pas comme un projet positif des pays du Sud ou des instances internationales qui les conseillent, mais comme une solution pragmatique permettant d’offrir une instruction à une plus large fraction de la population sans qu’il en coûte davantage au budget de l’État.

5 Un deuxième argument tient aux pressions de l’environnement immédiat dont il a été question supra. L’objectif est d’apprendre aux populations à vivre « économiquement  » là où elles sont implantées. Pour ce faire, les initiatives éducatives qui apparaissent devraient former à l’utilisation optimale (jusqu’à l’entrepreneuriat) des ressources locales. L’Unesco, même si la base de son argument est davantage culturelle et sociale, fait chorus et considère que « rendre l’éducation plus proche et plus pertinente du milieu dans lequel elle est dispensée constitue des principes essentiels » [Atchoarena, Niameogo, 1998 : 40]. Dans un contexte de désaffection vis-à-vis de l’enseignement public, des liens doivent être rétablis entre l’école, quelle que soit la forme qu’elle adopte, et les populations bénéficiaires. Son inscription harmonieuse dans le contexte économique, culturel et social local se présente alors comme une technique de gestion visant à pallier son déficit de plus en plus sensible de légitimité.

6 L’analyse et la compréhension du processus à l’œuvre dans les systèmes éducatifs des pays du Sud exigeraient un examen critique approfondi de tous les discours qui soutiennent la logique de décentralisation dans les divers domaines concernés par la gestion publique et de leurs contradictions internes. Les premières approches de cette production mettent en évidence la grande unanimité en faveur de la décentralisation en dépit des positions philosophiques parfois opposées de ceux qui la promeuvent. Ce paradoxe suggère que la décentralisation se nourrit d’arguments pluriels qui convergent vers un consensus apparent dont il resterait à vérifier la consistance. Les registres dont ces arguments sont issus sont nombreux, et l’accumulation des discours qu’ils génèrent en faveur de la décentralisation lui confère un statut de processus à la fois désirable et inéluctable, voire inévitable. Ce statut particulier nourrit en retour les arguments de ses défenseurs et promoteurs, qui appellent les populations et les responsables politiques à une nécessaire adaptation à ce qui se donne comme un horizon politique qui a la force de l’évidence indiscutable et disqualifient toute opposition en la présentant a priori comme anachronique.

7 Nous décrirons ici tout d’abord les conceptions du développement et de l’organisation décentralisée des services publics prônées par les acteurs majeurs que sont la Banque mondiale, le FMI et les pays qui, comme ces deux instances internationales, conditionnent leurs aides aux réformes institutionnelles réalisées par les pays assistés. Elles visent à retracer la genèse du projet de décentralisation, à rappeler ses étapes et les circonstances dans lesquelles il a pu apparaître et s’imposer. Puis nous proposerons un état des lieux de la décentralisation des systèmes d’enseignement au Burkina Faso, au Mali et au Sénégal. La comparaison des textes légaux qui l’organisent dans ces trois États permettra de prendre la mesure de leurs profondes convergences, même si chaque responsable national tend à les minimiser et présente la décentralisation comme un projet qui s’enracine dans l’histoire et les aspirations de son peuple. La mise en perspective du processus de décentralisation et de celui d’intégration régionale permettra de proposer une lecture globale des évolutions en cours. Enfin, nous présenterons quelques effets observables de la décentralisation, qui peuvent être perçus comme des enjeux importants.

Le contexte de la décentralisation dans les pays du Sud : la coopération internationale et l’économie mondialisée imposent une révision des rôles de l’État

L’approche développementaliste

8 Depuis les indépendances, les États d’Afrique subsaharienne bénéficient d’aides en provenance des États du Nord, dont les formes les plus communes que sont la coopération technique, les conseils d’experts, les injections d’argent s’inscrivent dans un modèle global de coopération au développement : une main-d’œuvre gratuite et qualifiée – par l’engagement et l’envoi de coopérants -, des idées – qui se veulent innovantes -, des prêts d’argent – conditionnés – sont fournis par les pays du Nord et visent « l’amélioration structurelle des conditions de vie des habitants du Sud [3] ». Si le contenu des politiques de coopération a connu quelques variations au cours du temps, leurs évaluations ex post ont montré leur relatif échec. En effet, les objectifs qui avaient été fixés plusieurs décennies plus tôt n’ont pas été atteints, l’amélioration structurelle des conditions de vie n’a pas été réalisée, au contraire, il apparaît qu’elles continuent à se dégrader.

9 Ce constat, fréquemment énoncé, a conduit à une remise en question des politiques de développement, qui a accompagné une évolution de la représentation même des relations entre les diverses parties du monde. L’effondrement de toutes les évidences sur lesquelles reposait la représentation du monde a imposé une nouvelle conception des relations entre les pays du Nord et du Sud. La coopération ne peut plus être envisagée comme un transfert unidirectionnel et vertical de moyens humains, matériels et financiers des « États riches » vers les « États pauvres [4] ». Ses nouvelles orientations l’ont amenée à se décentraliser, c’est-à-dire à travailler directement avec les populations concernées par les projets, à les responsabiliser, à s’appuyer sur le milieu, sur l’environnement dans l’objectif d’amorcer la dynamique d’un développement endogène durable et transparent [5]. Cette conception s’est affirmée, notamment lorsque l’appel à la démocratisation lancé par les bailleurs de fonds (notamment lors de la conférence de La Baule en 1990) a conduit à combattre aussi les comportements « captateurs » des responsables des « États kleptocrates » dont une des caractéristiques est « l’exploitation, par les groupes sociaux dominants (ou par les acteurs dominants du moment), de toute une série de rentes générées par l’insertion dépendante du sous-continent dans l’économie internationale : […] à l’époque contemporaine les alliances diplomatiques et militaires, la mainmise sur les cultures d’exportation, le pétrole et les importations, la gestion des financements extérieurs de l’aide » [Bayart, 1997 : 13].

Les approches économistes

10 Partant d’autres prémisses, les organisations financières de Bretton Woods (la Banque mondiale et le Fonds monétaire international) ont mené une réflexion similaire qui les a conduites elles aussi à revoir leurs méthodes. Dès le début des années quatre-vingt, face aux difficultés récurrentes des pays en voie de développement à assumer les coûts continuellement croissants des dettes qu’elles leur avaient permis de contracter, elles imposaient les programmes d’ajustement structurel (PAS). Ceux-ci avaient pour ambition de changer la structure des incitations de l’économie, constituaient des outils politiques du long terme et avaient pour objectif d’instaurer la croissance économique par l’allocation de ressources et l’augmentation de l’efficacité [World Bank, 1988 : 11]. Cependant, à la fin de la décennie, une étude du Fonds des Nations unies pour l’enfance conclut que l’expérience avec les programmes n’a pas été satisfaisante. Ils n’ont de toute évidence pas été capables de retourner l’évolution négative des conditions de vie des pauvres, pas plus qu’ils n’ont mené, dans la plupart des cas, à une reprise de la croissance économique » [Albanez et alii, 1989 : 1]. Cette évaluation sévère n’a pas été démentie par les institutions financières dont les PAS émanent. Au contraire, la Banque mondiale reconnaît elle-même, notamment dans son rapport sur L’État dans un monde en mutation. Rapport sur le développement dans le monde 1991, l’échec relatif des PAS et l’importance de leurs coûts sociaux.

11 Cette hésitation sur les manières efficaces de soutenir le développement des pays du Sud est apparue au moment où le monde se transformait en un « village planétaire » construit par des progrès scientifiques et technologiques qui ont bouleversé la perception de l’espace physique et du temps. L’économie est touchée directement par ces avancées, notamment par les technologies de l’information qui lui permettent de parachever sa transformation prévue vers la « virtualité ». Les analystes évoquent désormais la mondialisation des marchés, des entreprises, des capitaux.

12 Ce mouvement de globalisation a des incidences multiples et touche la totalité de la planète. Sa quête fondamentale est l’émergence du single global market place, c’est-à-dire d’un marché mondial unique, intégré et autorégulateur [Petrella, 1997]. En pratique, son avènement est conditionné par les volontés politiques nationales d’inscrire leur marché dans le marché mondial. Trois principes sont donc promus pour soutenir les cheminements vers le marché mondial : la libéralisation des marchés, la déréglementation et la privatisation de pans entiers de l’économie. Le rôle de l’Etat dans ce contexte est clair : il lui revient de faciliter l’intégration de l’économie locale dans l’économie mondiale [6]. Pour qu’il serve au mieux cet objectif, une série de prescriptions, aujourd’hui bien connues, lui sont imposées : pas d’inflation, balance des paiements équilibrée, équilibres budgétaires et donc réduction des déficits publics, réduction des dépenses publiques, en particulier des dépenses sociales, réduction de la pression fiscale sur le capital et incitations fiscales en faveur des investissements privés.

13 Sur ces prescriptions se greffent les nouvelles clauses sociales, environnements et démocratiques qui doivent être gérées par l’OMC. Les clauses sociales prévoient que des sanctions commerciales seront prises contre les exportations et les importations des pays qui ne respectent pas les droits sociaux des travailleurs définis par l’OIT. Les clauses environnementales sanctionnent les pays qui agiraient en dehors des règles élémentaires de respect de l’environnement telles qu’approuvées à Rio de Janeiro en 1992. Enfin, les clauses démocratiques permettent de sanctionner les pays qui ne respectent pas les Droits de l’homme tels que définis dans la Déclaration universelle. Les instruments de régulation du commerce mondial sont désormais utilisés pour résoudre les problèmes sociaux, environnementaux et démocratiques.

14 Ces changements et mutations, trop rapidement et sommairement esquissés, imposent la révision des rôles légitimes de l’État. Il perd la place centrale qui lui était précédemment dévolue dans la coopération au développement. Sous peine de disparaître ou d’être marginalisé, il lui est imposé par les instances financières internationales d’être l’initiateur de son affaiblissement. En toute hypothèse, l’État doit être allégé et restructuré, il doit s’adapter aux caractéristiques de son temps. Les dénonciations de son inefficacité se multiplient et se renforcent mutuellement. Les différentes écoles du monétarisme (école de Chicago, école autrichienne ou FMI), appuyées par les prix Nobel Friedman et Hayek, répètent depuis les années soixante-dix que l’État n’a pas réussi à créer un système d’incitations garantissant une économie efficiente et que seul le marché est à même de remplir ce rôle. Les études en administration montrent, depuis les années soixante, la nécessité de passer à une nouvelle économie politique qui rompe avec le paradigme bureaucratique classique pour adopter un public management orienté vers la gestion et la subsidiarité de l’État par rapport au marché [7]. Enfin, les plus fervents partisans d’un retrait significatif de l’État affirment que si les lacunes du marché (market failures) ont justifié jadis une intervention publique, les lacunes du gouvernement (government failures) justifient aujourd’hui la généralisation des mécanismes marchands [Datta-Chaudhuri, 1990]. Bref, tous ces courants critiques proclament l’urgence de trouver un système de gestion des affaires publiques mieux à même que l’État de réaliser démocratie, droits de l’homme et développement durable.

15 L’État du Sud n’échappe pas à ces critiques auxquelles il offre au contraire une cible de choix. Nous allons voir ci-après ce qui est aujourd’hui attendu de lui par les instances internationales, notamment de la Banque mondiale, puis les prescrits de l’école du public choice et de son new public management movement.

Les discours majeurs en faveur d’une révision des rôles de l’État

La Banque mondiale

16 Avec Finger [1998 : 57–75], il est possible de mettre en évidence les trois axes qui structurent les discours de la Banque mondiale par rapport à l’État : celui-ci doit être « capable », « proche des gens » et « efficace ». L’idée d’un « État capable » repose sur l’hypothèse selon laquelle le développement du marché créerait « un écart croissant entre les demandes adressées à l’État et sa capacité d’y répondre » [Banque mondiale, 1997 : 3]. Aussi, celui-ci ne devrait-il se soucier que de la satisfaction des besoins « essentiels », principalement la garantie de l’État de droit. La fourniture des services qui ne font pas partie de « l’essentiel » devrait quant à elle être confiée au secteur privé. Pour la Banque, il s’agit là « d’une adaptation du rôle de l’État à sa capacité d’action »[ibidem].

17 Pour soulager l’État et lui rendre la possibilité de se centrer sur ses missions essentielles, il convient d’impliquer les citoyens et les communautés, il faut « mobiliser l’opinion publique »[idem : 4]. Le rapport promeut la participation et le partenariat, même s’il en indique les dangers, s’il dénonce le « risque d’être l’otage d’intérêts particuliers » : « Une stratégie d’ouverture et de décentralisation n’est pas sans danger. Plus les possibilités de participation seront nombreuses, plus l’État sera sollicité »[idem : 12]. Ce qui pourrait finir par produire l’effet inverse de celui qui est recherché, l’État qui accepterait de répondre à toutes les sollicitations se diluerait et deviendrait moins « capable » et par conséquent moins « efficace ».

18 L’État « efficace » est donc, selon la Banque mondiale, réduit à « l’essentiel », à savoir assurer l’État de droit La logique prônée est celle du « tout au marché » qui vise la création de conditions favorisant son développement, appelées « facilitations [8] ». Dans cette perspective, il n’y a plus de contradictions entre État et marché :

19

« Nous sommes en train de constater que le marché et l’État sont complémentaires, puisqu’il incombe au second de mettre en place les bases institutionnelles nécessaires au fonctionnement du premier. En outre, pour attirer l’investissement privé, la crédibilité du gouvernement - c’est-à-dire la prévisibilité des règles et politiques publiques et la constance de leur application – peut être aussi importante que leur contenu.
[idem : 4]

20 Dans cette vision, il apparaît que, d’une part, la décentralisation, l’implication d’autres acteurs dans la fourniture des services sont des processus qui doivent être introduits de manière top-down, d’autre part que le seul rôle de l’État est de créer le marché et de veiller à son bon fonctionnement.

New public management

21 Le new public management ou nouvelle gestion publique (NGP) est un concept forgé et popularisé par Hood de la London School of Economics. Pour beaucoup d’auteurs, la NGP représente un changement paradigmatique significatif dans la gestion publique. Pour Osborne et Gaebler [1993], dont l’ouvrage Reinventing Government est devenu une référence commune dans ce domaine, elle constitue un nouveau cadre analytique pour comprendre et penser la gestion publique. Dans le même ton, Aucoin affirme : « What has been taking place in almost every Government in developed political systems and highly institutionalised administrative states is a new emphasis on the organisational design of public management » [1990 : 114].

22 Sans entrer dans le débat complexe sur les réels apports de la NGP, on ne peut que constater l’intérêt croissant qu’elle suscite, intérêt entretenu par les puissants lobbies qui la promeuvent dans les pays de l’OCDE. Les principes sur lesquels elle repose, les concepts et les outils destinés à réformer le secteur public qui lui sont associés font désormais partie des références obligées des décideurs politiques et leur influence sur la gestion des États risque de se perpétuer. La NGP peut véritablement être considérée comme une des tendances les plus marquantes des écrits sur l’administration publique au cours des années quatre-vingt-dix.

23 Finger [1998] montre que l’application de la NGP peut conduire à trois types de réforme qui visent, selon l’initiateur et le contexte, l’efficience financière, la qualité et le rapprochement entre le « client » et l’administration, la participation communautaire. La réforme idéale est naturellement celle qui intègre les trois orientations. C’est ce que propose le modèle de Osborne et Gaebler qui suggèrent de remplacer les traditionnelles bureaucraties administratives par la combinaison d’un gouvernement orienté vers le marché et d’une participation communautaire renforcée. Le marché est censé garantir l’efficience et l’efficacité, alors que la dévolution de pouvoirs aux communautés doit apporter l’aspect « chaleureux et affectueux » qui complète les mécanismes « impersonnels et sans pitié du marché [9] ». La décentralisation administrative et la création parallèle d’unités décentralisées et autonomes figurent parmi les recommandations de la NGP qui les considère comme des moyens efficaces de débureaucratisation.

La réappropriation de la doctrine décentralisatrice par les pays auxquels elle est imposée : l’écart entre l’idéal et le réalisable

24 Les arguments en faveur de la décentralisation évoqués ci-dessus sont multiples et convergents. Le contexte international actuel fait apparaître la décentralisation comme un outil dont l’utilisation doit permettre un accroissement de l’efficacité de l’aide au développement (voir le consensus développementaliste évoquésupra), des marchés (intégration des marchés locaux dans les marchés internationaux) et des services publics (voir la nouvelle gestion publique). Équipée d’une telle légitimité, elle s’impose maintenant à tous les États, qu’ils soient du Nord [10] ou du Sud, sans rencontrer de grandes résistances. La doctrine exige désormais que la responsabilité du développement soit placée sur les acteurs eux-mêmes. Les politiques éducatives doivent être des « politiques participatives » [Hallak, 1998], ce qui veut dire « qu’elles doivent être dessinées par l’État ou par des organisations financières internationales, mais aussi par le citoyen » [Ndoye, 1997 : 82].

25 Des observations réalisées au Burkina Faso, au Mali et au Sénégal, il apparaît que la décentralisation est un processus qui concerne toutes les affaires de l’État. Elle lui impose un partage de compétences – ordinairement désigné par le vocable « transfert de compétences » – avec des entités territoriales – selon leur nature et leur niveau, régions, provinces, cercles, communes (rurales ou urbaines), communautés de base – qui le constituent. Le processus de décentralisation n’est pas strictement technique mais comporte une dimension politique majeure, il exige une négociation complexe entre un centre et des périphéries qui, désormais, ont des pouvoirs et des moyens à se partager. L’implication est importante puisqu’il s’agit pour l’un de se dessaisir de prérogatives jusqu’ici siennes, et pour l’autre de les accueillir [11]. Ce dessaisissement et cet empowerment ont potentiellement des contenus et des formes multiples que la négociation doit permettre de délimiter et de préciser. Le processus tient donc pour acquis que les partenaires ont à la fois la volonté et la capacité de dégager des compromis pragmatiques et raisonnables. Il n’est toutefois pas certain que cette condition soit partout rencontrée. Un compromis ne peut être le fruit que d’une confrontation d’arguments, d’une négociation qui, pour se dérouler correctement, nécessite un lieu démocratique. En d’autres termes, la décentralisation, pour produire les effets positifs qui sont attendus d’elle, exige des conditions structurelles que les contextes où elle est appliquée ne garantit nullement. Il est également vrai que le processus de négociation et de concertation décrit ci-dessus serait qualifié d’idéal par la littérature concernant la décentralisation [12]. C’est sans doute une des raisons expliquant que d’autres vocables sont utilisés pour le décrire quand il ne répond pas à cet idéal : déconcentration, délégation, dévolution, privatisation et participation désignent des processus qui, pour s’inscrire dans la logique générale de la décentralisation, n’en reprennent que certains aspects partiels.

26 Ces éléments suggèrent qu’il n’est pas simple de mettre en œuvre un processus de décentralisation. Toutes les difficultés ne sont pas surmontées quand les compétences sont partagées, même si elles le sont dans le schéma le plus fonctionnel et le plus rationnel. Reste alors l’épineux problème de la communication entre le centre et la périphérie, dans des pays où l’administration est très massivement concentrée dans les capitales. La décentralisation demande paradoxalement un État puissant, capable d’aider les entités locales dans leur pilotage et de soumettre leurs actions à un contrôle a priori ou a posteriori[13]. Une décentralisation réussie nécessite qu’une administration cohérente dans les objectifs qu’elle poursuit et les méthodes qu’elle promeut la suive et l’accompagne. Idéalement toujours, cette administration devrait être elle aussi déconcentrée c’est-à-dire disponible sur les sites de décisions décentralisés (les services déconcentrés de l’État). Dans ce schéma optimal, loin de se retirer, l’État investit la totalité du territoire, devient omniprésent, fait sentir son emprise sur toutes les entités qui le composent. Cette fois encore, l’écart entre la réalité et le schéma optimal est très significatif.

Éléments d’évaluation du processus de décentralisation

Les similitudes des textes de loi organisant la décentralisation dans les pays sous analyse

27 La décentralisation contribue à redessiner le paysage éducatif des pays où elle est appliquée. Elle est définie par des textes de loi qui en énoncent le contenu formel et le projet officiel. Ces textes rencontrent aujourd’hui la longue pratique d’une éducation non formelle et informelle qui, certes, n’a pas attendu les lois de décentralisation pour exister mais qui se trouve aujourd’hui favorisée et légitimée par elles.

28 Au Sénégal, c’est le décret n° 96–1136 qui porte application de la loi de transfert des compétences aux régions, aux communes et aux communautés rurales en matière d’éducation[14]. Au Burkina Faso, c’est le décret n° 98–352/PRE qui promulgue la loi relative à l’organisation et au fonctionnement des collectivités locales qu’on appelle provinces, communes urbaines et communes rurales [15]. Enfin, au Mali, la loi n° 95–034 porte code des collectivités territoriales que sont les régions, le district de Bamako, les cercles, les communes rurales et urbaines [16]. Le tableau ci-contre permet de comparer le contenu des compétences transférées.

29 Ce tableau comparatif des compétences décentralisées permet les premiers constats. Il montre que la décentralisation de l’enseignement correspond au même schéma dans les trois pays analysés :

  1. Les compétences ont été décentralisées vers trois niveaux géographiques distincts ou trois types de collectivités territoriales.
  2. À chaque type de collectivité territoriale correspond un niveau particulier d’enseignement : l’enseignement préscolaire et fondamental est confié à la plus petite collectivité, l’enseignement secondaire à la plus grande.
  3. Les compétences décentralisées en matière d’enseignement concernent principalement (voire exclusivement) les infrastructures.
Ainsi, qu’elle s’applique au Sénégal, au Burkina Faso ou au Mali, la décentralisation de l’éducation obéit aux mêmes principes directeurs, les collectivités sont sollicitées pour apporter une aide matérielle qui prend des formes similaires dans les trois contextes. Certes, les mots utilisés pour désigner ces collectivités sont différents : selon le pays, il s’agit de « cercles », de « communes » ou de « communautés », de « provinces » ou de « régions », mais les réalités que ces différentes classes de mots recouvrent sont les mêmes et les tâches qui sont confiées aux différents niveaux de pouvoir quasiment identiques [17]. Ce constat renforce l’hypothèse selon laquelle la décentralisation a été imposée par le haut, à savoir par les organismes supranationaux, et que ses modalités ont ensuite été dictées par les États aux entités qu’ils englobent. L’idéal de négociation entre centre et périphérie n’a pas pu se réaliser, puisqu’aucune trace n’en est décelable dans les schémas d’application de la décentralisation de ces différents pays. Les recommandations quant aux manières efficaces de décentraliser l’enseignement viennent d’une même source et provoquent des réformes similaires dans les pays qui les appliquent [18].

Comparaison des compétences décentralisées

Sénégal Burkina Faso Mali 1. La région - participe à l’établissement de la tranche régionale de la carte scolaire nationale, du plan régional d’élimination de l’analphabétisme, de la carte linguistique de la région, du recensement exhaustif des métiers régionaux ; - assure l’équipement. l’entretien et la maintenance des lycées et collèges de son ressort ; - recrute le personnel d’appoint des lycées et collèges ; - alloue les bourses et aides scolaires ; - participe à l’acquisition de manuels et fournitures scolaires ; - participe à la gestion et à l’administration des lycées et collèges. 1. La province - participe à l’établissement de la tranche provinciale de la carte scolaire nationale ; - construit et gère les établissements secondaires autres que nationaux ; - prend en charge le développement de l’enseignement préscolaire et primaire dans les zones non érigées en communes ; à ce titre, elle acquiert, construit et gère des établissements préscolaires et primaires ; - prend en charge, avec l’appui de l’État, le développement de la formation professionnelle et de l’alphabétisation. 1. La région - assure la politique de création et de gestion des équipements collectifs de l’enseignement secondaire, général, technique et professionnel, ainsi que l’éducation spécialisée. 2. La commune - recense les besoins en équipement, entretien et maintenance des écoles élémentaires et des établissements préscolaires de la commune ; - recrute le personnel d’appoint des écoles élémentaires et des établissements préscolaires ; - alloue les bourses à son niveau ; - participe à l’acquisition des manuels et fournitures scolaires. 2/3. La commune (urbaine ou rurale) - prend en charge le développement de l’enseignement préscolaire et primaire dans le périmètre communal ; à ce titre, elle acquiert ou construit et gère des établissements préscolaires et primaires ; - contribue au développement de l’enseignement secondaire ; à ce titre, elle construit et gère des établissements secondaires ; - prend en charge le développement de la formation professionnelle et de l’alphabétisation ; - participe à l’élaboration communale de la carte scolaire. 2. Le cercle - assure la politique de création et de gestion des équipemel1ts nécessaires pour le second cycle de l’enseignement fondamental. 3. La communauté rurale - participe à l’acquisition de manuels et de fournitures scolaires des écoles élémentaires et des établissements préscolaires dans la limite des possibilités budgétaires· ; - recense les besoins en équipement, entretien et maintenance des écoles élémentaires et des établissements préscolaires de la communauté ; - assure l’exécution du plan d’élimination de l’analphabétisme : - recrute les alphabétiseurs et leurs formateurs ; - assure la collecte, la traduction et la diffusion de la tradition orale (contes, mythes, légendes … ) ; - promeut un environnement lettré axé sur (i) l’édition en langues nationales, (ii) la mise en place d’infrastructures et d’équipements ; - peut décider de la création d’une presse locale, parlée ou écrite en langues nationales ; - élabore un plan prévisionnel de formation visant les secteurs de métiers adaptés à la communauté rurale. 3. La commune - assure la politique de création et de gestion des équipements nécessaires à l’enseignement préscolaire, à l’alphabétisation et au premier cycle de l’enseignement fondamental.

Comparaison des compétences décentralisées

30 Le processus de décentralisation n’est pas la seule réforme suggérée de l’extérieur aux pays sous analyse. Les mêmes prescripteurs encouragent l’intégration régionale des pays de l’Afrique de l’Ouest dont le poids économique reste relativement modeste et qui sont très interdépendants.

« Aucun de ces pays ne peut ignorer ce qui se passe chez ses voisins ni espérer se développer durablement seul. L’espace de peuplement est régional, les marchés sont sous-régionaux, les bassins fluviaux et les corridors de transport intéressent plusieurs pays, les pays de la zone CFA partagent la même monnaie. Les stratégies d’aménagement du territoire et de décentralisation, qui sont nécessairement mises en œuvre au plan national, doivent donc être conçues en pleine conscience des impératifs régionaux, recommandent l’OCDE, Club du Sahel, l’Union européenne et la BAD ».
[Cour : 46]
Le projet politique pour cette partie du monde apparaît alors cohérent et logique. Il s’agit de créer un vaste marché régional et, pour ce faire, de réduire l’influence des États. Ceux-ci sont invités à se décharger sur les collectivités locales de certaines responsabilités touchant de près les populations (santé, éducation, aménagement). Ils sont appelés à perdre par ailleurs d’autres prérogatives au profit de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest. Le point d’aboutissement de cette logique verrait les États réduits au rôle d’instances d’évaluation de programmes décidés en dehors d’eux et de garants du fonctionnement libre des marchés.

Des problèmes organisationnels apparemment insurmontables

31 La nouvelle répartition des compétences amenée par la décentralisation fait peser les charges les plus lourdes sur les petites entités (communes rurales, urbaines et communautés de base). L’éducation fondamentale qui leur a été dévolue est en effet celle qui accueille le plus grand nombre d’élèves. C’est en outre sur elle que portent, depuis une dizaine d’années, la plupart des déclarations d’objectifs à atteindre en matière de progrès éducatifs. Ce qui signifie que c’est au niveau le plus local que devront dorénavant se réaliser lesdits progrès et que la responsabilité en incombe aux collectivités locales [19]. Il faut ajouter que la majorité des populations résident encore en zone rurale où les situations d’extrême dénuement sont les plus sévères. C’est donc dans ces zones que la question des stratégies éducatives à mettre en œuvre pour les groupes défavorisés se pose avec le plus d’acuité.

32 Cette manière de reporter la responsabilité de leur développement sur les groupes les moins bien équipés pour l’assumer semble plus que contestable, qu’on l’évalue d’un point de vue éthique ou fonctionnel. Elle construit des situations qui se trouvent aggravées par le caractère novateur – et qui paraît parfois un peu improvisé – de la décentralisation dans des pays qui ont une tradition centralisatrice. Ceux-ci ont dû créer de toutes pièces certaines de leurs nouvelles entités infranationales chargées de prendre en charge l’enseignement décentralisé. Les nouveaux élus locaux n’ont aucune expérience, ni en matière de gestion publique, ni a fortiori en matière de développement éducatif. Il est à craindre que nombre d’entre eux ne sachent ni lire, ni écrire et n’aient qu’une connaissance très limitée de l’enseignement [20]. Enfin, les volontés d’installer des professionnels compétents dans les administrations appelées à participer à la gestion de l’enseignement se heurtent fréquemment à des problèmes matériels. Au Mali, par exemple, les responsables locaux élus depuis plus de huit mois attendent toujours les directives concernant leurs fonctions et les moyens qui leur permettraient de travailler, car si la décentralisation signifie transfert de compétences, elle doit aussi s’accompagner, pour leur exercice effectif, d’un transfert concomitant d’argent. Au Sénégal, des directeurs d’école de Dakar nous confiaient, sept mois après la rentrée scolaire, qu’ils n’avaient toujours pas reçu de leur commune leur budget de fonctionnement pour l’année. L’eau était coupée, les toilettes inutilisables, les recours vains. Les lieux de responsabilités se sont multipliés au point d’occulter le système de décision ou de le rendre inopérant. Les directeurs évoqués ci-dessus sont totalement démunis. Quand ils interrogent les responsables communaux, ceux-ci leur rétorquent que la commune n’a pas reçu l’enveloppe pour l’exécution de ses prérogatives en matière d’éducation et ne peut donc allouer de budget de fonctionnement aux écoles. Quand ils s’informent au ministère, il leur est répondu que ces questions sont désormais du ressort exclusif des communes.

Des structures administratives pauvres et peu reconnues, incapables de contrôler un marché sauvage des initiatives éducatives

33 Le processus de décentralisation ne pourrait aboutir que si les collectivités locales étaient dotées d’une légitimité forte et d’un soutien populaire puissant. Des études socioanthropologiques tendent à montrer que tel n’est pas le cas et que ces collectivités sont des constructions artificielles, incapables de concurrencer les systèmes traditionnels de pouvoir. Vaughan [1995] constate que, si les chefs coutumiers exercent aujourd’hui moins de fonctions sociales et économiques en zone urbaine, ils restent des acteurs centraux en zone rurale où la parenté, le lignage, le clan continuent de dominer les relations sociales. Les collectivités locales resteraient « des coquilles vides spécialement en milieu rural ». Niasse [1997] montre en effet que dans les campagnes sénégalaises, les chefs de village, souvent héritiers des anciens chefs de terre, continuent d’être les véritables détenteurs du pouvoir local. Alors que le conseil de la communauté de base reste « discret voire introuvable » [idem : 9], le chef de village continue de jouer un rôle prééminent à propos de questions aussi vitales que l’allocation de la terre, la gestion des ressources naturelles, le règlement des conflits, etc. Le conseil de la communauté de base ne semble donc pas faire l’objet d’un attrait particulier, contrairement à la chefferie villageoise traditionnelle, objet de toutes les convoitises. « En règle générale, les autorités coutumières de premier plan visent plutôt la fonction de chef de village et se contentent souvent de "se faire représenter" au sein du conseil par des personnalités de second rang (frère, fils) » [idem : 10].

34 Ces communautés locales doivent pourtant désormais intervenir pour que l’enseignement dispose des infrastructures nécessaires à sa bonne organisation. Beaucoup d’entre elles n’ont pas les moyens financiers d’assumer cette charge et sont dès lors conduites, ou contraintes, à établir des partenariats avec des organisations de la société civile, essentiellement des ONG. Dans cette logique, les échanges et la coopération avec les pays du Nord sont encouragés très ouvertement tant au Sénégal qu’au Burkina Faso et au Mali. Le champ ainsi ouvert a permis que les initiatives alternatives d’éducation – dont certaines sont bâties sur le procès explicite de l’enseignement officiel [Charlier, 1999 b] – se développent de manière exponentielle.

35 La plupart des initiatives d’enseignement émanant des ONG visent les jeunes qui n’ont pas eu accès à l’école, ou qui l’ont quittée prématurément, c’est-à-dire essentiellement ceux qui trouvent leurs moyens de subsistance dans le secteur informel urbain et le milieu rural agricole. Ainsi, l’objectif de ces initiatives peut être double. Il s’agit d’une part de doter les individus des connaissances de base et des compétences nécessaires pour pouvoir entrer en transaction avec le secteur dit moderne. D’autre part, former ces jeunes dont tout porte à penser qu’ils sont définitivement inscrits dans le secteur informel peut constituer un moyen efficace de consolider et de légitimer ce secteur et d’en exploiter les potentialités. Dans cette perspective, l’enseignement proposé cherche à valoriser les savoir-faire constitués par l’expérience collective et à répondre aux besoins locaux directement perceptibles par les populations.

36 Dans le système décentralisé qui se met en place, l’enseignement demeure une ressource rare, mise au service des individus et des communautés qui ne peuvent en bénéficier que s’ils participent à son bon fonctionnement et à son financement. Les investissements consentis par la collectivité doivent lui amener des retours, évalués moins en termes politiques qu’économiques. Même dans les discours officiels, l’enseignement cesse d’être présenté comme un droit garanti par l’État pour assurer sa cohésion et intégrer ses membres. Il n’est plus envisagé que dans sa dimension d’outil mis au service du développement économique auquel les individus et les groupes qui sont prêts à contribuer à son financement peuvent recourir. Par ailleurs, le foisonnement d’alternatives éducatives, sans compter le nombre croissant de lieux dédiés par priorité à l’enseignement religieux coranique (les daaras au Sénégal [Ndiaye, 1998] ou les medersas au Mali [Gérard, 1997]), qui ont chacune leurs méthodes pédagogiques propres, leurs contenus particuliers et leurs finalités éducatives spécifiques, pose des problèmes de certification et d’équivalence. Des enjeux sociaux et économiques sont attachés à ce problème et il serait naïf de les ignorer.

37 La multiplication des flux économiques et financiers, l’inscription des États dans des processus de régionalisation, le cadre transnational des échanges entre entreprises ont contribué à élargir la base de recrutement des travailleurs et à accroître la mobilité géographique du travail. Cette évolution a une double conséquence. D’une part, elle entraîne l’exigence nouvelle de pouvoir comparer les compétences des travailleurs, d’autre part, elle attise les concurrences entre les systèmes et institutions d’enseignement, entre les pouvoirs qui les financent ou les hébergent.

38 Ces deux phénomènes ne sont nullement spécifiques aux pays du Sud. Partout, ils se jouent sur un même fond doctrinal qui considère que l’action étatique doit se limiter à garantir le bon fonctionnement du marché et à promouvoir le dynamisme économique, et donc les investissements sur le territoire. Le marketing a trouvé là un nouveau champ d’application, la « vente des territoires qui doivent attirer (ou retenir) des capitaux très mobiles ». Vinokur [1999 : 2], évoquant l’Afrique de l’Ouest, affirme que les instituts spécialisés dans la publication d’indicateurs de « compétitivité des territoires » mentionnent principalement : le bas coût, le haut niveau de compétence et le faible degré de syndicalisation de la main-d’œuvre, le bas niveau de la pression fiscale sur les profits, le faible rapport dépenses publiques/PIB, et des éléments d’infrastructure (administration, système bancaire, légal et judiciaire efficace, sécurité, information, moyens de transport, etc.) [21].

39 Pour rendre possible l’évaluation rapide par les entreprises des compétences de la force de travail, une standardisation de la certification au niveau mondial devient nécessaire (l’internationalisation des tests et des standards de compétences scolaires). Or, dans les pays étudiés, aucune instance officielle n’est chargée d’évaluer. et de comparer la qualité des apprentissages produits par les multiples initiatives éducatives. Ce manque total d’informations sur le rendement réel des écoles alternatives n’apparaît pas problématique si ceux qui y sont formés se destinent exclusivement au marché local de l’emploi ou au secteur informel. Il reste cependant peu acceptable qu’il les confine dans le local et l’informel. Cette situation est évidemment favorable aux entreprises qui créent leurs propres centres de formation permettant la validation directe des acquis ; les lois de décentralisation les y autorisent, voire les y encouragent. Peut-on toutefois accepter d’accorder le monopole de la certification des initiatives alternatives d’enseignement au secteur privé en sachant que cette situation placerait l’enseignement sous l’influence d’enjeux à court terme déterminés par le marché du travail ou d’anticipations à long terme sur ce que devraient être les finalités de l’éducation telles que définies par les entreprises ? En d’autres termes, faut-il, pour favoriser un hypothétique développement économique, aménager les systèmes d’enseignement de sorte que les lois du marché s’y implantent de façon optimale ? Pour notre part, et sans nous faire l’avocat des idéologies de la centralisation, nous ne pouvons cacher nos craintes à l’égard des conceptions qui font de l’éducation un marché. Aujourd’hui, les énergies se dispersent en une myriade de mouvements centrifuges. Il faut sans doute les faire converger vers un but commun, qui doit faire l’objet d’un large débat démocratique.

40 *

41 Les discours développementaliste et économique affirment que l’éducation dans les pays en voie de développement trouvera nécessairement dans la décentralisation les remèdes aux maux qu’on lui diagnostique depuis trop longtemps. La décentralisation est présentée comme la voie à suivre puisqu’elle permet la responsabilisation du citoyen/client de l’école et son implication directe dans la gestion des affaires publiques qui le concernent. Ce nouveau mode d’organisation de l’enseignement, nous disent les défenseurs de la décentralisation, devrait montrer à tous les rôles civiques qu’ils ont à jouer, dont le moindre n’est pas de prendre part au débat politique. L’idée, même si elle n’est plus très neuve, jouit encore d’un attrait certain. Néanmoins, son application dans la réalité en indique les limites : d’une part, la décentralisation ne fait l’objet d’aucun débat démocratique, d’autre part, l’influence réelle que peut exercer le citoyen africain modal sur les décisions que prendront pour lui les organisations internationales peut être considérée comme nulle.

42 La décentralisation s’impose aujourd’hui aux citoyens à travers les lois qui l’organisent. Mais le politique ne peut pas se contenter de gouverner par décret, il est attendu de lui qu’il prenne l’initiative de concertations, qu’il livre son état des lieux et sa vision de l’avenir puis, surtout, qu’il ouvre le débat – et chacun de ces éléments contribue à sa légitimité. Les syndicats d’enseignants, les instituteurs, les inspecteurs de l’enseignement, les associations de parents que nous avons rencontrés sont prêts à soutenir le processus de décentralisation, dont ils mesurent à quel point il est inéluctable, mais souhaiteraient y voir introduire des aménagements et des correctifs, parce que certaines situations sont objectivement insupportables ou absurdes. S’ils ne sont pas entendus, il est à craindre que la décentralisation entraîne bientôt de sévères conflits sociaux et produise des effets déstructurants profonds et durables sur les pays où elle est introduite. La décentralisation de l’enseignement est un remède à des maux bien diagnostiqués et aujourd’hui connus. Les effets secondaires d’une thérapie aussi brutale ne sont pas, quant à eux, clairement identifiés, c’est pourquoi il importe de contrôler le processus de décentralisation pour en corriger les excès et éviter qu’il ne provoque trop de dommages aux systèmes éducatifs.

43 L’école n’a pas toujours existé sous la forme que nous lui connaissons aujourd’hui. Elle est le produit d’évolutions historiques, politiques et sociales complexes et traduit la volonté des hommes d’organiser les formes de transmission des compétences et des connaissances. L’universalisation de la scolarisation est une volonté affirmée des hommes depuis plusieurs décennies. Ceux qui se sont battus en sa faveur l’ont fait au nom d’un idéal démocratique, et avec la pleine conscience du fait que l’école recherche au moins deux autres effets importants : (i) la cohésion sociale par une uniformisation des savoirs et des valeurs [22], (ii) l’éducation qui proclame la perfectibilité de l’être humain et la possibilité pour celui-ci de devenir un être autonome, à condition de faire usage de sa capacité de penser. L’éducation du citoyen ne peut dès lors pas se ramener à l’apprentissage d’une gestion des ressources économiques, qui n’est qu’une partie de la mission qui lui est confiée.

Notes

  • [*]
    GRESAS (Groupe de recherche sociologie action sens), facultés universitaires catholiques de Mons (FUCAM), Belgique.
  • [1]
    C’est nous qui soulignons ces mots.
  • [2]
    De l’anglais governance. La notion renvoie à l’idée de pilotage, suggère l’action de guider ou de diriger dans un environnement incertain
  • [3]
    C’est du moins en ces termes que les objectifs de la coopération au développement continuent d’être définis.
  • [4]
    Rappelons au passage que les aides publiques européennes n’ont fait que stagner depuis les années quatre-vingt et ce malgré les différentes déclarations gouvernementales. À l’époque, les pays de l’OCDE s’étaient engagés à consacrer au moins 0,7% de leur PNB à la coopération au développement Entre 1968 et 1998, la Belgique a maintenu son aide dans un intervalle de 0,33% à 0,42% du PNB. La France consacre 0,6% de son PNB à l’aide publique au développement (pays DOM-TOM inclus). Il apparaît que seuls certains États Scandinaves et les Pays-Bas ont respecté le pourcentage annoncé de 0,7%.
  • [5]
    Il y a sur ce point un consensus des acteurs du développement, tant les institutions financières internationales que les ONG s’accordent sur ces termes : transparence + accountability + sustainability = efficiency. Cette conception du développement a donné naissance à la coopération dite « décentralisée » introduite officiellement par la convention de Lomé IV en 1997.
  • [6]
    Le 20 mai 1995, The Economist proposait de « désinventer l’État ». Par ailleurs, le président de la Bundesbank allait plus loin, le 3 février 1996, lors du World Economic Forum à Davos (Suisse), en affirmant que les gouvernants devaient savoir qu’ils étaient désormais soumis au contrôle des marchés financiers.
  • [7]
    En 1993, le vice-président américain Al Gore présente un rapport intitulé Creating a Government that Works Better and Costs Less : From Red Tape to Results (« Créer un gouvernement qui travaille mieux et coûte moins : de la paperasse aux résultats »), cité par S. Allemand, « Gouvernance. Le pouvoir partagé », Sciences humaines, 101, janvier 2000. L’accent est mis sur le produit, les résultats et les performances réalisés par le moyen d’une gestion adéquate du personnel, des ressources et des programmes [Aucoin, 1995], Parmi les classiques de cette approche : Buchanan et Tullok [1962], Downs [1967], Niskanen [1971], Oison [1965].
  • [8]
    La Banque mondiale écrit elle-même à propos de la Chine : « Le gouvernement doit commencer par servir les marchés en créant l’infrastructure légale, sociale, physique et institutionnelle nécessaire à leur croissance rapide » [Banque mondiale, 1997]. Par ailleurs, et pour une application à l’échelle mondiale, voir également le projet d’Accord multilatéral sur l’investissement (AMI) de l’OCDE (www.citizen.org ou wivw.monde-diplomatique.fr/md/dossier/ami).
  • [9]
    L’ouvrage, devenu classique, de Peter et Waterman, In Search of Excellence [1982], a particulièrement mis en avant le thème de la proximité du client et a introduit la nécessité d’une approche inspirée du privé et d’une nouvelle culture organisationnelle de la performance au sein du secteur public.
  • [10]
    Van Haecht [1998] a montré que les politiques éducatives déployées aujourd’hui dans les pays du Nord s’inscrivaient dans un même référentiel peu critiqué, dont la décentralisation ne constitue qu’un élément.
  • [11]
    Le terme anglais empowerment est précis et signifie, littéralement, « le gain en pouvoir ».
  • [12]
    Pour un approfondissement du concept, voir Conyers [1983, 1984], Jaglin [1993], Klugman [1994], Mawhood [1974], Page [1991], Slater [1989].
  • [13]
    Le Sénégal, le Burkina et le Mali voient leurs entités décentralisées soumises à un contrôle a priori comme c’est d’ailleurs le cas pour tous les pays francophones de la zone. Le contrôle de tutelle a posteriori est constaté dans les pays anglophones.
  • [14]
    République du Sénégal, Primature, Le Recueil des textes de la décentralisation, avril 1997 :199-209.
  • [15]
    Journal officiel du Burkina Faso, 38,17 septembre 1998 :5990-6010.
  • [16]
    Présidence de la République du Mali, Mission de décentralisation et des réformes institutionnelles, Lois et Décrets de la décentralisation, mars 1999 :15-43.
  • [17]
    Les discours des responsables de la décentralisation de l’enseignement dans ces trois pays sont à ce point identiques qu’ils affirment tous les trois une « volonté d’originalité ». Or, nous le voyons, les contenus et les modalités de ces décentralisations sont les mêmes, ce qui atteste la puissance des prescriptions qui sont imposées aux décideurs nationaux.
  • [18]
    Cette situation n’est pas le propre des pays du Sud. L’analyse des politiques éducatives de la Communauté française de Belgique montre, de la même manière, un alignement sur les prescriptions internationales [Charlier, 1999 a ; 2000].
  • [19]
    Ce qui signifie aussi que s’il n’y a pas progrès, les collectivités locales n’auront qu’à s’en prendre à elles-mêmes. C’est le prix de la responsabilisation. Ces collectivités héritent donc de compétences qu’elles n’ont pas revendiquées, qu’elles ne sont pas nécessairement capables d’exercer, mais seront pénalisées si elles échouent dans les missions qui leur sont confiées.
  • [20]
    L’expression de pareille crainte revient de manière récurrente dans les témoignages recueillis tant chez les inspecteurs de l’éducation que chez les syndicalistes du monde enseignant. L’un d’entre eux nous confiait sur un ton agacé : « Vous donnez l’éducation dans les mains de gens qui ne savent même pas joindre quotidiennement les deux bouts. Naturellement, ils vont laisser l’éducation de Côté au profit du travail. » Le sentiment d’acteurs de terrain est que l’État abandonne progressivement l’enseignement aux collectivités locales, qui vont s’en décharger sur la société civile qui sera incapable de le maintenir. Leurs craintes sont du reste fondées. Les évaluations effectuées en Bolivie, où le processus de décentralisation est plus avancé et où les collectivités territoriales ont pris la responsabilité de l’enseignement, montrent que les demandes émises par les acteurs locaux font apparaître une hiérarchie de priorités qui se configure de la manière suivante. Bénéficient de la plus grande priorité, par ordre d’importance, la santé, l’agriculture et les projets multisectoriaux. Les projets les moins mis en avant, toujours par ordre d’importance, sont l’urbanisme, l’habitat et, en dernier lieu, l’éducation. Ainsi, les demandes populaires, comme il est possible de le constater, se centrent pour l’essentiel sur des objectifs de production et laissent en friche le système éducatif. Voir Tuchschneider [1997] pour un approfondissement de la question.
  • [21]
    Les publications du puissant groupe européen que représente la Table ronde des industriels européens en matière d’éducation vont explicitement dans ce sens [cf. L’ Éducation à l’horizon 2000,1995].
  • [22]
    L’école doit aussi contribuer au sentiment d’appartenance à la collectivité large dont elle est le produit.
Français

Résumé

La décentralisation des systèmes d’enseignement dans les pays du Sud est promue explicitement depuis le début des années quatre-vingt-dix par les grandes instances financières internationales telles que la Banque mondiale et le FMI. Suivant la logique libérale qui caractérise ces organisations, il est demandé aux États d’entamer un processus de « dégonflement » ou de « débureaucratisation » en transférant aux « localisés » des compétences en matière de gestion publique. Il s’agit entre autres choses de « responsabiliser » la base pour la transformer en « base citoyenne ». Cette recommandation aux apparences nobles que viennent créditer les tenants de l’école de la New Public Management ou Nouvelle Gestion publique n’est pas sans poser de problèmes dont on voit mal a priori comment la base, c’est-à-dire aussi les plus faibles économiquement, politiquement et culturellement, pourra les surmonter.
En outre, et c’est un phénomène nouveau, le discours en faveur de la décentralisation semble faire l’unanimité pour la majorité des acteurs du développement d’habitude éloignés des thèses libérales. Ainsi, le processus décentralisateur profite d’un consensus inhabituel qui n’est jusqu’ici pas remis en question. Pire, la décentralisation apparaît être un processus topdown qui ne suscite aucun débat démocratique. Elle est imposée d’en haut et s’organise progressivement ; ce qui la rend paradoxale eu égard à l’objectif de « responsabilisation citoyenne » dont elle veut être l’instrument.

Mots-clés

  • éducation
  • décentralisation
  • globalisation
  • glocalisation
  • New Public Management
  • Banque mondiale
  • Afrique subsaharienne
  • Sénégal
  • Burkina Faso
  • Mali
English

Decentralised teaching systems : analysis of the discourses and stakes in education in Senegal, Burkina Faso, and Mali

Decentralised teaching systems : analysis of the discourses and stakes in education in Senegal, Burkina Faso, and Mali

Since the beginning of the 1990s, the major international funding agencies, such as the World Bank and the International Monetary Fund (IMF), have been promoting the decentralisation of teaching systems in Southern countries. In keeping with the general logics which characterises these organisations, the states were asked to introduce down-sizing and to reduce their bureaucratic structures by transferring public management responsibilities to local representatives and, at the same time, encouraging the local offices to take more « responsibility » in order to create « grass-roots citizenship ». Despite the noble appearance of this proposai, backed up by the supporters of the school of New Public Management, its introduction creates problems which do not seem likely to be easily overcome by the weakest economically, politically and culturally sections of the population. In addition, and this is a new phenomenon, the views in favour of decentralisation appear to have received unanimous acceptance from the majority of development players, who usually give such liberal ideas a wide berth. Thus the process of decentralisation benefïts from an unusual consensus which is yet unchallenged. Of greater concern is the fact that decentralisation seems to be a top down process, rousing no democratie debate. Its introduction is imposed from the top and organised progressively, making it para-doxical with regard to the objective of « making the citizen responsible », of which it means to be the instrument.

Keywords

  • education
  • decentralisation
  • globalisation
  • glocalisation
  • New public management
  • World Bank
  • Sub-Saharan Africa
  • Senegal
  • Burkina Faso
  • Mali

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Jean-Émile Charlier
Jean-François Pierrard [*]
  • [*]
    GRESAS (Groupe de recherche sociologie action sens), facultés universitaires catholiques de Mons (FUCAM), Belgique.
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 02/01/2012
https://doi.org/10.3917/autr.017.0029
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