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« La nature est écrite en langage mathématique », affirmait Galilée. Se pourrait-il que l’histoire trouve le meilleur de sa traduction dans la langue de la géographie où elle se déploie ? C’est tout l’enjeu – le défi ? – de cet ouvrage somptueux et sans équivalent à ce jour dans les sciences sociales. À partir de la question centrale de l’insurrection camisarde en Languedoc, des années 1702-1715 en son expansion la plus large, s’évaser, par cercles excentriques croissants, jusqu’aux tout débuts de la Réforme, la grande dissidence matricielle. Et revenir ensuite à la guérilla des huguenots, spasme ultime d’insoumission, en son contexte historique propre, ses batailles, ses prédicants, ses prophètes. Une saisie à chaque fois précise, jusqu’à la minutie parfois, et si attentive à la singularité qu’elle dénote que telle carte, tel graphique, tel parcours chiffré, telle complexité de fléchages et d’itinéraires ravissent le regard et répondent immédiatement au devoir d’analyse et à l’impératif d’interprétation. Car il n’est pas d’un côté l’historien J.-P. Chabrol, et d’un autre côté J. Mauduy le géographe, qui accorderaient leurs compétences pour un ouvrage duel. Non. Mais une exacte unité, qui fait de tout texte un élément aussitôt lisible dans la carte qui l’authentifie, et de toute carte, le tracé en effet d’un texte qui le signe. Dans sa Préface, Philippe Joutard ne manque pas de rappeler la maxime de Napoléon : « un bon croquis vaut mieux qu’un long discours ». Que dire alors de cet ouvrage, où le lecteur dispose en un seul moment et du texte essentiel et de sa signature au sol…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 23/08/2014
- https://doi.org/10.4000/assr.25427