Article
134-85
La reliure agressivement rouge de ce livre contraste violemment avec le sujet de cette étude : le blanc comme signe identitaire de la France. En tant que tel, le pari est réussi. Le lecteur est d'emblée gagné à la conviction de l'auteure que les couleurs sont par excellence, selon le terme de Krzysztof Pomian, des sémiophores, des signifiants objectivés. Plus précisément, la couleur blanche (car assez paradoxalement le blanc, absence de couleur, agit bien comme couleur héraldique positive dans ce contexte, par opposition aux coloris d'autres puissances, tel le rouge espagnol) apparaît comme un produit symbolique de l'État, au même titre que les armoiries, les cérémonies ou les drapeaux. À partir de la fin du xvie siècle, la couleur blanche, concrétisée dans l'écharpe blanche, affirme sans conteste l'identité et la présence de l'État de France sur le champ militaire et dans les cérémonies publiques. Mais est-ce bien l'État qui porte cette couleur ? Ne serait-ce pas plutôt la communauté nationale ? En fait, l'étude de D. Turrel réunit deux lignes de recherche qui se croisent et s'éclaircissent sans arrêt : d'une part, sur un plan général, la production symbolique de signes identitaires pendant les guerres de religion par les différents partis en lice, en particulier les communautés catholique et protestante ; d'autre part, et plus précisément, l'appropriation de la couleur blanche par le parti qui s'avère gagnant, et partant le transfert de ce sémiophore sur l'État qui sera investi par ce parti…
Auteur
- Mis en ligne sur Cairn.info le 01/06/2009
- https://doi.org/10.4000/assr.3636