CAIRN.INFO : Matières à réflexion
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1 L’histoire de l’administration a longtemps tenu une place ambiguë au sein de la recherche historique française. De manière incontournable et singulièrement opportune, elle a surtout permis d’analyser l’évolution des structures du pouvoir politique ou les reconfigurations des élites à différentes échelles. Tour à tour outil de l’histoire sociale ou de l’histoire politique du pouvoir, elle est restée un moyen plus qu’une fin, un signifié plus qu’un signifiant. C’est ce constat que reprend Pierre Legendre lors du colloque organisé en 1972 par l’EPHE à l’Institut des sciences administratives lorsqu’il déplore les lacunes d’une histoire de l’administration « qui n’avait pas encore obtenu tout à fait son visa » [1]. Ainsi, souvent confondue avec l’histoire de l’État et de ses agents, elle a été largement traitée et simultanément peu interrogée pour elle-même. De cette tradition découlent plusieurs écueils qui ont contribué à élaborer une histoire administrative au détriment d’une véritable histoire de l’administration, de la pensée administrative ou de l’acte d’administrer. Trois de ces biais peuvent ici être évoqués : l’intégration de cette histoire au sein du récit souvent téléologique de l’affirmation de l’État, son association à l’histoire du droit et à une doctrine juridique portée par des discours par principe auto-légitimant et enfin, son éclatement entre différentes disciplines de recherche (sociologie, histoire, science politique, droit) et différents champs rigidifiés par la périodisation au sein des universités françaises (Antiquité, Moyen-Âge, époque moderne, époque contemporaine).

2 Le premier écueil apparaît, dans le contexte historiographique actuel, comme une évidence. Alors que les publications se multiplient pour brocarder un récit national européocentré et téléologique, il paraît tentant d’appliquer cette lecture critique à l’histoire administrative. En effet, de l’administration provinciale romaine à l’affirmation de l’administration moderne à partir du XIIIe siècle, du développement des monarchies administratives européennes aux réformes territoriales contemporaines, l’administration a majoritairement été envisagée par les historiens comme un cadre structurant, une institutionnalisation territorialisée d’un régime de souveraineté, autrement dit, un canal d’encadrement et de contrôle donnant sens et réalité à la domination politique. Si cette approche correspond à une réalité effective, elle a également souvent enfermé l’administration dans un modèle de lecture diffusionniste du pouvoir politique, associant en une même logique administration et domination politique et par conséquent efficacité administrative et puissance souveraine. Ainsi, l’histoire de l’administration, contrainte par cette dialectique première, s’est longtemps cantonnée à refléter l’histoire de l’affirmation ou du déclin des États et des Empires, légitimant certains modes de gouvernement, en invalidant d’autres au tribunal de l’efficience économique et de la continuité historique. L’affirmation occidentale de l’État-nation et la rationalisation bureaucratique du XIXe siècle ont ainsi influencé les travaux sur l’administration, a fortiori depuis Max Weber, unissant l’émancipation démocratique des sociétés occidentales, l’État de droit et la professionnalisation administrative. Le risque étant alors de « raconter » la mise en place d’une administration légitime et opérante pour mieux légitimer les régimes politiques contemporains. C’est ainsi qu’en France, le modèle républicain s’est trouvé durablement associé à une structure administrative centralisée, supposée traduire la tradition française théorisée par Tocqueville (du missi dominici au préfet) et la culture dite « jacobine » d’un contrôle du territoire depuis Paris [2].

3 Ce premier biais s’articule à un second écueil directement lié à la nature des sources de l’histoire administrative et à l’influence de la doctrine juridique sur les historiens du droit. Dans son introduction à une histoire politique de l’administration française, Grégoire Bigot met ainsi en garde contre une histoire de l’administration centrée sur le récit descriptif des institutions qui, selon lui, revient à « prendre le risque de commémorer plus que d’expliquer la figure de l’État qui se profile derrière elle » [3]. Il rejoint les travaux de Pierre Bourdieu sur ce que celui-ci nomme la « fiction sociale » de l’État et la doxa qui en constitue le pouvoir symbolique [4]. L’affirmation simultanée de la science administrative et de la doctrine juridique au XIXe siècle a ainsi collaboré à construire un discours sur l’administration, porté conjointement par les agents de l’État et les juristes et légitimant, par le supposé pragmatisme des sciences de gouvernement, la séparation entre politique et administration. Le langage de l’administration devenant donc un discours de l’État appuyé sur l’autorité de l’expertise et plus largement un discours sur l’État excluant progressivement l’administration de la contingence historique. Et si l’approche sociologique de Weber et de Durkheim, la sociologie historique des années soixante-dix, la généalogie foucaldienne et l’approche historique par les pratiques des acteurs ont largement influencé les travaux sur l’administration, force est de constater qu’historiens, historiens du droit et politistes peinent encore à s’émanciper de ce biais.

4 Le constat est peut-être encore plus flagrant en France où le dialogue entre les disciplines s’avère souvent compliqué [5] et où la traditionnelle périodisation des champs de recherche impose des césures lourdes de conséquences. Ainsi, la Révolution française représentant une frontière institutionnelle entre l’histoire moderne et l’histoire contemporaine, l’étude de l’administration s’y trouve presque inévitablement coupée entre deux prismes interprétatifs : l’absolutisme avant 1789 et l’affirmation de l’État-nation à partir de l’Empire, soit la Révolution pensée comme une finalité ou comme une origine. L’administration révolutionnaire, exclue d’une réelle perspective diachronique, est alors confinée au rôle de contre-modèle (rejet de la monarchie absolue ou cause de la centralisation napoléonienne). On ne peut que déplorer la rareté des travaux associant le XVIIIe et le XIXe siècles pour interroger les circulations complexes entre les dynamiques sociales, les pratiques administratives (locales et nationales), les modes de gouvernance et l’histoire des idées politiques. En effet, affranchie du récit national et envisagée de manière diachronique, l’administration est un objet qui permet la rencontre entre l’histoire sociale, l’histoire politique et l’histoire du droit mais aussi des échanges forcément fructueux avec la science politique et la philosophie. Ce besoin de renouvellement historiographique dépasse le simple champ de l’histoire de l’administration et peut même s’intégrer dans les aspirations d’une « nouvelle histoire des idées politiques » actuellement exprimées en France [6].

5 C’est dans cette logique que s’est élaboré le présent numéro avec comme ambition de réévaluer la tension reliant ces deux objets : la Révolution et l’administration. L’épisode révolutionnaire ayant souvent été exclu de la continuité supposée de l’État, il fut logiquement tentant de dissocier les deux termes et d’assigner l’administration à la définition d’un cadre (stabilité) alors même que la Révolution était, par principe, envisagée comme la subversion du cadre (instabilité). Cédant alors à l’anachronisme d’une séparation politique/administration inopérante au moment de la Révolution, les synthèses historiques majeures écrites sur l’épisode révolutionnaire ont exprimé une lecture paradoxale : tout en reconnaissant la consécration de la souveraineté nationale par les nouvelles institutions politiques, elles ont également dissocié le peuple politique et les organes administratifs, autrement dit la Nation et l’État, les pratiques démocratiques et les pratiques administrantes. Le fort renouvellement historiographique lié au bicentenaire, l’affirmation scientifique d’une histoire croisée des pratiques [7] et les questionnements posés par le concept même d’État depuis les années quatre-vingt [8] ont bien évidemment permis d’apporter un autre regard sur les liens entre Révolution et administration. Des travaux nombreux et novateurs, croisant histoire politique et histoire sociale [9], ont notamment étudié l’action administrative afin d’approcher la Révolution mise en actes. Pour autant, ces travaux sont souvent restés limités à des champs circonscrits (théories constitutionnelles de l’administration [10], administration économique [11], administration militaire, administration ministérielle, etc.) ne permettant pas toujours d’aborder frontalement une problématique plus large : Peut-on observer une action administrative de nature révolutionnaire ? Or ce questionnement comporte un réel intérêt heuristique dans la mesure où il pose deux questions simples : d’une part comment la Révolution a-t-elle révolutionné l’administration ? D’autre part, et de façon complémentaire, comment l’administration a-t-elle administré la Révolution ?

6 L’ambition de cette réflexion collective est alors de penser simultanément la stabilité et l’instabilité, le cadre et la subversion et d’approcher ainsi ce qui fut l’une des questions centrales de la période révolutionnaire et de l’Empire : comment articuler la radicalité de la rupture politique à la nécessaire stabilité du corps social ?

7 Entre 1789 et 1815, l’administration n’est pas simplement un outil du pouvoir politique, elle est constitutionnelle. Ainsi, étudier la nouvelle définition de l’action administrative, c’est approcher une histoire plus large des idées politiques, c’est tenter de comprendre la singularité d’une vision révolutionnaire du monde qui, par-delà les antagonismes internes, propose une nouvelle conception du pouvoir, du territoire et de la souveraineté politique. En ce sens, l’administration révolutionnaire est à la fois le produit de la Révolution et la condition de sa mise en œuvre. Cependant, si administrer la Révolution est chose possible lorsque celle-ci est inaugurale, l’enjeu devient tout autre quand elle se mue en processus. En échappant inévitablement au volontarisme politique qui l’a fait naître, la Révolution française transforme la nature même de l’acte administratif. C’est tout l’intérêt d’une étude centrée sur une période d’instabilité politique que d’extraire, de fait, l’action administrative du prisme de la domination étatique. Dans un contexte de redéfinition constitutionnelle permanente, l’action administrative se dilue parmi une multiplicité d’acteurs, elle est simultanément action et réaction, exécution et régénération, constitutionnelle et révolutionnaire. Elle se confronte alors à plusieurs phénomènes structurels qui seront interrogés dans ce numéro : la reformulation consécutive de l’action gouvernementale par la Monarchie constitutionnelle, la République et l’Empire, la tension entre les tentatives d’une action administrative « révolutionnaire » et l’affirmation progressive d’une professionnalisation de corps et d’une science administrative associée et enfin, la redéfinition géographique et conceptuelle des frontières nationales qui, par la conquête, redéfinissent le lien administration/territoire.

8 Proposer plusieurs regards sur la pluralité de l’action administrative tout au long d’une période large encadrant l’événement révolutionnaire (1780-1830) permet ainsi d’observer une double dialectique à la fois classique et potentiellement riche : celle qui interroge d’une part l’articulation entre les ruptures et les continuités et celle qui éclaire d’autre part les échanges entre les principes politiques et les pratiques administratives. Au regard des différentes contributions réunies dans ce numéro, cette double dialectique interroge les effets de l’épisode révolutionnaire sur la définition en devenir de l’administration contemporaine selon deux modalités : par l’étude de ce que l’on pourrait nommer l’histoire de la « pensée administrative » et par l’observation des acteurs et des outils mobilisés.

1.  Pour une histoire de la pensée administrative 

9 Encore à l’état de prospective, il semble possible ici de défendre le potentiel d’une histoire de la pensée administrative dans le sens entendu par Foucault, c’est-à-dire approchée sous l’angle de la problématisation. L’administration peut en effet être envisagée comme un objet problématique et l’histoire de la pensée administrative comme l’histoire « de l’ensemble des pratiques discursives ou non discursives qui fait entrer quelque chose dans le jeu du vrai et du faux et le constitue comme objet pour la pensée » [12]. Il s’agit moins de faire la généalogie de l’administration contemporaine que de retrouver les problèmes envisagés par les acteurs et les réponses qu’ils y ont associées. Pour reprendre les propos de Judith Revel, « le véritable exercice critique de la pensée s’oppose à l’idée d’une véritable recherche méthodique de la « solution », et consisterait plutôt à « retrouver les problèmes » [13].

10 Cette démarche est une alternative possible à une histoire linéaire de l’administration qui occulte les tâtonnements politiques, les expérimentations institutionnelles et la marche saccadée de la pensée de gouvernement derrière la continuité théorique du cadre administratif. Rechercher les problèmes envisagés par les acteurs de l’histoire permet de souligner la différence profonde entre les enjeux administratifs de 1789, 1793, 1795 et 1804. Sous la Monarchie constitutionnelle, l’impératif est bien de trouver le moyen le plus pertinent d’appliquer uniformément la loi, alors qu’en 1793 il s’agit davantage de contrôler le territoire et à partir de 1795 d’assurer la stabilité du régime en place. Entre 1789 et 1815 on est finalement passé d’une administration du bouleversement à une administration de l’ordre et c’est ce changement de problème qui permet de faire émerger l’intérêt d’une histoire de la pensée administrative. C’est également un moyen d’éviter les écueils d’une lecture anachronique qui, aux problèmes des auteurs contemporains, fait artificiellement répondre les solutions pensées par les acteurs du passé. Ainsi, on peut supposer que les enjeux gouvernementaux de la France du XIXe siècle (contrôle de l’ordre social, stabilisation du régime politique et contrôle des frontières) préside à la lecture tocquevillienne d’une histoire de l’administration centrée sur le paradigme centralisateur. Paradigme que Tocqueville critique et institue dans un même mouvement. Dans l’incapacité d’historiciser les enjeux d’une pensée administrative alternative à cette lecture, il réduit la Révolution à « une époque transitoire et assez peu intéressante qui sépare l’Ancien régime administratif du système d’administration créé au Consulat » [14]. Cette lecture a posteriori s’impose majoritairement chez les auteurs qui se sont intéressés aux théories de l’administration. Ainsi, l’administration révolutionnaire fut systématiquement envisagée non comme la réponse à un problème contextualisé mais bien comme une mauvaise solution donnée à l’impératif gouvernemental. Considérée comme utopique et anarchique en 1790, terroriste et « extraordinaire » en 1793, transitoire et équivoque en 1795, elle ne s’incarne dans aucune théorisation pérenne et induit cette conclusion définitive : il n’y aurait pas eu de réelle pensée de l’administration dans les différentes versions du projet révolutionnaire.

11 Cette vulgate s’impose durablement à partir du XIXe siècle, notamment parce qu’elle trouve écho au sein de plusieurs courants historiographiques et intellectuels. Elle est relayée par des auteurs libéraux rejetant parallèlement l’« anarchie » et le « terrorisme » au profit d’un « juste milieu » favorable à la prospérité, elle valide la description de la « domination bureaucratique » wébérienne et donc les théories de la modernisation de l’État [15] et enfin, elle alimente une lecture marxiste de la Révolution qui réduit l’administration à une structure d’élites dévolues aux intérêts de la bourgeoisie. De plus, au niveau historiographique, le désintérêt et même la méfiance de l’école des Annales à l’égard du cadre étatique n’ont pas permis de déconstruire une théorisation linéaire de l’administration restée prépondérante pendant près de deux siècles. En définitive, au lieu d’être envisagée comme une période de reconfiguration et de conceptualisation fondamentale dans l’histoire de la pensée administrative, la séquence 1780-1804 a longtemps été considérée comme une parenthèse.

12 Il paraît aujourd’hui pertinent de rompre avec cette continuité supposée et de s’inscrire dans les orientations de recherche exposées depuis une quinzaine d’année au profit d’une intégration de la discontinuité [16], d’une confrontation entre les théories et les pratiques et d’une complexification des cadres d’analyse. L’administration en tant que catégorie doit notamment être questionnée pour distinguer le pouvoir exécutif, la bureaucratie administrative et la fonction publique [17]. Cet effort de précision peut être favorisé par des recherches qui délaissent la vision monolithique de l’administration comme cadre au profit d’une approche par les pratiques de gouvernement [18]. Par ailleurs, le traumatisme occidental de la Seconde Guerre mondiale et l’interrogation collective sur les conditions d’exécution des politiques d’extermination et de terreur ont forcément fragilisé le lien entre rationalité administrative et progrès humain. Cette prise de conscience a participé d’un processus, commun à l’ensemble des sciences humaines et sociales, qui interroge depuis plusieurs décennies le concept même de modernité [19] et, de ce fait, le sens politique de l’action administrative [20].

13 En définitive, aborder le lien entre administration et processus révolutionnaire par le biais d’une approche historique de la pensée administrative nous semble une perspective potentiellement fructueuse. Cette démarche rejoint diverses initiatives, portées depuis plusieurs années par les historiens de la Révolution française, pour étudier un des problèmes majeurs identifiés par les révolutionnaires eux-mêmes : le rapport singulier entre la Révolution, l’État et l’application de la loi, notamment dans sa dimension administrative [21]. Dans le présent numéro, plusieurs articles rejoignent ce champ de recherche. Grégoire Bigot rappelle ainsi que l’administration étant constitutionnelle, elle « réalise la nation » en même temps qu’elle assure l’exécution de la loi. Confrontant les impératifs auxquels sont contraints les constituants au vocabulaire qu’ils mobilisent, il montre le décalage entre l’enjeu d’une prompte exécution de la loi et la réticence à consacrer constitutionnellement la « force du gouvernement ». Loin d’envisager les textes normatifs comme de simples reflets de la réalité administrative, Grégoire Bigot éclaire les liens entre les références sémantiques des législateurs et les reconfigurations politiques du processus révolutionnaire.

14 Gaïd Andro quant à elle, tente d’approcher la singularité du projet administratif de 1789-1790 en replaçant le travail du comité de Constitution dans le contexte des expériences de réformes administratives du XVIIIe siècle et dans l’héritage des principes philosophique du droit des gens et du pouvoir fédératif. En réévaluant ce qu’elle considère comme une véritable « audace politique », l’auteure tente de mettre au jour la conception originale que se font les premiers révolutionnaires d’une application démocratique de la loi au sein d’un territoire politique régénéré dans ses principes.

15 Enfin, en se concentrant sur la période consulaire et impériale, Igor Moullier opère un travail d’historicisation de la science administrative. Par l’étude des premières codifications (Fleurigeon, Bonnin, etc.), il fait apparaître l’adéquation entre la reconnaissance du pouvoir réglementaire de l’administration et la dépolitisation volontariste de ce « nouvel art de gouverner ». En confrontant cette nouvelle science sociale aux pratiques effectives au sein des préfectures et des territoires conquis, il fait émerger la lente maturation d’un discours normatif sur l’administration, indissociable de son contexte d’élaboration.

2.  Administrer, une histoire d’hommes et de pratiques.

16 Depuis plus d’une vingtaine d’années, l’historiographie a placé la focale sur la diversité sociale des administrateurs, l’évolution de leurs pratiques professionnelles et leur historicisation, étant entendu que « l’administration n’est pas une forme éternelle, actualisée selon des modalités différentes en fonction des époques, il est indispensable de comprendre ce qui est apparu et disparu avec sa naissance [22] ». À rebours de certaines inclinaisons de la science politique, la prudence des historiens face à l’idéal-type webérien de l’état bureaucratique rationnalisé redouble [23]. Dans les années quatre-vingt, les historiens modernistes se sont lancés dans la réalisation de grandes prosopographies des serviteurs de l’État, dont certains résultats les plus notoires furent de brouiller la frontière théorique entre le service de l’État et l’intérêt personnel et d’insister sur le déploiement d’une micro-physique des affrontements en vue d’investir les institutions de l’État royal [24]. De vieux clichés comme l’opposition entre la commission et l’office vénal en sont sortis définitivement invalidés. Privilégier les pratiques professionnelles davantage que les stratégies sociales, déplacer le regard des grandes compagnies d’officiers vers les « administrateurs moyens », fut l’enjeu historiographique d’une génération suivante d’historiens. L’attention plus grande qu’ils portèrent à la formation de ces « administrateurs moyens », que sont « les titulaires de charges non annoblissantes mais honorables » comme « le personnel des élections, des sénéchaussées, des présidiaux et des greniers à sel, des eaux et forêts et de la maréchaussée » fit ressortir des mutations notoires au premier rang desquelles figure un processus de professionnalisation continu du XVIIe au XVIIIe, fondé, pour l’essentiel, sur la maîtrise de savoirs techniques, la disposition d’un capital social et symbolique fort et l’apparition d’un cursus honorum et du concept de carrière [25]. Pour autant, une telle évolution n’empêcha pas ces administrateurs moyens de l’Ancien Régime de subir les affres du déclassement professionnel et social dans la seconde moitié du XVIIIe siècle.

17 Ces travaux des modernistes ont, par contrecoup, mis en évidence la double rupture historique que représente le siècle des Lumières d’une part, la Révolution et l’Empire de l’autre. Basculement des Lumières tout d’abord, avec l’apparition d’une nouvelle culture professionnelle fondée sur le mérite et le savoir, au cours de laquelle l’administrateur se fait ingénieur, géomètre et statisticien et plus seulement juriste [26]. Années décisives de ce XVIIIe siècle pendant lesquelles l’outillage conceptuel des pratiques administratives s’étoffe considérablement avec l’affirmation de la polysémie des concepts de « police » et celui de « service public » [27]. Il reviendra à la Révolution et à l’Empire d’initier, dans un double mouvement paradoxal de rupture et de continuité, une clarification décisive de ces deux concepts, préalable à l’apparition d’une administration moderne, spécialisée et rationnalisée. « Le service public en vient à désigner une activité d’utilité générale, celle de l’État et des collectivités locales » que le régime Directorial expérimente en matière économique par des dispositifs de contrôle réglementaire des délégations de service, notamment en matière de transport [28].

18 De telles innovations ne purent se réaliser sans une reconfiguration des relations entre le politique et l’administratif tout au long de la décennie révolutionnaire. L’un des intérêts de l’article d’Éric Szulman sur l’administration de la navigation intérieure pendant la Révolution tient en son analyse de la succession de trois périodes distinctes dans l’évolution de ces relations, contredisant toute interprétation téléologique de la construction de la puissance administrative du prétendu modèle jacobin français, dont le terme se solda toutefois par une rupture majeure : la perte du pouvoir des administrateurs/ingénieurs des Ponts et chaussées au bénéfice du législateur sur la politique de transport fluvial ! Sur l’ambiguïté constitutive des rapports entre le Politique et l’Administratif sous la Révolution, Virginie Martin présente quant à elle un cas d’école : comment une enquête statistique envisagée comme un outil au service de la diplomatie commerciale du Directoire est détournée de son usage administratif à des fins politiques en 1797 (an V) !

19 Que l’histoire politique de la Révolution française invente l’administration moderne vaut évidence : dès 1789, l’abolition des privilèges sonne le glas de la vénalité des offices, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen entérine les principes de méritocratie et le libre accès de tous les citoyens aux emplois publics « selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents » (article 6) et la départementalisation du territoire national crée des ressorts administratifs nouveaux et durables. Enfin, en vertu du principe de la souveraineté nationale, l’administrateur est désormais élu. Ce qui ne va pas sans causer de problèmes structuraux entre des hommes constamment tiraillés entre deux légitimités : celle d’exercer leur fonction qui consiste à faire exécuter la loi d’une part, celle de représenter – et implicitement de défendre – ceux qui l’ont élu à cette fonction administrative de l’autre. Ce dilemme est particulièrement saisissant pour les procureurs généraux syndics de 1790 à 1795 puis pour les commissaires du Directoire de 1795 à 1799, jusqu’à ce que le Consulat abandonne le principe électif au bénéfice des nominations lors de la création du corps préfectoral [29]. Déborah Cohen apporte une lumière nouvelle sur la condition de ces administrateurs de la République élus, tenus d’accepter l’exercice de fonctions administratives qu’ils ne briguaient pas forcément et qu’ils ont parfois exercées au péril de leur vie et de leurs biens, souvent partagés entre leurs préoccupations domestiques et l’exigence d’universel que leur imposait l’idéal type de l’administrateur désintéressé et dévoué au bien commun. À la suite des travaux de Catherine Kawa [30] et à l’encontre de certains clichés littéraires, elle n’en poursuit pas moins la réhabilitation des commis, ces ronds-de-cuir, ces nouveaux « administrateurs moyens » de la Révolution, qui bien que nommés et rémunérés à la différence des administrateurs élus, construisent des parcours professionnels dans lesquels compétences techniques et idéal du service public ne sont pas absents.

20 La question des ruptures et des continuités dans le recrutement du personnel administratif en-deçà et par-delà la Révolution intéresse depuis plusieurs décennies l’historiographie. Des continuités, parfois surprenantes, avaient été déjà établies [31]. Plusieurs articles de ce dossier les confirment à travers le parcours de certains individus – tel ce Cadet de Chambine, premier commis du bureau des Ponts et chaussées de 1769 à 1792, nommé en l’an IV à la tête de ce département si essentiel à l’administration des voies navigables – ou au travers de l’analyse socio-historique de certaines institutions impériales, comme celles financières du département de Gênes où se côtoient, selon Matthieu de Oliveira, « à la fois des vieux routiers des Finances révolutionnaires et impériales, passés par d’autres départements réunis qu’ils ont contribués à « franciser », des rescapés des administrations financières de l’ancienne République, de nouveaux venus aspirant à faire carrière ou encore quelques Français de l’Intérieur, jeunes ambitieux faisant leurs classes avant de poursuivre leur parcours dans la France de la Restauration ».

21 L’étude des institutions administratives, telle que Guy Thuillier et ses élèves l’avaient développée dans les années soixante-dix-quatre-vingt [32] a connu cette dernière décennie un regain d’intérêt quoique doublé d’une nette inflexion historiographique qui fait désormais la part belle à leurs modes de fonctionnement et plus encore aux interactions qu’elles entretiennent avec l’opinion, la société et l’ensemble des pouvoirs – économiques, scientifiques, économiques, etc [33]. Les articles de Matthieu de Oliveira et Éric Szulman, en présentant pour le premier l’emboîtement des administrations financières et fiscales qui encadrent le département « laboratoire » de Gênes sous l’Empire, pour le second les différents organismes administratifs en charge de la navigation intérieure de 1790 à l’an VII s’inscrivent dans cette démarche. Ils mettent en exergue la difficile délimitation du champ de compétences entre administrations. Ce dysfonctionnement structurel, Virginie Martin le souligne à son tour avec force en rappelant que la rivalité entre ministère de l’Intérieur et ministère des Relations Extérieures en l’an V est à l’origine de la production d’une grande enquête administrative destinée aux négociants de la République. L’impérieuse nécessité de saisir le dialogue entre l’administration et le corps social – ou une de ses fractions – pour comprendre l’élaboration des politiques économiques est au cœur de la démarche d’Anne Conchon et de Pauline Lemaigre-Gaffier. À front renversé, de manière originale, elles étudient les requêtes que les entrepreneurs français ont adressées au Bureau consultatif des arts et manufactures du ministère de l’Intérieur de 1804 à 1830 pour obtenir des gouvernements successifs la restauration du titre et du privilège de « manufacture » impériale puis royale, et les moyens et les argumentaires déployés par cette administration pour y répondre défavorablement.

22 Que l’on pense à François de Neufchâteau ou à Joseph-Marie de Gérando, plusieurs grandes figures d’administrateurs ont attiré dernièrement l’attention des historiens [34]. Afin de mieux comprendre la portée et le sens de leur expérience historique administrative, leur formation intellectuelle, leurs réseaux de sociabilité et leur inscription dans le champ philosophique, culturel et politique de leur temps ont fait l’objet de fines analyses. Ne peut alors manquer de se poser la question de leur rapport à la fabrique des savoirs administratifs les plus novateurs d’un siècle au cours duquel se forgent et se généralisent l’enquête empirique fondée sur l’observation, le dénombrement statistique et la carte topographique conçue non plus comme une image mais comme un outil (songeons aux premières tentatives cadastrales) [35]. Le statut nouveau des outils administratifs, leur variété et la nécessité de leur perfectionnement pour accroître l’exigence de transparence et de rationalité de l’administration révolutionnaire et impériale est au cœur de ce dossier, qu’il s’agisse de la grande enquête sur le commerce de l’an V (Virginie Martin), de celle sur les manufactures royales de 1814-1815 (Anne Conchon et Pauline Lemaigre-Gaffier) ou de la rédaction de grands codes administratifs normatifs diffusés dans toutes les parties de l’Empire (Igor Moullier et Matthieu de Oliveira).

23    

24    

25 « L’observation historique du travail administratif », c’est-à-dire les pratiques professionnelles quotidiennes, le travail concret de l’administrateur en cours de réalisation, la production de ses documents, leurs évolutions liées au jeu des interactions permanentes entre les administrateurs et leur hiérarchie d’une part, entre les administrateurs et les administrés de l’autre, offre de nouvelles perspectives historiographiques pour comprendre à la fois les modalités de formation de ce nouveau groupe professionnel que sont les fonctionnaires et le processus d’autonomisation technique de l’administration [36]. Certains historiens y ont décelé la formation d’un éthos bureaucratique, quand d’autres y voient les prémisses de la formation d’une classe sociale [37]. En ce sens, le travail de bibliographie, de constitution d’archives ou de rédaction de notices biographiques participe pleinement de cette production d’un discours normatif sur la société [38]. Sur le geste de l’administrateur, la variété de ses productions et des techniques mises en oeuvre, plusieurs articles de ce dossier reviennent encore, témoignant du dynamisme actuel d’une historiographie française de l’administration en plein renouvellement.

Notes

  • [1]
    Pierre Legendre, « Histoire du droit et histoire de l’administration » dans Histoire de l’administration française depuis 1800. Problèmes et méthodes, Actes du colloque de l’EPHE (1972), Genève, Librairie Droz, 1975, p. 83.
  • [2]
    Pour une lecture critique de cette théorie voir Michel Biard, Les lilliputiens de la centralisation. Des intendants aux préfets : les hésitations d’un « modèle français », Seyssel, Champ Vallon, 2007.
  • [3]
    Grégoire Bigot, L’administration française. Politique, droit et société, Paris, LexiNexis, 2014 (2e éd).
  • [4]
    Pierre Bourdieu, Sur l’État. Cours au collège de France (1989-1992), Paris, Le Seuil, 2012, p. 185. Accompagné d’autres auteurs, Bourdieu renvoie même l’État au rang des « illusions historiographiques » dont il est nécessaire de s’extraire (Pierre Bourdieu, Olivier Christin, Pierre-Étienne Will, « Sur la science de l’État », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 133, 2000, p. 3). En ligne
  • [5]
    Gilles Pollet et Renaud Payre identifient ainsi des « habitus professionnels » qui segmentent les champs de recherche et provoquent des « impensés disciplinaires », (Gilles Pollet et Renaud Payre, « Analyse des politiques publiques et sciences historiques : quel(s) tournant(s) socio-historique(s) ? », Revue française de sciences politiques, vol. 55, 2005/1, p. 134).
  • [6]
    Arnault Skornicki et Jérôme Tournadre, La nouvelle histoire des idées politiques, Paris, La Découverte, « Repères », 2015. Les auteurs y déplorent les « retards » français en ces termes : « Peu institutionnalisée, éclatée entre plusieurs disciplines, comme la philosophie, les lettres le droit et la science politique, l’histoire française de la pensée politique souffre d’un défaut d’espace de discussion autonome sur ses attendus épistémologiques et méthodologiques, rendant difficile la réception de traditions étrangères » (p. 6).
  • [7]
    Cette approche historiographique doit beaucoup à l’influence de Michel Vovelle et à des travaux qui envisagent toujours la Révolution française comme « un champ d’expérimentation exceptionnel, à la rencontre du social et de l’émergence du politique » (Michel Vovelle, « Du tout social au tout politique », Congrès international des sciences historiques (Montréal, 1995), AHRF, n° 310, 1997/4, p. 554).
  • [8]
    Au-delà de la démarche de Bourdieu, il faut faire référence aux programmes de recherche du CNRS menés à l’échelle européenne et dirigés par Jean-Philippe Genet sur la « Genèse de l’État moderne » entre 1984 et 1993. Voir Jean-Philippe Genet, « Genèse de l’État moderne. Les enjeux d’un programme de recherche », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 118, 1997, p. 3-18. En ligne
  • [9]
    Il faut rappeler ici l’apport de la socio-histoire qui, depuis les années quatre-vingt-dix et sous l’influence de Gérard Noiriel, a initié de nombreuses approches croisées entre histoire et sociologie notamment sur la genèse des fonctionnements institutionnels. Ce croisement était d’ailleurs appelé de ses voeux par Philippe Minard dans son plaidoyer pour une « histoire sociale des institutions » qui mette en lumière « les effets performatifs des procédures institutionnelles de saisie du réel » (Philippe Minard, « Faire l’histoire sociale des institutions : démarches et enjeux », introduction à la table ronde de la SHMC, Bulletin de la SHMC, n° 3-4, 2000, p. 122). Le propos est repris par Jean-Pierre Jessenne et Hervé Leuwers lorsqu’ils soulignent les apports historiographiques profonds d’une « nouvelle histoire socio-politique du passage des temps modernes à l’époque contemporaine » (Jean-Pierre Jessenne et Hervé Leuwers, « Introduction », AHRF, n° 359, 2010/1).
  • [10]
    Voir les travaux de Michel Troper sur le droit constitutionnel, de Michel Verpeaux sur le pouvoir réglementaire ou de François Burdeau sur le droit administratif et l’histoire de l’administration.
  • [11]
    La question économique a été particulièrement approfondie par les travaux de Philippe Minard, Dominique Margairaz, Louis Hincker, Anne Conchon, Vida Azimi ou encore Serge Aberdam. Voir notamment les actes du colloque de Paris (1989) : État, finances et économie pendant la Révolution française, Comité pour une histoire économique et financière de la France, 1991.
  • [12]
    Michel Foucault, Dits et écrits, tome IV, texte n° 350.
  • [13]
    Judith Revel, « Michel Foucault : discontinuité de la pensée ou pensée du discontinu ? », Le portiQue [en ligne], n° 13-14, 2004. Les propos d’Arnault Skornicki et Jérôme Tournadre rejoignent la même lecture lorsqu’ils rappellent que « la pensée politique n’est pas tant l’expression transparente du social qu’une réplique aux conflits qui traversent la société ; moins un reflet qu’une réponse à un contexte de lutte déterminé » (Arnault Skornicki et Jérôme Tournadre, La nouvelle histoire des idées politiques, op. cit, p. 13).
  • [14]
    Cité par Louis Fougère dans l’introduction de l’ouvrage L’administration de la France sous la Révolution, Paris, Droz, 1992, p. 3.
  • [15]
    Max Weber, « La domination légale à direction administrative bureaucratique », dans Économie et société, Paris, Plon, 1971 (1re éd. 1921).
  • [16]
    Laure Quennouëlle, « Où va l’histoire de l’État ? », Le Mouvement social, n° 200, 2002/3, p. 73-79.
  • [17]
    Voir notamment Dominique Margairaz, « L’invention du “service public” à la fin du XVIIIe siècle. Entre “ changement matériel” et “ contrainte de nommer” », RHMC, n° 52, juillet-septembre 2005, p. 10-32 ; Pierre Serrand, « Administrer et gouverner. Histoire d’une distinction », Juspoliticum. Revue de droit politique [en ligne], n° 4, juillet 2010. C’est globalement tout un renouvellement de l’histoire du droit qui peut être ici souligné et qui favorise l’interrogation épistémologique sur les cadres d’interprétation. Ainsi, la publication en ligne des revues Juspoliticum depuis 2008 puis Clio@thémis depuis 2009 traduit l’ouverture de l’histoire du droit sur les autres disciplines et sur les autres cadres nationaux.
  • [18]
    Il est par exemple intéressant de voir l’itinéraire intellectuel d’un historien du politique comme Pierre Rosanvallon. Celui-ci rédige en 1990 un ouvrage programmatique sur l’État en France, associant l’histoire de la démocratie et l’histoire des configurations politiques de l’État. Cette démarche aboutit pourtant à publier en 2015 un ouvrage sur le concept de bon gouvernement dans les pratiques du pouvoir exécutif (Pierre Rosanvallon, L’État en France de 1789 à nos jours, Paris, Le Seuil, 1990 ; Le Bon gouvernement, Paris, Le Seuil, 2015).
  • [19]
    Reinhart Koselleck a été un des premiers historiens à élaborer une véritable théorie de la modernité dans Le futur passé. Contribution à la sémantique des temps historiques, Paris, Éditions de l’EHESS, 2016 (1re éd. 1979). Le concept est encore largement interrogé par les historiens du Moyen-Âge comme de la période contemporaine. Au-delà de l’État moderne, c’est bien la notion même de modernité qui se trouve questionnée par les processus d’historicisation (Voir notamment le séminaire de Patrick Boucheron au Collège de France en 2015-2016 sur le thème « Les effets de la modernité. Expériences historiographiques », ou encore la publication d’Emmanuel Fureix et François Jarrige, La modernité désenchantée. Relire l’histoire du XIXe siècle français, Paris, La Découverte, 2015).
  • [20]
    On peut faire référence ici au colloque tenu à Toulouse en 2016 intitulé : « Raison administrative et logiques d’Empire : l’évolution du sens « d’administration » (XIIIe-XXe siècles) » qui permet notamment de penser l’administration en dehors de la lecture univoque du passage entre l’État moderne et l’État-nation.
  • [21]
    Voir les trois numéros spéciaux des AHRF publiés au début des années 2000 : « La Révolution et le droit », n° 328, 2002 (sous la direction de Michel Pertué) ; « Provinces-Paris », n° 330, 2002 (sous la direction d’Anne Jollet et Annie Duprat) ; « Une révolution du pouvoir exécutif ? », n° 332, 2003 (sous la direction de Michel Biard et Pierre Serna). Il nous faut également souligner l’influence de l’ANR RevLoi (2012-2013) portée par les Archives nationales et l’IHRF, de même que les nombreuses thèses récentes ou en cours sur la question du pouvoir exécutif, envisagé dans sa définition la plus large, notamment administrative.
  • [22]
    Robert Descimon, Jean-Frédéric Schaub et Bernard Vincent (dir.), Les figures de l’administrateur. Institutions, réseaux, pouvoirs en Espagne, en France et au Portugal, 16e-19e siècle. Paris, Éd. de l’EHESS, 1997, p. 14.
  • [23]
    Un exemple de l’utilisation par des politistes de la thèse webérienne, cf. Françoise Dreyfus, L’invention de la bureaucratie. Servir l’État en France, en Grande-Bretagne et aux États-Unis (XVIII-XXe siècles), Paris, La Découverte, 2000.
  • [24]
    Parmi de nombreux travaux, citons Françoise Bayard, Le monde des financiers au XVIIe siècle, Paris, Flammarion, 1988 ; Daniel Dessert, Argent, pouvoir et société au Grand Siècle, Paris, Fayard, 1984.
  • [25]
    Jean Nagle, « L’officier “ moyen” dans l’espace français de 1568 à 1665 » dans Jean-Philippe Genet (dir.), L’État moderne. Genèse, Paris, CNRS, 1990, p.163-174 ; Michel Cassan (dir.), Offices et officiers « moyens » en France à l’époque moderne. Profession, culture, Limoges, PULIM, 2004, p. 2.
  • [26]
    Éric Brian, La mesure de l’État. Administrateurs et géomètres au XVIIIe siècle. Paris, Albin Michel, 1994. Éric Szulman, La navigation intérieure sous l’Ancien Régime : Naissance d’une politique publique, Rennes, PUR, 2014.
  • [27]
    Paolo Napoli, Naissance de la police moderne. Pouvoirs, normes et société. Paris, La Découverte, 2003.
  • [28]
    Dominique Margairaz, « L’invention du “ service public ” »... art. cit., p. 10-32.
  • [29]
    Gaïd Andro, Une génération au service de l’État. Les procureurs généraux syndics de la Révolution française (1780-1830). Paris, SER, 2015 ; Bernard Gainot, « Premières propositions pour une enquête prosopographique des commissaires du pouvoir exécutif sous le Directoire », L’administration territoriale sous la Révolution française. Réflexions, vues nouvelles et pistes de recherche, Cahiers du laboratoire des collectivités locales, Presses universitaires d’Orléans, 2003, p. 91-104 ; Michel Biard, op.cit.
  • [30]
    Catherine Kawa, Les ronds-de-cuir en Révolution. Les employés du ministère de l’Intérieur sous la Première République (1792-1800), Paris, Éd. du CTHS, 1996.
  • [31]
    Michel Bruguière, Gestionnaires et profiteurs de la Révolution. L’administration des finances françaises de Louis XVI à Bonaparte, Paris, Olivier Orban, 1986.
  • [32]
    Guy Thuillier, Pour une histoire de la bureaucratie en France, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière, 2 tomes, 1999 et 2001.
  • [33]
    Parmi une dense bibliographie, citons : Igor Moullier, Le ministère de l’Intérieur sous le Consulat et le Premier Empire. Gouverner la France après le 18 brumaire. Doctorat d’histoire, Université de Lille 3, 2004 ; Idem, « Une recomposition administrative : le bureau des subsistances, de l’Ancien Régime à la fin du Premier Empire », AHRF, n° 352, 2008/2, p. 29-51 ; Pauline Lemaigre-Gaffier, Administrer les menus-plaisirs du Roi. L’État, la cour et les spectacles dans la France des Lumières, Seyssel, Champ Vallon, 2016 ; Isabelle Laboulais, La maison des mines. La genèse révolutionnaire d’un corps d’ingénieurs civils (1794-1814), Rennes, PUR, « Carnot », 2012 ; François Buton, L’administration des faveurs : l’état, les sourds et les aveugles, 1789-1885, Rennes, PUR, 2009.
  • [34]
    Jean-Luc Chappey, Carole Christen et Igor Moullier, Joseph-Marie de Gérando (1772-1842). Connaître et réformer la société, Rennes, PUR, « Carnot », 2014 ; Dominique Margairaz, François de Neufchâteau : biographie intellectuelle, Paris, Publications de la Sorbonne, 2005.
  • [35]
    Isabelle Laboulais, « La fabrique des savoirs administratifs » dans Dominique Pestre, Histoire des sciences et des savoirs, t. 1 Stéphane Van Damme (dir.), De la Renaissance aux Lumières, Paris, Le Seuil, 2015, p. 447-463.
  • [36]
    François Buton, « L’observation historique du travail administratif », Genèses, 72-3, 2003, p. 2-3.
  • [37]
    Michael Broers, « “ Les Enfants du Siècle” : An Empire of Young Professionals and the Creation of a Bureaucratic Imperial Ethos in Napoleonic Europe » dans Peter Crooks et Timothy H. Parsons, Empires and Bureaucraty in World History : From the Late Antiquity to the Twentieth Century, Cambridge, Cambridge University Press, 2016, p. 344-363; Marie-Cécile Thoral, L’émergence du pouvoir local. Le département de l’Isère face à la centralisation (1800-1837), Rennes, PUR, 2010, p. 103-119.
  • [38]
    Cécile Robin, « La bibliographie, de la science du bibliographe à l’outil administratif. Naissance d’une science officielle sous la Révolution et l’Empire », AHRF, n° 380, 2015/2, p. 101-124 ; Maria-Pia Donato, « Des hommes et des chartes sous Napoléon », AHRF, n° 382, 2015/4, p. 81-102 ; Jean-Luc Chappey, Ordres et désordres biographiques. Dictionnaires, listes de noms et réputation des Lumières à Wikipédia, Seyssel, Champ Vallon, 2013.
Gaïd Andro
Université de Nantes – ESPE (CREN EA 2661) Chercheuse associée à TEMPORA EA 7468
gaid.andro@gmail.com
Laurent Brassart
Université de Lille –Sciences Humaines et sociales / IRHIS UMR 8529
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Mis en ligne sur Cairn.info le 11/10/2017
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