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La Seine a été, avant les grands travaux haussmanniens, un véritable champ d'expériences pour la recomposition du paysage et de l'urbanisme parisien depuis les dernières décennies du XVIIIe siècle. C'est cette histoire de la mutation décisive de la relation du fleuve à la ville et à ses habitants qu'étudie cette thèse dense et convaincante. Depuis que les voies sur berges servent à l'écoulement de la circulation automobile, on a peine à imaginer la complexité de l'activité humaine permanente qui animait le fleuve et ses abords au XVIIIe siècle, quand subsistaient encore les grèves et les installations sédentaires. L'exploitation d'archives administratives nombreuses et diversifiées, Archives nationales, Archives de la préfecture de Police, mais aussi fonds de l'École des Ponts et Chaussées et du musée de la Batellerie, permet à l'auteur d'observer les multiples rapports économiques, sociaux, politiques qui unissent la Seine à la ville et les nombreux projets qui anticipent le processus d'autonomisation du fleuve au XIXe siècle. La complexité des points de vue montre que la Seine est alors un espace privilégié pour tous ceux qui en vivent et qui y vivent, en même temps qu'elle est un enjeu de pouvoir entre le roi et la Ville, incarnée par le prévôt des marchands. Le fleuve draine vers Paris les marchandises et les hommes, et approvisionne toujours la cité en denrées de nécessité ; celles-ci sont déchargées et vendues dans les divers ports spécialisés, les berges ont leurs moulins et leurs marchés, leur population de gagne-deniers et de porte-faix, étroitement contrôlés par la Ville, qui garde la haute main sur les activités fluviales et le travail des ports, les porteurs d'eau font concurrence aux pompes pour la fourniture en eau de la capitale…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 01/04/2010
- https://doi.org/10.4000/ahrf.1198