CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1En octobre 2017, un violent affrontement a éclaté au Burkina Faso entre autochtones de la région du Sud-Ouest et chercheurs d’or migrants venus des contrées et pays voisins. Le sang a coulé et le marché du site d’orpaillage de Fofora a été incendié. Les forces de l’ordre n’ont pas pris la pleine mesure de la colère des villageois lobi habitant à proximité de ce site. Dans un univers où l’animisme demeure l’ontologie religieuse de référence, le sang versé est à « venger » avant d’être « ramassé » à l’aide d’offrandes sacrificielles idoines, sous peine de voir s’abattre bien d’autres infortunes. La sécheresse surtout, due à l’absence de pluie, est l’une de ces conséquences les plus graves pour les Lobi qui sont avant tout cultivateurs.

2Au cours de cet article, des éléments de la dépêche actualisée datée du 1er novembre 2017 de l’Agence d’information du Burkina – « Kampti : un incident fait quatre morts » – seront d’abord repris et commentés à la lumière de données recueillies à l’occasion d’une mission ethnographique conduite durant les mois de décembre 2017 et janvier 2018, dans un village lobi proche du site aurifère de Fofora. C’est là que Michèle Cros mène, depuis plusieurs décennies, des recherches en anthropologie de la santé et de la nature. Sa thèse portait sur la symbolique du sang chez les Lobi, longtemps qualifiés d’émérites « vengeurs de sang » (Cros, 1990). C’est sur ce site aurifère de Fofora que Quentin Mégret a notamment mené pour sa thèse des investigations portant sur les dynamiques de l’orpaillage dans la région (Mégret, 2013a). Dans un second temps, des éléments ethnographiques issus des récits des orpailleurs et de l’observation de leurs activités de prospection fourniront des perspectives de réflexion complémentaires pour saisir les différents ressorts de ce drame et le resituer dans le contexte plus large de l’histoire récente (depuis le début des années 2000) de la conquête conflictuelle des espaces aurifères dans la région. Le croisement de l’ensemble de ces données ethnographiques donne ainsi à voir le regard singulier et contrasté d’acteurs locaux à propos de ce conflit, permettant de mieux comprendre les logiques sous-jacentes à ce terrible affrontement.

Une activité conflictogène

3De nombreux travaux ont été consacrés aux tensions et conflits occasionnés par la présence des entreprises minières. Les activités extractives comportent une dimension éminemment conflictogène qui a été étudiée sous ces différentes facettes (Hilson, 2002). Les recherches se sont notamment focalisées sur les relations « tendues » entre mineurs artisanaux, petites mines et multinationales, et sur la compétition que ces acteurs se livrent (Bolay, 2016 ; Geenen, 2014 ; Hilson, Yakovleva, 2007 ; Verbrugge, 2017). Des travaux ont permis de caractériser les différentes formes de mobilisation, de résistance et de lutte qui émergent inéluctablement dans le sillage du développement de l’activité minière (Bebbington, Bury, 2013). Les études sur les conflits ont généralement mis l’accent sur la triade des parties prenantes que sont les opérateurs miniers, l’État et les communautés [1] auxquelles il est possible d’ajouter, suivant les spécificités contextuelles, des associations de défense des droits indigènes, des ONG, des agences de développement ou encore des réseaux transnationaux de protection de l’environnement (Le Meur, Horowitz, Mennesson, 2013). Dans leur programme thématique pour une anthropologie des mines, Ballard et Banks (2003) ont en effet noté l’importance d’étudier les « nouveaux » acteurs ayant pris une place plus significative dans les arènes minières d’aujourd’hui : ONG, institutions financières, avocats, bureaux d’études.

4À l’échelle du Burkina Faso, les protestations, les contestations ou les actes de résistance qui se manifestent localement à l’égard des exploitants miniers (Capitant, 2017), les sentiments d’injustices auxquels l’activité minière donne lieu (Engels, 2017, 2018 et 2019), ont fait l’objet de recherches approfondies. D’autres travaux y ont analysé les spécificités des mécanismes de régulation qui se mettent en œuvre pour contrôler l’accès aux ressources minières (Arnaldi di Balme, Lanzano, 2017 ; Côte, Korf, 2018 ; Luning, 2008, 2014 ; Mégret, 2010). Dans le Sud-Ouest burkinabè, la non-présence d’industrie minière se traduit pour le moment par une absence marquée des acteurs qui gravitent autour de l’activité extractive et de ses conséquences. Les conflits opposent donc d’abord les propriétaires fonciers autochtones lobi et les chercheurs d’or migrants, accompagnés de leurs intermédiaires locaux.

5Afin d’en saisir le caractère symptomatique, les rapports entre autochtones lobi et orpailleurs peuvent être utilement comparés aux relations de « tutorat » qui s’appliquent dans de nombreuses régions d’Afrique de l’Ouest. Si ce type d’institution fait souvent face à l’individualisation et à la monétarisation accrue des transferts fonciers, dans le cas de l’orpaillage, c’est surtout le caractère mouvant et instable de l’activité qui tend à mettre à mal la capacité de telles institutions à jouer leur rôle d’accueil et d’intégration. En effet, différents éléments font que le cadre conventionnel mobilisé pour régler les relations entre « premiers arrivés » et « nouveaux venus » est ici d’emblée soumis à rude épreuve. Parmi les paramètres qui participent à complexifier les termes de l’entente, nous retiendrons notamment :

  • l’arrivée massive, précipitée et parfois agressive de certains orpailleurs sur les prospects découverts (figure de l’orpailleur perçu comme un personnage avide et pressé par le temps) ;
  • la nature des surfaces d’exploitation ciblées (terres cultivables ou non, zones forestières, territoires sacrés, espaces situés en périphérie du village ou en brousse…) ;
  • le caractère variable et jugé plus ou moins destructeur de l’activité minière pour les sols (recherche alluvionnaire ou éluvionnaire superficielle ou extraction filonienne en profondeur) ;
  • la reconnaissance plus ou moins partagée de procédures spécifiques de consultation rituelle et le respect de pratiques sacrificielles à réaliser avant le lancement de l’activité ;
  • le flou initial qui entoure les potentialités minières d’une zone comme la répartition future de la rente minière qui lui est liée ;
  • la durée d’exploitation et d’installation de la communauté minière ;
  • et enfin la difficulté relative à l’anonymat d’une foule qui fréquente un site d’orpaillage et qui demeure très mobile (critique du faible investissement local des « étrangers »).

6Lorsqu’aucune solution n’est trouvée sur le terrain de l’exploitation, le règlement des litiges peut nécessiter l’intervention des autorités régionales, voire des forces nationales militaires dans les cas les plus extrêmes. Les conflits mettent donc aux prises des chercheurs d’or migrants aux autochtones lobi mais, comme nous le verrons, on ne peut réduire ces affrontements à un tel dualisme, tant les relations que ces acteurs entretiennent sont ambiguës (Werthmann, 2003). D’une part, l’activité minière suscite une forte attraction sur les jeunes générations lobi, qui peinent dans certains villages à résister à la tentation de l’orpaillage et ses probables réussites matérielles. De même, certains propriétaires fonciers coutumiers ont su avantageusement tirer profit de la situation en cédant des terrains le temps de l’exploitation. D’autre part, quelques orpailleurs vivent depuis suffisamment longtemps dans la région pour être amicalement qualifiés de « vrais lobi » par leurs « tuteurs », témoignant de leurs efforts d’intégration, d’apprentissage et de respect des normes locales de bonne conduite. L’ensemble des comportements est donc soumis aux commentaires et, dans certains cas, ils suscitent une forte réprobation morale.

7Dans les termes lobi, « ramasser le sang » traduit le fait que la fertilité de la terre est conçue comme une « œuvre » autochtone, renvoyant à l’idée d’un droit de propriété intellectuelle de la terre (Jacob, Le Meur, 2010, p. 8). Cette dimension immatérielle rappelle la présence d’un savoir-faire autochtone, qui se matérialise régulièrement à travers l’accomplissement de rituels visant à préserver la fécondité de la terre. Les productions du terroir apparaissent ainsi comme les expressions tangibles d’une qualité intangible (ibid, p. 24), questionnant sous un angle particulier les politiques locales de la reconnaissance et de l’appartenance. En guise de conclusion, nous interrogerons en ce sens le développement sous tension de ces « frontières interstitielles » (Grätz, 2003) régionales de l’orpaillage, à partir de la construction vernaculaire de récits que nous avons pu recueillir. Ces témoignages sont autant d’éléments cosmologiques inédits qui, actualisés dans le contexte de cette extraction minière artisanale et intensive, offrent un regard interprétatif local décalé et critique sur le phénomène.

De l’or vivant

8Dans cette région, jusqu’au début de ce siècle, seules les femmes étaient autorisées à pratiquer une extraction dite alluvionnaire et éluvionnaire afin de vendre ce qui était considéré comme de l’or déjà mort, en déshérence en somme, dans le cours de rivières asséchées, aux pieds des collines (Schneider, 1993). La contrée a été « pacifiée » à la toute fin du xixe siècle (Fiéloux, Bonnafé, Kambou-Ferrand, 1982 ; Dory, 1984). La force coloniale a imposé la paix suite à de nombreux combats et exactions (Kambou-Ferrand, 1993). Depuis l’arrivée des Lobi dans la région, vers la fin du xviiie siècle (Fiéloux, 1980, p. 18), l’or n’a jamais été à l’origine de véritables conflits entre les hommes. Cependant, l’histoire précoloniale de la région reste encore mal connue et les historiens et archéologues évoquent la probabilité d’une extraction ancienne aux contours potentiellement conflictuels (Somé, Simporé, 2014).

9L’or appartenait et continue d’appartenir aux génies de la brousse qui peuplent ces fameuses collines. L’or ne peut être capturé sans précaution par les humains. Si, on ne sait par quel tour du destin, un homme vient à découvrir une pépite, autrement dit de l’or vivant, une certaine prudence s’impose. L’or doit être mis à mort. Mais cette mort ne survient pas rapidement [2]. Rappelons la procédure décrite par Labouret (1931, p. 81 et sq.) dans sa célèbre monographie. De l’urine est versée dessus, puis on l’enterre sous un tas de fumier. Un an après, il est déterré. Des sacrifices sont effectués pour les génies de la brousse [3]. Si ces derniers les acceptent, alors et seulement alors, il est possible de vendre cet or sans craindre le courroux de ces non-humains. Après avoir été enterré, le métal finit par trouver la mort.

10Dans le village où Michèle Cros séjourne, après plus de dix ans de cohabitation avec les chercheurs d’or venus pour la plupart du centre et du nord du Burkina Faso, rares sont les Lobi qui transgressent « l’interdit de l’or ». Si de plus en plus de jeunes du village partaient à Fofora, ils ne descendaient pas dans les puits d’extraction et se contentaient de concasser des pierres en marge d’une activité économique par ailleurs fortement périlleuse. C’est cette situation qui prévalait au moment du violent affrontement qu’il est maintenant temps d’exposer en suivant la dépêche de l’AIB.

Déflagrations

11Voici donc en substance le résumé de cette dépêche : « Un affrontement a éclaté entre des orpailleurs et des habitants dans un site artisanal d’or, le lundi 30 octobre 2017 à Fofora. Le bilan provisoire fait état de quatre morts et de quelques blessés. Fofora est un petit village à l’ouest de Kampti, situé à environ 46 kilomètres de Gaoua. Cette localité abrite un site d’orpaillage où les habitants et les chercheurs d’or cohabitaient sans histoire. Voilà que ce lundi 30 octobre 2017, autour de huit heures, une balle de fusil a touché mortellement une femme et blessé son enfant. Selon les informations recueillies sur place, un orpailleur […] était en train de manipuler son arme. Et un coup est parti accidentellement pour atteindre une femme et son enfant. »

12Le dessin suivant donne à voir cette scène initiale. Le sang coule avec abondance.

13Dans la dépêche de l’AIB, il est précisé que « cette situation a provoqué des représailles de la part des populations de Fofora. Ainsi trois orpailleurs ont été tués et le marché du site incendié ». La violence de l’affrontement a sidéré les uns et les autres, orpailleurs, autochtones et forces de l’ordre qui n’ont pas pris la mesure de la colère et ce d’autant que, comme cela est encore relaté : « Cela fait la troisième fois qu’un des membres la famille de la défunte est tué par un orpailleur du site concerné. C’est ce qui a suscité la colère généralisée dans le village avec des actions de vengeances. »

Dessin 1

La défunte et sa fille à Fofora

Dessin 1

La défunte et sa fille à Fofora

(Diniaté Pooda, 2017)

14L’homme qui a tué cette femme et blessé son enfant a trouvé refuge à la gendarmerie. Des autochtones lobi sont partis à sa recherche. Des gendarmes n’ont pas accepté de leur livrer l’homme à l’origine de l’accident. Après avoir été « gazés », des villageois ont donné un ultimatum aux forces de l’ordre. L’heure a tourné. L’homme n’a pas été rendu et des Lobi, comme ils l’avaient annoncé, ont incendié le marché du site aurifère. Le sang a de nouveau coulé. Diniaté Pooda, dans un cahier de dessin intitulé « La guerre au site d’or », en a retracé les principaux épisodes [4]. Ses dessins composent une suite narrative. Ils donnent à voir et à comprendre cet événement dramatique du côté lobi. Chaque dessin est commenté puis repris dans le cadre d’une investigation ethnographique plus classique. Après avoir vu la regrettée défunte et sa fille dans le dessin 1, voici une brève chronique de l’épisode de la gendarmerie dans les dessins 2, 3 et 4.

Dessin 2

Fuite en direction de la gendarmerie

Dessin 2

Fuite en direction de la gendarmerie

« Voici celui qui a tiré la dame et sa fille, il est en train de s’enfuir sur sa moto pour aller à la gendarmerie de Kampti. Il porte un costume blanc, la plupart des orpailleurs, ce sont des musulmans. Les musulmans aiment porter le blanc. »
(Diniaté Pooda, 2017)
Dessin 3

Trouver de l’appui à la gendarmerie

Dessin 3

Trouver de l’appui à la gendarmerie

« Le monsieur est déjà arrivé à la gendarmerie. Pour toute chose, c’est l’argent qui marche. Lui, il a donné de l’argent au chef de brigade pour pouvoir être appuyé. C’est à cause de cela que les autochtones du village sont venus pour avoir le gars. Le chef de brigade n’a pas accepté 10 000, d’autres peuvent se coller. » Autrement dit, il veut plusieurs billets de 10 000 CFA. « Le chef de brigade, c’est un Mossi. Ici, au Burkina, comme ce sont les présidents, on met le Mossi devant. Le président d’avant, c’était un Mossi, celui d’aujourd’hui aussi. Dans un bureau, quand tu rentres, si vous êtes plusieurs, celui de la tête, c’est un Mossi qui est devant car ils connaissent trop la politique. »
Diniaté Pooda, 2017
Dessin 4

Autochtones fâchés et gazés à la gendarmerie

Dessin 4

Autochtones fâchés et gazés à la gendarmerie

« Les autochtones du village sont venus à la gendarmerie. Le chef est en bleu. Celui qui porte l’arme, c’est un petit, c’est lui qui garde le chef. Les autochtones ont demandé celui qui a assassiné notre maman et notre fille. Donc il faut faire sortir ce monsieur. La gendarmerie n’a pas accepté de donner ce monsieur pour pouvoir faciliter la résolution de ce problème. Pourquoi les autochtones sont fâchés ? Pourquoi se rendent-ils directement à la gendarmerie ? C’est parce que c’est la troisième fois et même la quatrième que cela arrive. »
(Diniaté Pooda, 2017)

15Plusieurs épisodes violents ont émaillé les relations qui lient les habitants des villages sur les territoires desquels se trouvent enserrés le site d’orpaillage de Fofora et ses zones d’exploitation aurifère. Dans l’encadré qui suit [5], un habitant de l’un de ces villages fournit un résumé condensé de la situation.

« Premièrement : ce sont les orpailleurs qui ont tué le petit frère du papa de la dame qui est morte. C’était au moment de la grande année, on ne peut rien dire, c’était lors de l’initiation [6]
Deuxièmement, c’est la fille de L. de notre village. Elle a été égorgée. Elle était avec un orpailleur et ça ne marche pas entre eux. Tout le temps, il y a des problèmes. Une nuit, le gars a tapé la fille, il a cassé son bras. Elle a fini par guérir mais elle ne veut plus se marier au gars. Lui, il la veut et il dit qu’elle a bouffé son argent. La fille est partie au yar (le marché du site d’or) pour prendre le son du dolo (bière de mil) pour donner aux cochons. Le gars guette, il la voit, se lève et la suit. La fille quitte le yar et alors, il a tiré son couteau, une sorte de poignard avec des pointes pour l’or et il lui donne trois coups et c’est fini pour elle. Les autochtones ont dit : comment il faut faire maintenant, vous êtes des étrangers, vous vous installez chez nous, on n’est pas méchant et c’est grâce à nous que vous gagnez tout sur notre terre. Il n’y a pas un homme de notre village qui vous a fait du mal et c’est vous qui nous faites du mal à chaque moment. Alors les autochtones du village se sont levés et ont tué jusqu’à trois personnes et les commandos sont intervenus. Les autochtones ont dit aux orpailleurs de quitter notre terrain. Les corps habillés sont intervenus, il faut rester ensemble et si on a un autre cas, on va vous donner. Les autochtones ont arrêté ça.
La troisième fois : c’est une femme de la ville de Loropéni en train de travailler au site d’or, elle a pris un copain, un Mossi et ça ne marche plus, elle est partie. La femme ne veut plus marier l’orpailleur, elle a fui jusqu’à Loropéni, il l’a attrapée et il l’a tuée. Et maintenant, cette année, en 2017, ils ont refait la même chose, ils ont tué une femme. C’est pour cela que les autochtones demandent, qu’est-ce qu’on dit ? Il faut nous remettre ce monsieur, on va le tuer et la palabre va finir. C’est la troisième fois. Pour la fille de L., les autochtones ont tué trois personnes. Avec la femme de Loropéni, ce n’est pas notre village où le sang a coulé, on n’a rien fait. C’est à la mort de la fille de L. qu’on a parlé, on demande le pardon. Et ça a repris. Nous, les orpailleurs, c’est nous qui allons attraper la personne pour vous. Une seule personne ne peut pas gâter notre travail. Vous allez le tuer et nous tous on va avoir la paix pour pouvoir rester sur place. On est arrêté là, nous, les lobi et les orpailleurs devant les corps habillés, nous, on a parlé de ça.
Maintenant, la troisième fois est revenue, c’est en cours de route, on n’a rien dit, c’était une femme de Loropéni.
À la quatrième fois : ils ont tué la fille du même papa. Les autochtones sont venus demander aux corps habillés, qu’est-ce qu’on a arrêté ? Si on gagne ce monsieur, le problème est fini. À la gendarmerie, ils ont dit non. Le petit a pris un pistolet et il a tiré en l’air. Le chef a pris du gaz et avec le gaz, impossible de forcer. Les autochtones sont retournés au village et ils ont dit ce qu’ils ont arrêté avant de partir. Qu’est-ce qu’ils ont dit ? Nous, on s’en va, mais d’ici à 14 heures, il faut que vous, enfin tous les orpailleurs qui se trouvent sur notre terrain, il faut les faire sortir. Les corps habillés doivent les faire partir, c’est ça qu’on a demandé. »
Entretien avec un habitant frontalier du site aurifère de Fofora, janvier 2018.

Venger le sang

16Passe le temps, plus de dépêche en ligne, sinon cette récente lettre ouverte au ministre des Mines et des Carrières du 17 septembre 2018 où il est question de la défense d’une colline sacrée, plus au nord de Kampti, à Gaoua, toujours en pays lobi. Par colline sacrée, on entend un espace occupé par les génies de la brousse. Localement, les habitants humains estiment qu’il ne faut pas les en déloger, même si de l’or s’y trouve. Des accommodements sont parfois trouvés et il revient alors au chef de terre, le dithildar (en lobiri [7]), de s’arranger avec ces non-humains. Suite à l’accomplissement de sacrifices réalisés sous sa conduite, les orpailleurs peuvent plus sereinement, au bas de ces collines, chercher ce qu’ils convoitent avec tant d’ardeur [8]. Il n’empêche, les génies veillent (Cros, 2019), comme il en est rendu compte dans ce nouveau dessin (n° 5) de Diniaté Pooda.

17Éteindre la dette a relevé de l’évidence pour les autochtones lobi. Mais une fois arrêté le sang, vient le temps de le ramasser. Cette opération de paix implique de nombreuses consultations divinatoires accompagnées de diverses compensations rituelles. En l’occurrence des sacrifices de volailles, de moutons et de trois bœufs sont demandés. Et c’est alors que la justice étatique s’en mêle, des « vengeurs de sang » sont arrêtés. On se retrouve dans une situation de pluralisme normatif. Comment éteindre le sang durablement, la question n’est pas tranchée.

Dessin 5

Orpailleurs sous le regard d’un génie de la brousse

Dessin 5

Orpailleurs sous le regard d’un génie de la brousse

(Diniaté Pooda, 2011)

18« Fofora n’est plus un désert, les trous travaillent mais les orpailleurs n’y habitent plus, le marché n’est pas installé à nouveau », est-il expliqué lors d’un récent entretien téléphonique avec des membres du village d’adoption de l’un d’entre nous. Tous les sacrifices demandés n’ont pas encore été effectués. L’ambiance demeure lourde et la situation est liminaire. Les règles provisoires de bonne entente ont été transgressées. Une telle situation est susceptible de remettre en cause les accords passés entre certains orpailleurs et les autochtones lobi. L’entente temporaire, qui repose sur le fait que « ce n’est jamais la terre ou les ressources qui sont possédées mais des droits au sens d’actions autorisées sur des terres et des ressources » (Arnaldi di Balme, Hochet, 2017, p. 43), est ici clairement fragilisée.

« Faire la force »

19Au départ, les contacts entre orpailleurs migrants et habitants lobi ont été particulièrement rudes. Les conséquences immédiates du fait divers ici relaté nous rappellent d’ailleurs que tout n’a pas été effacé des mémoires. Les orpailleurs ont la réputation d’être des gens particulièrement « têtus » et obstinés. Ils ont « fait la force » pour s’installer, selon une expression très couramment employée. Leur intrusion et la « prise » de nouveaux territoires aurifères dans le Sud-Ouest se sont souvent faites au moyen de percées furtives, en particulier nocturnes, pour tromper la vigilance des populations autochtones [9]. La sémantique guerrière et militaire est particulièrement appropriée ici [10]. Les orpailleurs qui mènent de telles expéditions, et que Quentin Mégret a pu suivre dans le cadre de son travail de thèse (Mégret, 2013a), surnomment eux-mêmes leurs opérations de missions « commando », témoignant du caractère discret, pionnier, mais surtout risqué de telles excursions. Au cours des années 2000, dans le Sud-Ouest, lorsqu’un petit groupe d’explorateurs découvrait une « zone » intéressante, les prospecteurs étaient amenés, tôt ou tard, à négocier avec les responsables des lieux. Suivant les rapports qu’entretenaient les orpailleurs avec les habitants des territoires villageois au sein desquels se trouvaient les richesses aurifères présumées, la mise en exploitation d’une nouvelle ligne[11] ou d’un nouveau fonce[12] était loin d’être acquise. Dans l’extrait qui suit (2009), un orpailleur pionnier relate les sévères échauffourées qui ont fait suite aux tentatives initiales d’exploration et d’exploitation de certaines zones.

« Au commencement de l’orpaillage, c’était dur, on te voyait avec une pioche, on disait qu’il fallait même te tuer ! Tu n’as pas droit à ça, donc dans le village ça ne se fait pas. Mais nous pour partir d’abord, on se cache ! On prend notre pioche, on met dans le sac et puis on contourne, on prend des lance-pierres et puis on dirait qu’on part pour lancer sur des oiseaux. Arrivés en brousse, on met la pioche sur le bois et on commence à travailler. Pour taper les cailloux, on ne veut pas taper pour que les gens entendent ! On tape un peu pour pouvoir voir ce qu’il y a, mais tu ne peux même pas piler voir, si on doit taper, on envoie à la maison. […] Si les femmes entendent qu’il y a un bruit en brousse, il y a des femmes qui partent chercher des fagots, si elles te voient, elles s’enfuient dire à leurs maris à la maison. Eux aussi, ils prennent leurs gourdins et leurs coupe-coupe et ils viennent sur toi ! Nous, on refuse aussi ! Moi, avec mon ami, on commence à faire les coups de poing ! Si ça ne va pas, ils nous laissent et ils disent bon, il ne faut pas que demain on te voie ici. On vient, on s’assoit. Le lendemain encore on part ! »
Entretien avec un orpailleur pionnier, site aurifère de Kunkana, août 2009.

Ouvrir la terre

20Lorsque les fouilles des chercheurs d’or sont bien avancées, que la terre a été suffisamment « ouverte » et que les autochtones lobi alertés se rendent armés sur le terrain pour en expulser les orpailleurs, un appel à la négociation et à la mise en place de mécanismes de compensation est proposé. Cette stratégie éminemment risquée a pu donner lieu à de violents épisodes [13]. Mais elle finit généralement par porter ses fruits. Les deux parties peuvent trouver directement un arrangement, par exemple poursuivre les recherches moyennant le paiement de sommes fixes aux propriétaires autochtones pour la réalisation de sacrifices et pour l’exploitation de chaque puits. Une répartition en pourcentage des minerais aurifères extraits peut également être proposée en guise de dédommagement et/ou de rémunération future.

21Mais, lorsque les tensions sont trop vives pour trouver un compromis à l’échelle des deux parties, le recours aux autorités locales (gendarmerie, mairie, préfecture) constitue une étape supérieure dans la résolution de tels litiges. Elle débouche sur la mise en œuvre de tractations dont l’issue est là aussi la plupart du temps favorable aux orpailleurs et à leurs représentants [14]. En effet, la volonté des autorités locales de concilier les intérêts des différentes parties entérine le plus souvent la poursuite de l’exploitation des puits aurifères, moyennant le recours à différentes formes de compensation. Les responsables des orpailleurs disposent de moyens financiers importants dont ils font usage pour acquérir à leur cause les autorités locales. Ils sont aussi capables de mobiliser des réseaux influents et d’utiliser à leur profit, pour imposer leur présence sur le terrain, les zones d’ombre qui entourent le droit minier burkinabè et son application loin de la capitale Ouagadougou.

22Le témoignage qui suit, daté d’un entretien réalisé en 2009, émane de l’un des prospecteurs qui a joué un rôle crucial d’intermédiaire entre les propriétaires fonciers lobi de villages situés dans le département de Kampti et les responsables d’un comptoir privé [15]. Il exprime le rapport de force que les orpailleurs ont progressivement engagé avec les habitants des villages de la commune de Kampti au fur et à mesure de l’exploration de nouveaux territoires. Cet extrait expose les différentes stratégies mobilisées par les orpailleurs pour conquérir de nouveaux espaces à exploiter : d’une part, en grignotant, ligne par ligne, jour après jour et village après village, et, d’autre part, en convainquant les jeunes gens de ces localités de déposer leurs armes, de prendre des pioches et de se joindre à eux pour tenter à leur tour de faire fortune. Il détaille ainsi comment, étape par étape, le processus de négociation, les justifications des démarches entreprises et le recours à différentes sources d’autorité, permettent de déboucher sur des compromis.

« Pendant ce temps, les orpailleurs étaient chassés dans cette zone. Moi, j’étais la personne la plus proche qui servait d’intermédiaire entre les orpailleurs et les propriétaires terriens. Ça n’a pas été facile, ça taquinait de gauche à droite. Du côté des orpailleurs, il y avait des promesses non tenues, du côté des propriétaires terriens, les gens ignoraient même ce que c’est que les sites d’orpaillage. Ils repoussaient tout le temps. Les gens ne voulaient pas laisser les orpailleurs venir envoûter leur brousse. Un jour, on a découvert une ligne, un premier fonce qu’on a eu à acquérir grâce au conseiller du village de X qui était propriétaire terrien d’une localité de Y. C’était à la limite des terres des voisins du village de Y. Eux, ils ne voulaient pas la présence des orpailleurs. Ils se sont organisés et ils les ont chassés. En ce temps, je travaillais sur une ligne voisine. Les orpailleurs ont été frappés, hachés, machettés, c’était la course contre l’orpaillage ! Après, nous avons découvert un autre fonce. Pour l’acquérir, ça n’était pas facile. Ils ont fait toutes les démarches, toutes les promesses, les villageois n’ont pas voulu accepter. Un jour, ils sont venus me voir [un groupe de personnes travaillant pour un comptoir privé d’achat de l’or], je suis allé rencontrer le chef de terre. Il m’a dit : “Écoute bien, je te considère comme un fils mais j’ai compris que tu es vraiment quelqu’un de très dur, tu veux toujours travailler dans les endroits sacrés où les gens ne veulent pas.” Je leur ai dit : “Bon, écoutez, ce n’est pas la force, nous voulons, avec votre accord et celui des autorités de notre département, trouver un consensus afin de pouvoir lutter contre la pauvreté en travaillant notre terre, même si ce n’est pas par l’agriculture puisque l’autosuffisance alimentaire est très limitée. Donc, ce qui veut dire qu’avec en plus le travail de l’or, plus le travail de l’agriculture, ça va apporter encore un plus à l’économie.” J’ai essayé de les sensibiliser mais malgré tout ça ils ne voulaient pas nous écouter.
C’est là que j’ai eu une idée. Bon, pourquoi pas utiliser la préfecture ou encore les autorités afin de servir d’arbitre entre nous pour que nous puissions trouver un terrain d’entente. Nous sommes partis voir le préfet, nous lui avons expliqué le problème. Il a demandé que nous convoquions le chef de terre pour trouver un accord et bannir la violence. Tu sais à cette époque, il y a eu des blessés graves jusqu’à ce que certains même ont perdu des membres suite à des affrontements entre orpailleurs et habitants de Z. Le préfet m’a donné une convocation pour le chef de terre de Y. Maintenant, tu sais, le Lobi, c’est quelqu’un qui aime plus l’ordonnance que la convocation. Lui croyait que la convocation, ça voulait dire la prison. Malheureusement, il n’a donc pas répondu à la convocation. Il est allé voir l’autre intermédiaire et lui a dit, bon, écoute, j’ai l’impression que ton ami a manigancé quelque chose pour que je me fasse enfermer. C’est là que mon ami lui a dit qu’il fallait trouver un terrain d’entente et ça a été conclu grâce à la convocation. Il a donné une portion de sa terre et nous avons jugé maintenant le prix qui s’élevait à 52 000 francs le trou. On a récupéré les premières avances, on a eu une somme de 852 000 francs qu’on lui a donnée. Après, on lui a donné le reste. Cette “ligne” a été la porte ouverte à une ouverture du site de X ou de Z où comment dirais-je, de Y. »
Négociateur local pour un comptoir privé d’achat et de vente de l’or burkinabè, site aurifère de Bantara, juin 2009.

Une économie morale en actes

23L’encadré qui précède illustre bien la violence issue des premières rencontres entre les Lobi et les orpailleurs, à une époque où « les gens ne savaient même pas ce que c’était que l’orpaillage ». Dans ce témoignage, comme dans bien d’autres, les orpailleurs mentionnent le fait de devoir « sensibiliser » ou « éveiller » les Lobi. Ces deux termes sont régulièrement employés dans le langage ordinaire burkinabè lié au développement, et peut-être plus singulièrement encore à destination des Lobi, eux qui se voient encore parfois qualifiés péjorativement d’être les « Indiens du Burkina Faso [16] ». Si les Lobi sont parfois victimes des préjugés des burkinabè à leur encontre, les orpailleurs ne sont pas en reste. C’est pourquoi l’orpaillage est présenté par ses adeptes comme un combat, à la fois contre ceux qui stigmatisent cet exercice, mais également un combat pour lutter contre la pauvreté. Parmi ces arguments, on retrouve l’idée que l’orpaillage participe au développement du pays et qu’il faut donc fièrement le soutenir. De même, l’orpaillage ne s’opposerait pas à l’agriculture – une critique locale souvent entendue pour dénoncer la destruction de champs de culture et de l’activité centrale de subsistance des villageois – mais lui serait complémentaire, un « plus pour l’économie ». Dans la mesure où la négociation atteint un point fixe, le prospecteur décide de faire appel à de nouveaux acteurs et notamment au préfet qui transmet une convocation au chef de terre. Cette convocation semble avoir joué un rôle déterminant puisqu’elle a suffi à inquiéter le chef de terre qui, craignant d’être enfermé, s’est résolu à négocier le prix de vente de la ligne avec les orpailleurs. Passée cette étape de forte tension, les orpailleurs proposent [17] donc aux propriétaires fonciers lobi de s’engager à leurs côtés. En plaçant leurs interlocuteurs lobi devant le fait accompli, les orpailleurs les contraignent à percevoir a minima le paiement fixe de sommes d’argent contre des droits d’exploitation des ressources minières (par exemple 52 000 francs CFA/puits). Plutôt que de ne rien percevoir du tout, cette compensation est reçue comme un moindre mal. Ou alors, moyennant quelques conditions plus avantageuses (par exemple devenir le patron ou coresponsable de plusieurs puits d’exploitation, donnant droit à un pourcentage des minerais qui y sont extraits), les orpailleurs parviennent à intégrer progressivement des propriétaires fonciers coutumiers lobi au sein des chaînes opératoires de l’orpaillage et de répartition des risques et des gains. Cette option, plus risquée mais potentiellement plus lucrative, amène subtilement certains Lobi à devenir peu à peu, et au départ malgré eux, acteurs de cette économie. Dans l’encadré qui suit, l’intermédiaire relate la double difficulté auxquels font face les orpailleurs pour pérenniser leur activité : identifier techniquement des anomalies aurifères et négocier simultanément des droits d’accès à ces ressources. Le recours à des instances extérieures « régulatrices » (gendarmerie, mairie) permet aux orpailleurs de trouver une voie de passage entre ces différentes contraintes.

« Nous avons travaillé pendant une année, ça n’allait pas, ça partait trop en profondeur. Même si on allait faire des recherches, on voyait des endroits mais à chaque fois il faut aller renégocier à nouveau, refaire encore des sacrifices, repayer encore de l’argent. Malheureusement, on a partagé plus d’une cinquantaine de lignes mais ça n’allait pas. C’est là qu’on a vu cette grande ligne au niveau du maclar[18]. Maintenant, pour la conquérir, ça n’est pas facile. Il y avait des villages environnants tels que X qui est dirigé par un ancien commerçant de bétail qui a aussi fait des va-et-vient, qui est bien ouvert et instruit. On est allé le voir, il n’y avait pas de problème, il a dit bon : “Là, c’est mon grand-père qui est propriétaire du terrain, ce qui veut dire que jusqu’aux limites de mon village, je peux vous donner mon terrain à exploiter.” Bon, X est un village limité à Y et Z. Maintenant, comment faire ? Il nous a donné des terrains supposés être en son appartenance. Malheureusement, il paraît que lui aussi s’est protégé, il s’est couvert, il est venu sous-couvert des orpailleurs pour pouvoir se procurer des zones appartenant à ses cousins qui sont les Tuna [19]. Nous, en récompense, nous lui achetions les trous. On a découvert une ligne à proximité où on a partagé. Quand nous avons fini de partager, on a commencé à travailler. Le même jour, à 13 heures, il y avait vraiment un grand nombre de personnes qui sont venues armées, qui sont venues nous encercler et ils ont récupéré tout notre matériel de travail : les pioches, les pelles, les pilons, les moyeux, les bidons, le bantare[20], tout ! Ils nous ont menacés de mort. On a été obligé d’aller porter une plainte à la gendarmerie pour que nous puissions récupérer notre matériel. Bon, même s’ils ne vont pas nous laisser le terrain, mieux vaut avoir la vie sauve. Maintenant, une fois à la gendarmerie, les gendarmes leur ont demandé : “Est-ce que c’est dans un champ ?” Ils disent non. Les gendarmes disent : “Mais alors pourquoi ne pas trouver un terrain d’entente pour que, en guise de récompense, les orpailleurs vous achètent des trous ?” Ils nous ont rendu notre matériel et on a pu travailler.
« On a négocié encore une autre ligne et il a fallu l’intervention de la mairie, l’implication de la mairie afin que les vieux nous donnent l’accord de pouvoir exploiter. Même le jour du partage, il y avait la mairie, il y avait aussi les responsables des villages. On a récupéré l’argent, une somme de 1 million et quelques. Je crois que c’est une somme de 600 000 francs qui a été remise aux vieux et la même somme aussi est allée dans les poches de la mairie. C’est à ce moment qu’on a déménagé le yar de l’autre côté et qu’on est venus s’installer ici à Y. Depuis qu’on s’est implanté ici, on a découvert d’autres lignes de gauche à droite et à chaque fois, c’est dans la négociation encore. »
Prospecteur et négociateur local d’un comptoir privé d’achat et de vente de l’or burkinabè, site aurifère de Bantara, juin 2009.
Dessin 6

De l’argent donné aux autochtones

Dessin 6

De l’argent donné aux autochtones

(Diniaté Pooda, 2013 [21])

24Une fois l’acquisition d’une première ligne effective, les orpailleurs continuent de prospecter les environs et engagent systématiquement de nouvelles négociations. Dans le cas précis relaté par le prospecteur négociateur, un nouvel interlocuteur, « ouvert » et « instruit » est approché afin de jouer un rôle clé quant à la distribution de nouvelles lignes. Mais cette personne, en échange de l’argent que les orpailleurs lui offrent, livre des terrains dont il n’est pas l’unique responsable. L’activité d’orpaillage, au cœur d’intérêts multiples, est ainsi susceptible de créer ou de raviver des dissensions internes liées à la possession et à l’utilisation des terres villageoises.

25Néanmoins, sous couvert de cette autorisation préliminaire qui leur a été fournie, les orpailleurs ont pu débuter le fonçage. Cette nouvelle forme de provocation n’est pas du goût des habitants qui, sous la menace de leurs armes, confisquent le matériel des orpailleurs. Finalement, cette saisie manu militari du matériel va constituer une excellente occasion pour les orpailleurs d’aller déposer plainte à la gendarmerie. De façon pragmatique, la position des forces de l’ordre va être de trouver un compromis estimé profitable pour tous : les villageois reçoivent de l’argent et les orpailleurs peuvent continuer à travailler. Dans la seconde partie de cet encadré 4, c’est l’intervention de représentants de la mairie de Kampti qui semble avoir permis aux orpailleurs d’entamer le creusage des puits, à l’aide du versement de « taxes » communales improvisées. Ce dernier point montre comment les orpailleurs sont capables d’enrôler les diverses parties prenantes locales, moyennant un paiement ou le partage de la rente minière. C’est là un moyen d’intégrer des acteurs extérieurs à leur économie, de les faire participer, voire de les rendre complices ou coresponsables de leur projet de développement.

L’orpaillage au village

26En fonction des situations et des problèmes à résoudre, une forme de pluralisme institutionnel se traduit par le recours aux diverses instances de médiation susceptibles de jouer un rôle en matière de régulation foncière et d’accès aux ressources naturelles [22]. De nombreux témoignages soulignent les différents degrés d’intégration entre autochtones et étrangers, permettant de nuancer une stricte opposition entre « premiers arrivés » et « nouveaux venus » (Werthmann, 2003). Les jeux d’acteurs s’appuient, en fonction des situations, sur différents ordres d’appartenance (Le Meur, 2012). Comme le précisent Chauveau, Jacob et Le Meur (2004, p. 14) : « Le caractère à la fois instable des implantations de migrants mais fortement institué des communautés d’orpailleurs repose la question de la liminalité ordinaire de l’étranger et des droits dont il peut bénéficier. » En ce sens, les orpailleurs « étrangers », même domiciliés depuis des années sur un site, ont des obligations à remplir vis-à-vis de leurs hôtes, ils « ont le devoir de respecter les interdits explicites en matière de comportement moral au village et de comportement économique en brousse » (Arnaldi di Balme, Hochet, 2017, p. 45), donc tant au niveau du rapport aux femmes autochtones [23] qu’aux génies et aux lieux qu’ils occupent. On ne saurait tuer les premières, même par accident comme ce fut le cas en octobre 2017. Les orpailleurs s’accordent également pour reconnaître aux populations autochtones des prérogatives en matière d’intercession rituelle. En tant qu’autochtones, ils sont reconnus comme étant les seuls à même [24] de consulter les puissances chtoniennes et de résoudre certaines situations dramatiques [25]. Les représentants des orpailleurs admettent donc avoir besoin de leur concours en la matière.

27Les Lobi mettent aussi en garde les orpailleurs quant à la nature excessive de certaines pratiques. Il est par exemple dit que les génies ne peuvent se résoudre à la déforestation ambiante consécutive à l’exploitation de l’or. En effet, les orpailleurs ont besoin de beaucoup de bois, notamment pour soutenir les trous qu’ils creusent. Les génies se plaignent aux devins qui tentent de relayer leur message. Les génies voient la surface de leurs territoires habituels se restreindre de jour en jour avec l’extension des zones d’orpaillage. C’est cela qui expliquerait aussi la sécheresse ambiante. La pluie ne tombe plus, ou beaucoup moins, ces dernières années. Les génies sont courroucés, ils se plaignent au Dieu d’eau créateur : Tangba (en lobiri) qui, à son tour, délaisse la terre afin que les humains régulent le cours de cette exploitation massive de la nature.

28Les démarches d’intégration des orpailleurs vis-à-vis des instances locales du peuplement restent donc fortement teintées d’ambiguïtés. Et cela vaut ici pour l’ensemble de la communauté humaine, chercheurs d’or et cultivateurs lobi confondus. Les propriétaires fonciers qui ont cédé un droit d’accès à une parcelle sont pointés du doigt pour n’avoir pas su résister à l’attrait de l’argent facile, mais finalement peu durable, et doivent faire face à la critique. Sous un autre angle, les jeunes lobi qui ont fait le choix de s’aventurer pleinement dans l’exploitation aurifère ont à concilier leurs puissants désirs d’émancipation avec le respect d’un ordre social villageois transmis et imposé par les générations aînées.

Une semblable partition

29On le sait, le marché du site de Fofora a été incendié. Recourir à ce mode opératoire se retrouve dans nombre de conflits qui opposent les miniers aux sociétés locales (Capitant, 2017). On tente d’inverser la valence des événements et du sang est encore versé. Françoise Héritier parlerait ici des risques d’un cumul d’identique face à cet excès de chaleur propre à tout conflit. La pluie se fait plus rare. Pour qu’elle revienne, la paix doit être conclue de manière durable (Héritier, 1973). Dans un autre contexte, Biersack (1999, p. 78) a montré comment les représentations religieuses des autochtones Paielas en Papouasie-Nouvelle-Guinée ont été mobilisées afin de réinterpréter les flux globaux du capitalisme minier dans un idiome symbolique local. Dans le cadre d’une « ruée vers l’or » à proximité du mont Kare, à laquelle participaient les autochtones, l’or est devenu la chair et le dernier don offert aux hommes par la figure totémique d’un python. Le mont Kare était le site sacré sur lequel les Paielas sacrifiaient rituellement chaque année des porcs au python mythique, afin de promouvoir la fertilité des espèces végétales, animales et humaines. L’auteure montre que l’or étant associé à l’ordre terrestre, les réserves de métal précieux issues de l’éparpillement du python après sa mort s’épuisent progressivement, entraînant du même coup le déclin de la terre et de sa fertilité. Elle souligne également que les chercheurs d’or perturbent l’ordre cosmologique et social en pénétrant dans des territoires « sacrés » au sein desquels étaient jusqu’alors proscrites certaines catégories de personnes et d’activités. En 2009, un orpailleur lobi originaire de Kampti relatait la mise en exploitation d’une colline qui n’a pas porté ses fruits. Suivant son témoignage et par une étrange coïncidence, les orpailleurs qui séjournent au pied de cette colline sacrée sont depuis victimes de feux à l’origine de graves incendies sur le yar.

30

« Avant, personne ne montait sur la colline, personne ne montait. Parce qu’il y a un or qui a vécu pendant des siècles, des années et des années. On est né le trouver là-bas. Et c’est grâce aux Mossi, que nous, les jeunes de Kampti, on a connu l’or. Actuellement, le lieu dont je parlais, c’était un lieu sacré. Même si tu es à la ville de Kampti, pendant la soirée, tu vois que toute la colline, c’est de l’éclair, c’est du feu. L’herbe se brûle toute seule à tout moment. Ce n’est pas quelqu’un qui brûle ça. On est né trouver, les parents sont venus trouver, les arrière-grands-pères sont nés trouver et c’est toujours là. On a essayé de traquer mais ça n’a pas marché. À tout moment, le yar où nous sommes actuellement, ça prend feu. »

31Si la terre demeure souillée, l’or et les génies qu’elle héberge dans les collines pourraient fuir et la fécondité des femmes s’en trouver elle aussi altérée. « Il y a correspondance entre ordre social, ordre biologique, ordre climatique » (Héritier, 1996, p. 131). La défunte lobi a été tuée alors qu’elle partait avec sa fille chercher de l’eau. Sur le premier dessin ici reproduit, les canaris pour puiser de l’eau sont tombés à terre, non loin du sang répandu. Le constat de Labouret pourrait faire office de conclusion provisoire à cette page de l’histoire du pays lobi non encore tournée, mais qu’il importe de replacer dans un éthos de la vengeance où les entités invisibles se rappellent aux souvenirs des hommes. « Si la pluie a cessé, est-ce parce qu’on a tué quelqu’un au milieu du village et que l’on n’a pas ramassé le sang ; est-ce pour cela que la pluie a cessé ? » (Labouret, 1957, p. 187).

32L’on retrouve ici la dimension plurielle de la terre développée par Strathern (2009) : propriété tangible et intangible, matérielle et immatérielle. Cette relation à la terre s’exprime alors dans un double sens, « la terre nous appartient », relation qui renvoie à des processus d’appropriation des ressources et « nous appartenons à la terre », laquelle est source de vie et de fécondité pour les hommes [26]. Finalement, humains et non-humains : or, sang, pluie, collines et génies jouent une semblable partition qui transcende la dichotomie entre orpailleurs étrangers et autochtones. Les uns et les autres finissent par se retrouver sur une même terre et partagent une quête commune où prospérité et fécondité joueraient de concert dans un « climat » de paix. Et pour filer cette métaphore, gageons que les temps à venir, dans tous les sens de cette expression, seront plus cléments.

Notes

  • [1]
    Chacun de ces acteurs présentant un degré certain d’hétérogénéité interne.
  • [2]
    Nous sommes loin du peloton d’exécution conté par G. Balandier à deux reprises (en 1948 et en 1957) en Guinée pour une pépite d’or « vivant » vite tuée afin d’être vendue.
  • [3]
    Et également aux ancêtres du découvreur, si leur contribution, à l’origine de la trouvaille de la pépite, est établie lors de la consultation (Mégret, 2008).
  • [4]
    Michèle Cros travaille avec Diniaté Pooda depuis de nombreuses années dans le cadre d’une exploration dessinée de la région (Cros, 2017). Diniaté Pooda est un cultivateur lobi qui a été aussi devin. Il est aujourd’hui planteur en Côte d’Ivoire. Il n’a pas assisté à cet événement dramatique, il était alors dans ses plantations. À son retour au Burkina Faso, en décembre 2017, il a mené l’enquête à sa façon. Il en livre une version imagée. La constatation d’Héritier (2017), évoquant un « choc esthétique pour rendre compte des horreurs de la guerre » dans la préface de l’ouvrage Déflagrations, peut ici être dupliquée.
  • [5]
    Pour l’ensemble des encadrés de cet article, l’anonymat des personnes interviewées a été conservé, comme cela avait été requis au moment de la conduite des entretiens.
  • [6]
    Il s’agit de la grande marche initiatique qui se déroule tous les sept ans et au sujet de laquelle il sied de ne pas parler. Le fait dramatique évoqué ici sous une forme elliptique s’est produit en 2006.
  • [7]
    Le lobiri est la langue lobi.
  • [8]
    Bien que les billets de l’or garantissent rarement un enrichissement pérenne (Cros, Mégret, 2017).
  • [9]
    Cela est encore plus vrai pour les espaces sacrés lobi, en particulier les papu para ou lieux dangereux occupés par les génies et dans lesquels les humains ne peuvent aller sans respecter nombre de règles et d’interdits. Ces espaces finissent par attiser la curiosité et la convoitise des orpailleurs les plus téméraires.
  • [10]
    Les références métaphoriques aux films d’action et notamment aux films de guerre (Rambo, Chasse à l’homme, Delta Force…) pour nommer les lieux et les personnes sont prégnantes dans l’univers des camps miniers (De Boeck, 2004 ; Mégret, 2013b).
  • [11]
    Les orpailleurs désignent ainsi les tranchées d’extraction aurifère qui cherchent à suivre le filon en vue de l’exploiter.
  • [12]
    Parfois également appelé « fossé », il désigne une zone d’exploitation a priori ouverte par le passé et que les orpailleurs ont remis en chantier.
  • [13]
    À Fofora, les orpailleurs ont surnommé une ligne d’extraction « galla, galla ! » qui signifie « partez, partez ! » en lobiri. C’est l’une des premières « lignes » que les orpailleurs sont parvenus à conquérir. Une autre zone d’exploitation, située à quelques kilomètres de là, près du village de Bantara, nous a été traduite en français par « ligne où l’on machette les gens ».
  • [14]
    Par exemple des membres de « comptoirs » privés d’achat et d’exportation de l’or ou des big men locaux ayant connu une ascension importante dans l’orpaillage et qui cherchent à préserver leur leadership en se rendant incontournables sur certaines zones d’exploitation. Les « porte-parole » des orpailleurs ne sont pas toujours clairement désignés ou reconnus comme tels par l’ensemble de la communauté minière. Dans certains cas, ils ne sont considérés comme interlocuteurs légitimes que par les autorités, une part de la communauté des orpailleurs leur reprochant par exemple de ne représenter d’abord et surtout que leurs intérêts propres.
  • [15]
    Pour une description et une analyse de ces structures et de leur fonctionnement, voir Arnaldi di Balme, Lanzano (2013).
  • [16]
    Initialement en raison de leur usage des arcs et de flèches empoisonnées. Cette arme a d’ailleurs été mobilisée à l’occasion des divers affrontements avec les chercheurs d’or. Si les situations sont foncièrement différentes, cette expression résonne aujourd’hui de façon inattendue dans le contexte de ce front minier ouest-africain, traçant de singulières mais néanmoins lointaines correspondances avec le célèbre Far West, cette conquête si caractéristique de l’histoire nord-américaine.
  • [17]
    Une proposition qui se présente néanmoins comme une forme d’imposition masquée à bien des égards.
  • [18]
    Une roche très dure dépourvue en or.
  • [19]
    Un petit groupe ethnolinguistique qui réside au sud du département de Kampti, non loin de la frontière avec la Côte d’Ivoire.
  • [20]
    Plat quotidien préparé par les creuseurs au bord des tranchées aurifères, composé de haricot, de riz et assaisonné d’huile.
  • [21]
    Pour plus d’images relatives à cette « entente », voir Cros, Mégret (2017).
  • [22]
    Une forme de forum shopping (Von Benda-Beckham, 1981) où les acteurs testent la capacité d’agir des différentes institutions dans ce contexte de frontière de l’orpaillage.
  • [23]
    Un aperçu des relations tendues en matière de « mariages non signés » opérées par nombre d’orpailleurs avec des jeunes filles et femmes autochtones qui ne sont pas du goût des hommes lobi est livré ailleurs (Cros, Mégret, 2009).
  • [24]
    Dans certains cas particuliers, les Lobi se considèrent impuissants et font appel aux populations loron ou koulango du nord de la Côte d’Ivoire. Ils considèrent avoir reçu de ces groupes la maîtrise rituelle déléguée de la terre, laquelle reste cependant limitée à la résolution de certaines problématiques ordinaires.
  • [25]
    Lorsque de trop nombreux accidents surviennent, il arrive que l’on entende des rumeurs du type : « La colline veut bouffer trente personnes. » Les autochtones peuvent alors être consultés pour trouver l’origine de ces accidents répétés et interrompre l’éventualité de cette série macabre.
  • [26]
    Sur le sujet, voir Le Meur (2010, p. 94).
Français

En octobre 2017, un violent conflit éclate dans le Sud-Ouest burkinabè. Il oppose des autochtones lobi à des chercheurs d’or migrants. Le sang a coulé et le marché d’un site d’orpaillage a été incendié. À la suite de ce tragique fait divers, des tensions latentes se muent soudainement en conflit ouvert, révèlent la liminalité du statut des orpailleurs dans cette région et interrogent les fondements de leur économie morale. À partir du croisement de données ethnographiques recueillies par les deux auteurs, cet article offre le point de vue singulier et contrasté d’acteurs locaux, permettant d’éclairer les logiques sous-jacentes à cet affrontement.

  • orpaillage
  • extractions minières
  • conflit
  • Burkina Faso
  • Lobi
  • non-humains

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Michèle Cros
Michèle Cros est professeure d’anthropologie à l’université Lumière/Lyon-2 et chercheure au LADEC.
Quentin Mégret
Quentin Mégret est chercheur postdoctoral à l’Institut d’ethnologie de l’université de Neuchâtel.
Mis en ligne sur Cairn.info le 13/03/2020
https://doi.org/10.3917/afco.267.0113
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