CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Une institution aussi consacrée de l’univers savant que le prix Nobel est le produit d’une entreprise économique et politique en même temps que scientifique, dont le pouvoir de consécration est pour une grande part lié au degré de reconnaissance qu’elle est parvenue à conquérir, au capital symbolique qu’elle a accumulé depuis ses origines [1]. La trajectoire d’Alfred Nobel, qui le rapproche plus des lauréats du concours Lépine que de Pasteur ou d’Einstein [2], ne le prédisposait pas particulièrement à devenir le symbole de la recherche scientifique fondamentale dans ce qu’elle a de plus « pur » : la « découverte » empirique ou théorique [3]. Et il a fallu un immense travail d’« universalisation », en particulier de « dénationalisation », souhaitée par Nobel dans son testament [4], pour parvenir à créer une instance de consécration scientifique internationale largement reconnue, qui surplombe les instances proprement nationales comme la médaille d’or du CNRS ou ses équivalents dans les différents pays. Ce processus d’accumulation de capital symbolique a contribué à unifier le champ scientifique mondial [5] et à le rapprocher de l’idéal mertonien de l’universalisme, selon lequel l’attribution de la valeur d’un produit scientifique ne peut se fonder sur les caractéristiques particulières de son auteur (statut académique, nationalité, genre, origine sociale, etc.). En même temps, l’attribution du prix n’a jamais cessé d’être hantée par l’enjeu de la concurrence internationale au sein du champ scientifique, chaque nomination pouvant être perçue comme biaisée par les hiérarchies entre les espaces nationaux [6]. C’est dans ce contexte de l’histoire longue et difficile de la construction d’une légitimité et d’une crédibilité scientifiques internationales [7] qu’est apparu le « prix de science économique en mémoire d’Alfred Nobel », instauré en 1968 et attribué pour la première fois l’année suivante [8].

Économie d’un prix d’économie

« Avant de se tourner vers les problèmes spécifiques de la distribution de prix pour les contributions à la recherche en économie, il faut se poser des questions générales : est-il raisonnable et utile en quoi que ce soit de donner des prix pour la réussite scientifique et académique ? Personnellement, je répondrais qu’il y a au moins une bonne raison pour cela : cela donne l’occasion de montrer au grand public au moins une fois par an (!) qu’il y a d’autres « héros » dans le monde que les athlètes, les artistes, les pop stars, les politiciens, et autres groupes d’animateurs et de décideurs qui dominent l’actualité des mass media. Cela peut être un message socialement valable, parce qu’à la fois les ressources dévolues à la recherche et le recrutement de talents pour les carrières de recherche pourraient, autrement, être sous-optimaux. La distribution de prix procure de l’information à la fois aux politiciens et au grand public et peut contribuer à la promotion d’attitudes favorables à l’égard du travail scientifique et des carrières académiques. Il est aussi raisonnable de faire l’hypothèse qu’un prix important et hautement prestigieux comme le Prix Nobel peut servir, dans une certaine mesure, comme incitation à une recherche de haute qualité auprès d’un nombre considérable de chercheurs – en faisant l’hypothèse que ceux-ci ne sont pas voués à la vanité et à l’envie, caractéristiques que les chercheurs observent souvent parmi les personnes qui réussissent dans d’autres champs. Il y a cependant un risque que la qualité du travail de recherche du lauréat du prix se dégrade après sa gloire, du fait de la publicité excessive, des perturbations et des tentations d’apparaître comme une autorité à l’extérieur de son propre domaine de compétence. Cependant, ce type d’effet n’a pas été beaucoup observé dans le domaine de l’économie.
[...] Si l’on se tourne plus spécifiquement vers l’économie, on peut aussi arguer qu’il est utile de montrer au grand public que le progrès scientifique a lieu non seulement dans les sciences de la nature mais aussi sur les questions sociales, y compris les phénomènes économiques, c’est-à-dire dans un domaine sur lequel les gens obtiendraient principalement de l’information, autrement, dans le contexte des controverses politiques. De plus, quand on donne de la publicité à des récompenses, cela permet non seulement à certaines personnes d’être familières des lauréats et de leurs contributions, mais cela peut les inciter à lire certains livres ou articles écrits par les lauréats eux-mêmes. On peut espérer, dans une perspective de longue durée, que cela accroisse dans une certaine mesure la connaissance sur la science économique à la fois dans les mass media et dans le grand public. Le dernier argument est en quelque sorte similaire à l’idée selon laquelle un prix littéraire peut rendre les mass media et le grand public conscients des travaux littéraires d’auteurs qu’ils ne connaîtraient jamais autrement, et stimulés à les lire. Bien sûr, à long terme, la question de savoir si un prix comme celui-ci est un moyen efficient de supporter la science économique dans le monde ou en Suède est une question de jugement personnel ».
Assar Lindbeck, « The Prize in Economic Science in Memory of Alfred Nobel », Journal of Economic Literature, vol. XXIII (March 1985), p. 47-48 (traduction FL).

Un prix singulier

2La particularité du « prix Nobel d’économie » tient d’abord au détournement de capital symbolique qui le fonde : il a été créé à l’initiative d’une Banque centrale, la Sveriges Riksbank (« banque royale de Suède »), et il est doté par elle (et non par la Fondation Nobel) d’un montant annuel d’environ 1,2 million d’euros en 2001 [9]. C’est le gouverneur de la Banque royale de Suède, Per Asbrink, qui est à l’origine de cette création [10]. Selon Assar Lindbeck, qui en fut le principal promoteur académique, Per Asbrink prit d’abord contact avec le conseiller économique de la banque, c’est-à-dire Assar Lindbeck lui-même, ainsi qu’avec Erik Lundberg et Gunnar Myrdal (futur prix Nobel, mais aussi l’un des seuls lauréats à avoir par la suite contesté la légitimité de ce prix). Puis la banque s’adressa à la Fondation Nobel et à l’Académie royale des sciences de Suède, où elle rencontra une forte résistance, surmontée notamment par Gunnar Myrdal. C’est en mai 1968 que l’accord des trois institutions, Fondation Nobel, Académie royale des sciences et Banque centrale est acquis.

3L’idée même de ce prix aurait sans doute amusé l’inventeur Alfred Nobel qui n’y avait jamais songé. On pourrait même dire que son nom a été en quelque sorte acheté par la Banque centrale à l’Académie royale des sciences de Suède. En échange, elle a parrainé et accueilli le « prix de science économique en mémoire d’Alfred Nobel », lui a offert ses procédures formelles d’élection (avec le rôle central dévolu au comité Nobel, la consultation de chercheurs internationaux, qui constitue le « système de présentation », le vote de l’Académie royale des sciences, etc.), son décorum (la cérémonie de remise du prix, la médaille en or, le « diplôme illustré par une œuvre picturale symbolique »). Peut-être lui a-t-elle surtout offert la simultanéité de la désignation de son lauréat, au début du mois de novembre, et de la remise du prix (le 10 décembre), avec celles des prix voulus par Alfred Nobel, élément essentiel d’une magie sociale qui fonde l’illusion tout en construisant l’identité du prix.

4Le prix cache un hommage du vice à la vertu : une institution du monde économique dépense chaque année une (petite) somme d’argent, qui n’est pas issue des intérêts de l’héritage Nobel, mais de ses propres ressources pour pouvoir accoler à la récompense qu’elle octroie à un chercheur désigné par ses pairs le prestigieux nom de Nobel, dépositaire du capital symbolique associé à la recherche fondamentale dans les sciences empiriques et, plus largement, à la définition dominante de l’universel : le Beau, avec le prix Nobel de littérature [11], le Bien avec le prix Nobel de la paix et la Vérité avec les trois prix scientifiques. L’abus généralisé, dans la presse, l’édition et chez les chercheurs eux-mêmes, de l’expression « prix Nobel » à propos de ce prix « en mémoire d’Alfred Nobel » illustre la parfaite réussite de cette opération de conversion symbolique qui relève à proprement parler de la magie, et dont la plupart des commentateurs, y compris les plus critiques, se gardent de contester le fondement même [12].

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5Événement annuel ritualisé qui permet à la science – dans ses manifestations les plus formelles – d’accéder à un public élargi en donnant lieu à des articles de vulgarisation qui sont autant d’entreprises de pédagogie, voire d’édification, des « masses » (encadré page précédente), la nomination du « Nobel d’économie » est l’occasion de réaffirmer la place éminente de la discipline dans la hiérarchie des sciences, juste après les sciences de la nature les plus légitimes. Alors même que la valeur de son capital spécifique était menacée par des contestations internes et externes, l’économie s’est ainsi dotée, depuis 1969, d’un panthéon de savants contemporains, auxquels certains auteurs n’hésitent pas à attribuer une partie de la prospérité du monde occidental après la Seconde Guerre mondiale (encadré page suivante). Le prix offre une garantie opposable à toute remise en cause par d’autres sciences sociales, que la distance qui les sépare de la science économique et leur division en conceptions, pratiques et méthodes diverses, condamnent à une moindre visibilité publique. Le « prix Nobel d’économie » marque ainsi symboliquement la distance entre l’économie – la « plus scientifique des sciences sociales » – et les autres. Mais, de plus, il permet de protéger la dernière venue au club des disciplines consacrées par l’Académie de remises en cause issues des disciplines scientifiques qui l’y ont précédée.

Une entreprise morale

6Le foisonnement de discours hagiographiques sur les économistes trouve avec le « prix Nobel » son couronnement dans la production de biographies et d’autobiographies officielles (voir en particulier les sites web qui leur sont consacrés, à commencer par le site officiel de la Fondation Nobel) [13], à travers lesquelles la cité savante met en scène ses vertus, en particulier les capacités créatrices des chercheurs, leur aptitude à la formalisation de problèmes économiques perçus comme intrinsèquement difficiles. Dans les sciences comme en politique ou en littérature, le Nobel est une entreprise morale spécifique : il désigne au public des êtres exemplaires et crédite des œuvres particulières d’une valeur universelle (à laquelle ne peuvent prétendre que des savants et des œuvres aux propriétés, précisément, « extraordinaires ») [14]. C’est en ce sens que le travail de construction biographique qui l’accompagne remplit une fonction sociale décisive : l’incarnation des normes de la communauté savante.

7En économie, la figure du « savant » est représentée par des trajectoires académiques très diverses [15] : au début du prix, elles étaient d’ailleurs souvent issues des sciences de la nature ou des mathématiques. Mais le prix a contribué à asseoir la légitimité académique de la discipline économique qui s’est affirmée au cours de la période : les lauréats sont de plus en plus souvent de « purs » économistes, de plus en plus souvent issus des départements économiques les plus prestigieux des universités américaines. Le « prix Nobel » s’inscrit dans un travail plus général de standardisation et de « professionnalisation » [16] de la discipline économique qui se traduit par l’adoption, dans les différents pays du monde, des canons scientifiques produits aux États-Unis et par l’importance croissante du passage initiatique par les États-Unis dans les carrières académiques les plus prestigieuses [17]. Cette tendance à l’unification sous domination américaine n’a pas réduit à néant la spécificité des champs nationaux, mais elle contribue par exemple à l’apparition de clivages internes entre « internationaux » (américains) et « nationaux ». Si certains résultats récents indiquent que des « non-Américains » s’immiscent de plus en plus souvent dans les grandes revues académiques américaines [18], tout en restant très minoritaires, la science économique ne connaît pas pour autant un processus de « dénationalisation » [19]. Les caractéristiques des lauréats du prix de science économique font au contraire apparaître une américanisation incontestable depuis 1969 (voir graphique).

Les Nobel d’économie nés aux États-Unis

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Les Nobel d’économie nés aux États-Unis

8Le « prix Nobel d’économie » contribue avec force à l’imposition et à la généralisation d’une conception particulière de la discipline économique. Il facilite la promotion d’une vision en affinité avec la philosophie sociale libérale de l’ordre économique, que ses lauréats conçoivent comme un ensemble de marchés et d’acteurs rationnels qui cherchent à tirer le meilleur parti de leur dotation initiale. Depuis sa création, le prix a de moins en moins consacré des économistes « keynésiens » et de plus en plus des « ultralibéraux » ; parallèlement, il se déplaçait dans l’espace mondial, de l’Europe et de Harvard vers Chicago et Columbia et les lauréats étaient de plus en plus souvent passés au cours de leur carrière par le monde de l’entreprise privée et de moins en moins par le champ politique ou bureaucratique.

Des héros positifs de l’économie mondiale

« Quarante-neuf économistes ont reçu le prix Nobel depuis sa création en 1969 à l’occasion du tricentenaire de la Banque royale de Suède. Ces lauréats, qui sont tous des scientifiques de très haut niveau, ont, comme leurs travaux le prouvent, façonné la pensée économique contemporaine. Leur champ d’investigation couvre l’ensemble des questions qui se posent aux citoyens du monde : croissance, développement, répartition des richesses, commerce international, politique fiscale, monnaie, marché, gestion des entreprises, justice sociale…
C’est, sans doute, grâce à leurs recherches et à leurs propositions de solutions, que l’économie mondiale a pu progresser aussi rapidement depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Leur objectif est toujours double, ils veulent non seulement atteindre l’optimum économique en favorisant la création de richesse mais aussi l’optimum social en améliorant la répartition et la satisfaction des consommateurs. Pour eux, seul l’intérêt général compte, c’est pourquoi on peut regretter qu’ils ne soient pas plus souvent étudiés car sur un très grand nombre de sujets d’actualité, ils proposent des explications et des solutions qui reposent sur une démarche scientifique et de ce fait qui excluent les approximations, les sophismes et bien sûr toute démagogie.
Les Nobel d’économie ont très souvent ouvert des voies nouvelles qui permettent aux jeunes chercheurs d’explorer des thèmes comme : les politiques d’incitations, l’information, l’éducation, l’organisation des villes, la liberté, la sécurité, des domaines qui vont sans aucun doute marquer profondément nos conditions de vie. »
(D. Roux, Nobel en économie, Paris, Economica, 2e éd. 2002, quatrième de couverture)

9Les « prix Nobel » d’économie vivants ne se contentent d’ailleurs pas d’incarner aujourd’hui la conception dominante de la théorie néoclassique, dans toutes ses variantes intellectuelles, des plus critiques aux plus conservatrices, de Cambridge à Chicago : ils sont aussi pour la plupart disposés à répondre à la demande médiatique et politique de prises de position sur l’avenir (économique et politique) du monde, à l’image de Milton Friedman prophétisant l’échec certain de l’euro. En 2000, il n’y a pas eu moins de sept lauréats américains du « prix Nobel de science économique » qui sont intervenus dans la campagne présidentielle américaine pour soutenir leur candidat, le républicain George W. Bush : à côté du ferme soutien des compagnies les plus puissantes, il pouvait ainsi s’autoriser de l’appui non moins solide d’un échantillon important, quoique non représentatif, d’éminents représentants de la science économique contemporaine [20].

Notes

  • [1]
    Voir sur ce point les travaux de E. Crawford et, en premier lieu, The Beginnings of the Nobel Institution. The Science Prizes 1901-1915, Cambridge, Cambridge University Press, 1984 ; trad. française, Paris, Belin, 1988.
  • [2]
    Alfred Nobel était avant tout un entrepreneur et un inventeur d’explosif, dont la fortune repose pour l’essentiel sur les liens qu’il a su établir entre son entreprise et le développement de la commande militaire. Au début des années 1950, un colonel de l’armée française relevait, non sans exagération sans doute, que « voulant récompenser les hommes de paix et les rendre riches et indépendants, Nobel aboutit en définitive à nourrir et à glorifier les plus puissants auxiliaires de l’armement guerrier », cité par H. Cuny, Nobel de la dynamite et les prix Nobel, Paris, Les Éditeurs français réunis, 1970, p. 140.
  • [3]
    Les prix Nobel couronnent en théorie des « découvertes » et non des « savants ». En pratique, la personnalisation de l’attribution du prix atteint un degré très élevé, comme l’illustre l’importance du travail biographique et autobiographique auquel il donne lieu.
  • [4]
    « C’est mon vœu le plus exprès qu’il ne soit fait, dans l’attribution des prix, aucune considération de nationalité de quelque ordre que ce soit, et que le plus digne reçoive le prix, qu’il soit ou non d’origine scandinave », cité dans H. Cuny, Nobel de la dynamite, op. cit., 1970, p. 78.
  • [5]
    Voir P. Bourdieu, Science de la science et réflexivité. Cours du Collège de France 2000-2001, Paris, Raisons d’agir, 2001. Pierre Bourdieu intègre l’apport de la tradition mertonienne tout en mettant en évidence les limites de la vision enchantée du champ scientifique qu’elle produit.
  • [6]
    L’enjeu s’exprime de façon très directe à travers ce qu’Elisabeth Crawford appelle le « système de présentation » des candidats. L’indice de chauvinisme qu’elle construit présente des valeurs très élevées, entre 1901 et 1915, pour la France, la Grande-Bretagne ou les États-Unis. En 2001, l’attribution du prix Nobel de chimie a fait l’objet d’une contestation émanant de la communauté des chimistes français. Voir D. Astruc, « Le Nobel de chimie volé à Henri Kagan », Le Monde, 16 octobre 2001. On peut y lire que « [le processus de désignation] repose en partie sur une consultation internationale, mais surtout sur les propositions des lauréats des prix Nobel antérieurs. Or en chimie, ceux-ci sont à 80 % américains, et l’on sait bien qu’il existe une grande solidarité outre-Atlantique pour proposer des chimistes américains ».
  • [7]
    Pour une analyse des multiples dimensions de la « dénationalisation » de la science contemporaine, voir en particulier E. Crawford, T. Shinn et S. Sörlin (sous la dir. de), Denationalizing Science : The Contexts of International Scientific Practice, Dordrecht-Boston-Londres, Kluwer Academic Publishers, « Sociology of Sciences. Yearbook 1992 », 1993.
  • [8]
    Voir A. Lindbeck, « The prize in economic science in memory of Alfred Nobel », Journal of Economic Literature, vol. XXIII, mars 1985, p. 37-56. Assar Lindbeck, membre, entre 1969 et la fin des années 1990, du comité Nobel et personnage central de l’institution, est l’un des seuls auteurs à avoir écrit sur la naissance du prix : on peut s’en étonner dans la mesure où les origines d’une institution sont souvent riches d’enseignement sur leurs fonctions et leurs formes de légitimité. Pour un ouvrage récent contribuant à la mise en scène apologétique du prix, qui est sa principale modalité d’existence en France (peut-être faute de lauréats depuis Maurice Allais), voir D. Roux, Nobel en économie, Paris, Économica, 2002.
  • [9]
    Au montant du prix que la banque reverse à la Fondation s’ajoute le montant des frais de fonctionnement. Voir D. Roux, ibid.
  • [10]
    Per Asbrink a contribué, plus largement, à la promotion de la science économique dans l’univers des banques centrales. Aujourd’hui, toutes les grandes banques centrales sont dotées de départements d’études économiques relativement « académiques » et la carrière au sommet des banques centrales fait partie du champ des possibles pour les économistes universitaires, en particulier dans le monde anglo-saxon. Voir F. Lebaron, « The space of economic neutrality. trajectories and types of legitimacy of central bank managers », International Journal of Contemporary Sociology, 37, 2, octobre 2000, p. 208-229. Le « prix Nobel d’économie » est donc une forme particulière d’un échange : entre capital symbolique à fondement scientifique et capital symbolique de nature politico-économique.
  • [11]
    Pour une analyse d’un phénomène identique de construction d’un prix réellement « international », voir P. Casanova, La République mondiale des lettres, Paris, Le Seuil, 1999.
  • [12]
    C’est pourtant dans les écrits de certains « Nobel » eux-mêmes, en premier lieu Gunnar Myrdal en personne, que l’on trouve les critiques les plus radicales de l’institution.
  • [13]
    Adresse électronique : www. nobel. se.
  • [14]
    Voir, pour un condensé de cette philosophie sociale, S. Nasar, A Beautiful Mind : A Biography of John Forbes Nash, Jr., New York, Simon and Schuster, 1998 ; trad. française, Un cerveau d’exception : de la schizophrénie au prix Nobel, la vie singulière de John Forbes Nash, Paris, Calmann-Lévy, 2001. L’un des intérêts de l’ouvrage est d’ouvrir la boîte noire des luttes internes aux instances d’évaluation des prix, en premier lieu le Nobel, mais de manière très anecdotique.
  • [15]
    Voir F. Lebaron, La Croyance économique. Les économistes entre science et politique, Paris, Le Seuil, 2000. Les données résumées ici ont également fait l’objet d’une présentation dans le cadre du colloque « L’organisation sociale de l’économie », organisé par le CLERSE à l’université de Lille, en juin 2001, sous le titre : « L’internationalisation du champ de la science économique et la construction d’un nouvel ordre mondial : déclin ou persistance des particularités nationales ? » Elles feront l’objet ultérieurement d’une publication systématique.
  • [16]
    A. W. Coats, British and American Essays, vol. II, The Sociology and Professionalization of Economics, Londres-New York, Routledge, 1993.
  • [17]
    Voir les travaux menés autour de A. W. Coats, par exemple The Post-1945 Internationalization of Economics, Durham, Duke University Press, 1997.
  • [18]
    Voir par exemple P.-P. Combes, L. Linnemer, « L’impact international des articles de recherche français en économie », document de travail, 2001.
  • [19]
    Voir E. Crawford, T. Shinn et S. Sörlin (sous la dir. de), Denationalizing Science, op. cit.
  • [20]
    Les « Nobel d’économie » sont très sollicités par les journalistes et les responsables politiques. On peut donc s’étonner que seuls sept d’entre eux aient accepté de soutenir le candidat le plus clairement acquis à l’économie de marché, alors que quelques-uns voient, parfois malgré eux, leur nom associé à des organisations critiques (Tobin) ou sont même considérés comme des contestataires lorsqu’ils remettent en cause, quoique fort timidement, les « effets de la mondialisation » (Stiglitz).
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/12/2010
https://doi.org/10.3917/arss.141.0062
Pour citer cet article
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