En France, le secteur agricole a été véritablement révolutionné au cours des trois décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale. Durant ce laps de temps, l’agriculture française est sortie de son archaïsme pour devenir l’une des principales exportatrices de produits agricoles et agroalimentaires du monde, ayant même récemment parfois occupé la première marche du podium. Les productivités de la terre et du travail se sont accrues très rapidement. Pourtant, ici aussi, ce succès incontestable, dû essentiellement à la modernisation de l’agriculture, a soulevé de nombreuses critiques, principalement en raison de conséquences négatives involontairement occasionnées par le processus de modernisation. Un aspect intéressant de ces controverses pour notre discussion est l’utilisation du mot « productivisme » pour décrire à la fois les excès de la modernisation, mais également la doctrine ayant sous-tendu de nombreuses politiques publiques dont l’objectif était de promouvoir la modernisation de l’agriculture. Ce terme traduit bien la conviction des décideurs de l’époque quant à la nature du processus de modernisation, qui devait être la recherche des gains de productivité. Remarquons ici que cette conception n’est pas différente en soi de celles qui ont été décrites précédemment. Par conséquent, le débat sur le productivisme en France présente un intérêt pour une réflexion à l’échelle mondiale. Je commencerai par passer brièvement en revue le processus de modernisation qui a transformé l’agriculture française depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, puis je présenterai l’évolution du débat et des controverses au cours de ce processus, avant de finalemen…