« C’est quoi ce pays de merde ?!!! » C’est le cri lancé par Christophe Martet, président d’Act-Up Paris, lors de la soirée du Sidaction du 6 juin 1996. Il est sur un plateau qui réunit les principales chaînes de télévision pour cette grande manifestation dédiée à la récolte de fonds pour la lutte contre le sida. Christophe Martet est invité pour parler de lui, gay et militant, « séropo » avec son copain séronégatif. Au moment de prendre la parole pour parler des couples sérodiscordants, le militant change d’avis. « Il y a un avion pour le Zaïre mardi, elle a un gamin malade dans un hôpital français, si on n’est pas là mardi avec elle à la préfecture elle va se faire expulser ! » Il s’arrête et reprend : « C’est quoi ce pays de merde ?!!! » Après un silence de quelques secondes, il tance le ministre de la Santé, Philippe Douste-Blazy : « Vous êtes un assassin ! » Il quitte le plateau.
Pour la première fois, le problème de la situation administrative des immigrés africains infectés par le VIH est porté sur la place publique, au cours d’une soirée qui s’annonçait consensuelle. Le lendemain, les commentaires des médias parlent d’« émotion », de « dérapages » pour résumer ce qui restera le premier événement positif et public pour la prise de conscience des exclusions dont sont victimes certains immigrés, les prisonniers, les enfants, les toxicomanes. De la part d’un militant gay séropo, c’est le signe précurseur d’une lente action de « salubrité publique », non linéaire. Il convient de rendre à César ce qui lui appartient…