CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Pour avoir suivi depuis plus de 15 ans les immigrés maliens en France, en particulier à partir des associations de ressortissants de la région de Kayes, je suis demeuré particulièrement attentif à leurs actions et leurs positionnements tant dans la société d’origine qu’en France. Par ailleurs, ces recherches, conduites dans la durée, m’ont permis de prendre la mesure des transformations importantes qu’a vécu cette région ainsi que le Mali, notamment depuis le début des années quatre-vingt. C’est à partir de ce regard à la fois de l’extérieur mais aussi inscrit dans la durée, que je situerai mon propos.
Parmi les sujets complexes situés au cœur des relations franco-maliennes, l’émigration/immigration éclaire, de façon récurrente et parfois aussi de façon passionnelle, la construction des représentations de l’Autre ainsi que l’intensité des liens entre les deux espaces, parfois ambivalents. En effet les Maliens défraient régulièrement la chronique médiatique, soupçonnés pour leur nombre d’illégaux et présentés comme exemple, parfois de façon péjorative, de la « culture africaine » telle qu’elle est censée se donner à voir en France. Dans un même mouvement, on le verra, ils sont parfois pris en quelque sorte en otage par les autorités françaises, lorsqu’il s’agit pour elles de convaincre les autorités maliennes de s’associer à la politique de contrôle des migrations. De fait, la négociation autour des dispositifs du « codéveloppement » constitue, on le sait, l’un des dossiers récurrents porté par la partie française dans le cadre des relations bilatérales franco-maliennes…

Français

A plus d’un titre, la communauté malienne émigrée est révélatrice de la forte ambivalence du regard dominant en France, concernant à la fois les immigrés et, plus généralement, le Mali. Ces immigrés sont à la fois trop présents en France, par leur nombre supposé fortement exagéré ou encore par leur implication dans de nombreux mouvements sociaux (à propos du droit au logement ou encore au séjour) ; mais, également, pas assez, car considérés comme non intégrables. Ils sont captivants pour les uns, pour les valeurs culturelles qu’ils portent ; ou au contraire renvoyés à la dimension archaïque de ces mêmes valeurs pour les autres, ces valeurs étant dans tous les cas coupées de leur contexte. Enfin, ils sont trop présents dans leurs villages d’origine, par leurs envois d’argent et leurs activités associatives qui ont permis d’y multiplier les infrastructures sociales ; mais en même temps critiqués pour ne pas avoir financé de réalisations considérées comme « créatrices d’emplois ». L’article s’efforce de relever ces ambivalences et de déconstruire les préjugés souvent ethnocentristes et stigmatisant sur ces questions.

Christophe Daum
Christophe Daum, Université de Rouen, Département de sociologie ; Unité de recherches Migrations et société (Universités Paris 7-Paris 8-Nice-Sophia –CNRS.UMR 7032).
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Mis en ligne sur Cairn.info le 05/06/2018
https://doi.org/10.3917/kart.gemd.2005.01.0363
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