Chapitre
Éternel féminin ou continent noir, Vierge ou salope nourrissent l’imaginaire collectif ; l’imaginaire collectif avec ses fantasmes œdipiens, qui colmatent ce qui de la féminité lui échappe, le fascine et lui fait horreur : le Féminin. Féminin pousse-au-crime, pousse-à-désirer, pousse-à-idéaliser, pousse-à-analyser, Féminin pousse-à-sublimer, à-créer – Balthus et ses étranges fillettes lascives, Bellmer qui ficelle, strangule et décapite ses poupées, à leur faire rendre l’âme… Du creux de la division féminine, Marguerite Duras parle : « On n’écrit pas du tout au même endroit que les hommes et quand les femmes n’écrivent pas dans le lieu du désir, elles n’écrivent pas, elles sont dans le plagiat. » Elle parle, et Lacan lui rend hommage : « Marguerite Duras s’avère savoir sans moi ce que j’enseigne. » Et que sait-elle ? que la femme n’est pas-toute à faire l’homme. Qu’assujettie à la castration, elle n’y est pas-toute soumise. Mais de l’empreinte du pas-tout, l’homme, non plus, n’est pas indemne : effets de création quand l’artiste est saisi de l’irreprésentable – Rilke évoque « le retour en une région que jamais personne n’a foulée » –, et pourquoi pas, effets d’interprétation quand l’analyste – porté par un désir hors-lieu, sans Sujet et sans objet – se laisse surprendre par ce qu’il dit qui le dépasse.
Ce n’est pas du développement psychogénétique, ou métapsychologique de la fille dont je souhaite traiter, mais du destin adolescent de cette « part de l’ombre », selon l’expression de Monique Schneider, au cœur de la libido : le Féminin, sans image dans le miroir, sans mot pour se dire, sans adresse, lieu d’un trou, que bordent les représentations et le langage qui sexualisent le Réel…
Auteur
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[*]
Psychanalyste, psychologue à la pjj.
- Mis en ligne sur Cairn.info le 01/04/2010
- https://doi.org/10.3917/eres.lesou.2001.01.0159
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