Chapitre
Personne n’aurait parié un sou sur son incroyable longévité. Cette tête folle n’aurait pas dû survivre. Longtemps, il lui manqua du plomb dans la cervelle, au point de se jeter à corps perdu dans des aventures périlleuses. Dix fois, cent fois, à terre ou en mer, une balle anglaise, un sabre de barbaresque ou de dragon aurait pu l’étendre raide mort. Longtemps, la mort ne voulut pas de lui. En Méditerranée il côtoya la peste et à Saint-Domingue la fièvre jaune. Alors que sur les mers la marine anglaise régnait en maîtresse, jamais il ne fut capturé au cours de ses nombreuses traversées. Jérôme Bonaparte possédait sans doute une bonne étoile, de celles qui vous préservent miraculeusement. Courageux ou inconscient ? Sans doute les deux à la fois. Son indicible orgueil lui donna aussi une irréductible confiance en lui. Jérôme en était persuadé, sa majesté n’était pas un accident de l’histoire.
En 1814, tandis que l’Empire de son frère s’écroulait avec fracas, il n’entendait pas changer de position. On l’avait injustement spolié de son trône westphalien et il exigeait réparation. À l’Autrichien Metternich, il demanda une légation, celle de Bologne, et au tsar Alexandre, il réclama Gênes. Son toupet n’avait d’égal que son ignorance. Pour les vainqueurs de Napoléon qui s’apprêtaient à redessiner la carte de l’Europe, aucun Bonaparte ne devait plus régner ne serait-ce que sur une misérable principauté. La relative liberté de Napoléon sur l’île d’Elbe donnait déjà la migraine aux diplomates et on s’activait en coulisse pour détrôner Murat…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 08/09/2021
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