Chapitre
Laissée à ceux qui ne dominent ni ne possèdent, la rue est plus qu’un lieu de passage, une façon brutale et inévitable d’exister. Espace visible, la rue en quelque sorte révèle l’essentiel des corps et des choses ; ici, la vie se fabrique à coups de tendresse comme de violence. Subie comme réalité quotidienne, vécue de façon difficile et parfois tumultueuse, la rue rend visible une population largement déshéritée, qui n’a pas d’autre lieu pour régler ses conflits, se défendre du pire, inventer le plaisir ou la rébellion.
A ce titre, l’enfant y habite et y trouve sa place, quasi naturellement. Il occupe l’espace de ses activités ; sa silhouette familière, tantôt gracile, tantôt malingre, fait partie du paysage. De lui, on n’a souvent retenu que des images stéréotypées allant du petit Savoyard au jeune mendiant, de l’enfant abandonné au gosse en haillons. Il existe en effet dans la rue du XVIIIe siècle des petits Savoyards et des enfants abandonnés, mais aussi une foule d’enfants, de jeunes entre dix et seize ans, aux activités plurielles, aux fonctions relativement définies, qui tissent l’espace et le quartier d’une infinité de relations complexes avec le monde familial et celui du travail.
Chercher à définir l’enfant à travers son intégration à l’espace public et par l’ensemble de ses fonctions, c’est tenter d’appréhender de façon concrète les formes d’attention et de rigueur que la société lui portait, et s’éloigner des débats anachroniques et mal posés voulant à tout prix débusquer une mesure du sentiment de l’enfance, dont le modèle de départ serait le nôtre, ce qui, bien entendu, fausse tout regard sur l…
Plan
Auteur
- Mis en ligne sur Cairn.info le 01/01/2017
- https://doi.org/10.3917/plon.levym.1989.01.0043
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