Chapitre
Une des difficultés majeures, aujourd’hui, pour appréhender la transition à
l’euro et les problèmes psychosociologiques qui lui sont liés, est son caractère
essentiellement virtuel pour le plus grand nombre des Européens. Ceci tient bien
évidemment à sa filiation avec l’écu, european currency unit, qui n’était qu’une
unité de compte nécessairement très abstraite. Mais surtout, le nombre quotidien
d’opérations scripturales en euro est resté très longtemps infime, encore peu accéléré par la livraison de chéquiers en euro en France. Bien que l’euro soit devenu
en 1999 la monnaie nationale de douze pays européens et que leurs anciennes monnaies nationales n’en soient plus légalement que des subdivisions, le franc, le mark,
la lire, la peseta, etc. restent dans chacun de ces pays la référence car la monnaie
est essentiellement pensée par les populations sous sa forme « sonnante et trébuchante » ou plus généralement des billets. À quelques semaines de la disparition
des anciennes monnaies nationales, règne massivement une attitude attentiste dans
des populations qui, toutes catégories confondues, se disent : « On aura bien le
temps de voir quand il sera là. » Quand les caissières d’hypermarché demandent
à un client si son chèque est en euro ou en franc, il est fréquent que le client réponde :
« Non, normal : en franc », ou bien « Non, en franc français », comme si l’euro
était une monnaie étrangère.
À défaut de son usage courant, l’euro n’a pris corps qu’à travers des dessins
de journaux et de magazines et les métaphores personnifiantes (la naissance de
l’euro), religieuses (le passage, la conversion à), sportives (les critères de sélection pour entrer dans le club), qui abondent dans la presse et donnent une réalité
toute particulière à la monnaie nouvelle…
Plan
Auteur
- Mis en ligne sur Cairn.info le 01/04/2010
- https://doi.org/10.3917/dec.drach.2004.01.0259
![Chargement](./static/images/loading.gif)
Veuillez patienter...