Chapitre
Il peut paraître étonnant d’associer l’affaire Dreyfus à la pensée libérale. Cela serait à la fois anachronique et hors du contexte réel des débats de ce temps. Quelles étaient, en effet, les valeurs qu’exprimaient ses défenseurs ? D’abord, des valeurs de vérité et de justice. Ceux-ci pouvaient aisément en déduire l’incompatibilité de la raison d’État – ou, plus exactement, d’une certaine conception de celle-ci – et de la démocratie puisqu’un tel régime exige la précellence de chaque individu singulier sur les intérêts propres du « système ». Ils rappelaient également les fondements de l’idée de droits de l’homme, qui suppose l’égale dignité de tous les hommes et la récusation de toute forme de pensée raciste et antisémite. Par là, ceux qui réclamaient son innocence, dénonçaient les mensonges et les falsifications. Ils demandaient, après sa condamnation, sa réhabilitation. Ils luttaient en fonction d’une éthique propre, au sens wébérien, des intellectuels que Julien Benda devait ensuite exprimer dans La Trahison des clercs
. Si tout ce qui relève des droits s’inscrit dans la filiation du premier libéralisme politique, le lien avec une conception plus complète du libéralisme n’était pas intelligible à l’époque et n’est toujours pas perçu aujourd’hui.
Pourtant, sur tous ces points, c’est bien la philosophie libérale la plus pure qui est exprimée au point qu’on pourrait dire, pour paraphraser une formule célèbre, qu’un peu de libéralisme éloigne de l’Affaire et que beaucoup y ramène…
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Auteur
- Mis en ligne sur Cairn.info le 04/01/2016
- https://doi.org/10.3917/arco.ducle.2009.01.0111
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