Préjugé : croyance, opinion préconçue, souvent imposée par le milieu, l’époque, l’éducation.Préjuger : porter un jugement prématuré sur quelque chose ; considérer comme résolue dans tel ou tel sens une question qui ne l’est pas encore.
J’ai pensé modestement rassembler ici des souvenirs et des réflexions à propos de cette intrication inévitable entre culture, préjugés et pratique professionnelle : problème permanent pourtant peu abordé.
Pendant de longues années, je n’imaginais même pas que ma propre culture pouvait avoir un lien avec ma pratique. Ce n’était pas à proprement parler de la naïveté : d’une part, la question ne se posait pas puisque personne ne me la posait. Ma culture se confondait avec mon identité et donc je ne pouvais pas imaginer de l’imposer à qui que ce soit. C’était à n’en pas douter une erreur : si les tyrans imposent par la force leurs idées aux autres, il n’est pas nécessaire d’être un tyran pour émettre un jugement en fonction de ses propres normes. Avec la notion de neutralité bienveillante, le psychanalyste peut donner l’illusion d’y échapper mais c’est bien sûr un leurre et comme tout leurre, il risque d’être dangereux si on le confond avec la réalité. D’autre part, je vivais dans deux mondes effectivement séparés : ma vie familiale très privilégiée culturellement et intellectuellement avec des parents ayant émigré avant et pendant la guerre, mon père étant resté apatride toute sa vie et ma mère, française par naturalisation ; mes études de médecine commencées très jeune, puis ma pratique me faisaient découvrir une tout autre réalité…