CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Je suis un milonguero*, j’ai actuellement cinquante-huit ans, j’ai commencé à danser à treize ans, ce qui veut dire que ça fait quarante-cinq ans que je suis dans le tango. Je suis né à Sarandí, qui est un petit quartier situé à l’intérieur d’Avellaneda, qui est collé à la capitale fédérale. Avellaneda a eu beaucoup à voir avec les débuts du tango : avant 1904, Avellaneda s’appelait Barracas al Sur, et quand vous écoutez les tangos qui parlent de Barracas al Sur, ils parlent d’Avellaneda.
À neuf ans j’ai perdu mon père. Dans ma famille il y avait quatre sœurs, bien plus âgées que moi. Je me rappelle que, à huit ans, quand arrivait le samedi, elles me levaient tôt le matin, elles me briquaient, me lustraient parce que, si elles n’allaient pas avec moi, mon père ne les laissait pas sortir à la milonga*. C’était un club italien qui s’appelait El Friulano. Imagine un gamin de huit ans dans un endroit pareil. Il y avait un grand salon et derrière il y avait une piste. Moi je jouais par là, jusqu’à ce que vienne le moment de l’orchestre, et là, j’étais le premier à courir. Je me rappelle avoir écouté l’orchestre d’Osvaldo Pugliese, quand le chanteur était Alberto Moran (1950). Les femmes étaient comme les fans d’un chanteur rock : quand il a commencé, elles se sont toutes ruées sur la scène !
À mon époque, quand un garçon avait douze-treize ans et commençait à grandir, on lui mettait des pantalons longs. C’est le moment où l’on commençait à aller au café, à jouer au billard, toutes les choses de ce temps…

Propos recueillis par 
Élisabeth Dorier-Apprill
Géographe, maître de conférences à l’université de Provence, elle est membre de l’Institut universitaire de France. D’Afrique en Amérique latine, ses recherches sur les villes l’ont amenée à s’intéresser aux danses sociales urbaines. Elle a notamment dirigé et publié Danses latines et identités, d’une rive à l’autre (Paris, L’Harmattan, 2000) et, avec A. Kouvouama et C. Apprill, Vivre à Brazzaville, modernité urbaine et crise au quotidien (Paris, Karthala, 1998).
Entretien avec 
Ricardo Maceiras [1]
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    Entretien réalisé par E. Dorier-Apprill, Buenos Aires, septembre 2000.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 01/04/2012
https://doi.org/10.3917/autre.dorie.2007.01.0238
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