Le chapitre précédent a montré en quoi le cadre lisboète est propice à un ensemble d’observations touchant aux mobilités, et plus particulièrement aux circulations. Les changements qu’a connus cette ville depuis un siècle ont sans aucun doute influencé de façon singulière les caractéristiques spatio-temporelles des mobilités à l’échelle de la vie d’un individu. Migration interne vers les villes de Portugais ruraux aujourd’hui tarie, émigration portugaise vers l’Europe du Nord se spécialisant de plus en plus dans la main-d’œuvre qualifiée, immigration liée à la décolonisation, ouvertures économique, universitaire et culturelle au reste de l’Europe et du monde ont marqué l’histoire récente du Portugal. Ce catalogue suggère non seulement une intensification de la circulation aux échelles nationale et internationale, mais aussi une diversification de ses formes. Comment dès lors élaborer un dispositif d’enquêtes et rassembler un matériau empirique qui ne se centrerait pas sur des formes trop particulières de circulation ?
Une difficulté majeure tient à ce que ce travail s’inscrit d’un point de vue théorique à la confluence de plusieurs traditions de recherche qui ont connu des évolutions somme toute assez indépendantes. La conséquence la plus tangible de ce constat est que, selon les traditions, les faits de mobilité sont désignés par des mots différents et que, réciproquement, un même mot peut renvoyer à des réalités différentes. C’est bien là le nœud gordien du passage de la théorie au terrain : délimiter les concepts pour les rendre opérationnels…