Après 1450, l’atmosphère économique se modifie rapidement. Les signes de reprise se multiplient. L’attaque des friches reprend à un rythme accéléré au fil des années. L’économie rurale de la Normandie manifeste bientôt une vigueur inconnue jusque-là. Avec la première moitié du XVe siècle le contraste est total. A la langueur et à l’anémie se substituent l’impétuosité et le dynamisme. Par quel miracle s’opère une telle mutation? Comment une population exsangue a-t-elle trouvé les ressources nécessaires à pareil essor? Interrogation d’autant plus insistante qu’elle revêt une portée plus générale. En effet, l’énergie créatrice ainsi libérée est vite sortie du cadre rural et a pénétré tous les aspects de lq, vie sociale: le commerce, l’industrie, les arts et jusqu’à la pensée.
Dans l’histoire des prix et des salaires, les années 1460 marquent un tournant décisif en Normandie comme dans l’ensemble du royaume, et ceci à un triple point de vue. Le trend séculaire de baisse des prix, amorcé vers 1320, s’achève ici et fait place à un mouvement de hausse de longue durée. L’écart qui depuis 1320 n’avait cessé de se creuser entre prix agricoles et prix industriels, à l’avantage de ces derniers, se stabilise puis s’amenuise. Enfin l’évolution des salaires réels se renverse, elle aussi : une baisse séculaire succède à la hausse des cent cinquante dernières années.En admettant un instant que ces phénomènes puissent être expliqués par un facteur exogène (l’importance des stocks métalliques par exemple) et qu’ils s’imposent en quelque sorte à l’activité économique, peut-on voir, dans leur apparition, l’explication, ou pour le moins, un élément important d’explication de la renaissance économique…