Le système scolaire français se caractérise par une forte prégnance des valeurs républicaines d’universalité, de laïcité et d’indifférence à la différence, mais aussi par une réelle pluriethnicité, ce qui soulève un certain nombre de questions et peut générer des tensions. La principale question qui nous intéressera ici étant comment concilier la prise en compte de la pluralité et la promotion de l’égalité dans un système scolaire très centralisé.
Dans la plupart des contextes professionnels d’accompagnement des jeunes, la rencontre de l’« Autre » et de différentes figures de l’étranger font désormais partie du quotidien. Néanmoins, évoluer dans des espaces interculturels n’empêche pas toujours les incompréhensions réciproques, les méfiances et les hiérarchisations implicites.
De fait, les jeunes migrants et descendants de migrants, en particulier d’origine africaine, connaissent des trajectoires pour partie largement différenciées de celles des autres jeunes, mais ils ne constituent pas un public ciblé directement par les services publics et demeurent en cela une catégorie largement invisibilisée. En outre, les contextes sociaux et scolaires sont largement lus et appréhendés à travers différentes formes de catégorisation, en particulier, ethnique. La tension entre modèle universaliste et réalité ségrégative n’est néanmoins pas toujours perçue par les acteurs éducatifs et les travailleurs sociaux. Selon Elena Roussier-Fusco, nous serions passés d’un contexte politique d’« indifférence aux différences », visant une intégration individuelle et de nature politique, à des modalités de traitement des différences qui prennent implicitement ou explicitement en compte les regroupements ethniques et la nature sociale des problèmes d’intégratio…